samedi 23 juin 2007

Des lois qui sont des lois.

"Les lois - dit Montesquieu - dans la signification la plus étendue, sont les rapports nécessaires qui dérivent de la nature des choses ; & (sic) dans ce sens tous les êtres ont leurs lois, la divinité a ses lois, le monde matériel a ses lois, les intelligences supérieures à l'homme ont leurs lois, les bêtes ont leurs lois, l'homme a ses lois.
Ceux qui ont dit qu'une fatalité aveugle produit tous les effets que nous voyons dans le monde, ont dit une grande absurdité ; car quelle plus grande absurdité qu'une fatalité aveugle qui aurait produit des êtres intelligents ?
Il y a donc une raison primitive ; & les lois sont les rapports qui se trouvent entre elle & les différents êtres, & les rapports de ces divers êtres entr'eux.
[...]
Les êtres particuliers intelligents peuvent avoir des lois qu'ils ont faites : mais ils en on aussi qu'ils n'ont pas faites. Avant qu'il y eût des êtres intelligents, ils [les êtres intelligents ; note du transcripteur] étaient possibles. Ils avaient donc des rapports possibles, et par conséquent des lois possibles. Avant qu'il y eût des lois faites, il y avait des rapports de justice possibles. Dire qu'il n'y avait rien de juste ou d'injuste que ce qu'ordonnent les lois positives ; c'est dire qu'avant de tracer de cercle, tous les rayons n'étaient pas égaux."
MONTESQUIEU.
De l'esprit des lois. Livre premier. Des lois en général. Chapitre premier. Des Lois, dans le rapport qu'elles ont avec les différents êtres.
In
Oeuvres de Monsieur de Montesquieu. Tome premier. Nouvelle édition, revue, corrigée et considérablement auagmentée par l'auteur. Chez Arkstée et Merkus, à Amsterdam et Leipsick (sic), 1764 [j'ai le bonheur de posséder la totalité des oeuvres de Montesquieu dans cette édition].
Montesquieu occupe une place particulière dans le siècles papillonnant des Lumières. Esprit profond, juriste distingué, il ne fait pas partie de ces camarillas parisienne qui ont parasité les aristocratiques salons parisiens, et contaminé le clergé. Il va droit son chemin. Bien qu'il eût été injustement attaqué par de minables plumitifs dont la postérité n'a pas gardé le nom, son oeuvre demeure. Elle devrait être lu par tous les députés. Le Président de l'Assemblée Nationale devrait faire à leur intention des stages d'initiation à la pensée de ce très honnête homme. Ceci étant dit, je ne suis pas obligé de tenir ses propos pour paroles d'Evangile.
Bref mais intense retour sur la définition des Lois par la personnalité du jour. Les Lois, dit-elle, sont des RAPPORTS NECESSAIRES QUI DERIVENT DE LA NATURE DES CHOSES. Il en résulte qu'une Loi qui ne dérive pas de la nature des choses, n'est pas une Loi mais une contrainte tyrannique imposée par le plus fort aux plus faibles, et que la connaissance préalable de la nature des choses est un prérequis à son élaboration. Voilà pourquoi nombre de Lois prétendues modernes (j'en ai parlé dans un billet précédent sur la régulation des comportements) ne sont que des offenses faites à la nature, et ont fort peu de chances de durer. L'Esprit des Lois s'oppose résolument à L'Esprit du Monde d'HEGEL, Esprit qui se manifesterait progressivement par l'accumulation d'interminables séquences de thèses, antithèses, synthèses, émergeant du flux apparemment incohérent de l'histoire. Nous sommes les victimes aveuglées de ce philosophe qui ne tient aucun compte de ce que les philosophes médiévaux nommaient la substance et l'accident. Pour que quelque chose change en effet, il faut qu'il garde de lui-même l'essentiel de son être. Sinon, il n'y a pas de changement ; il n'y a que des substitutions, dont la révolution est la forme la plus violente. (HEGEL tente de garder cette notion par le concept de synthèse... ; on voit où cela nous conduit. Nombre de synthèses ne sont que des ruines, des "syntholyses", si l'on me permet ce néologisme.)
Par conséquent, sans respect de ces principes, il n'y a pas de loi.

C'est tout pour aujourd'hui.
Politis-philippe

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