lundi 3 décembre 2007

Pour une éthique de la communication

Plusieurs de mes billets ont porté sur ce que j'appelle la désinformation, volontaire ou non, que distillent des mass media comme France Info. Il me souvient avoir lu un livre difficile, mais très éclairant, de Jürgen HABERMAS, intitulé Morale & communication. Conscience morale et activité communicationnelle. (Traduction et introduction par Christian BOUCHINDHOMME. "Passages", Collection dirigée par Heinz WISMANN). [Les Éditions du] Cerf, Paris, 1986.)
On ne saurait résumer en un court billet ce que dit le brillant philosophe. Du moins ai-je retenu quelques règles pratiques qui permettent de dire qu'une communication est fondée en morale, ou qui permettent de communiquer d'une manière morale. On peut au moins donner quelques pistes qui aident à trancher ces questions.
Première règle, faire à son interlocuteur le crédit de la bonne foi ; je traduis pour les journalistes : bien séparer le rapport des faits, et des paroles, en accordant à ces dernières une valeur de sincérité, et l'interprétation personnelle de ces faits et de ces paroles, en situant le lieu (idéologique, politique, philosophique) d'où l'on parle.
Deuxième règle, s'accorder sur le sens des mots quand on discute ou que l'on communique ; je traduis pour les journalistes : quand un mot prête à confusion, en donner la définition, et bien mettre des guillemets verbaux quand on rapporte des faits ou des paroles connotés (j'ai donné un bel exemple d'un abus de langage chez France Info, où les journalistes appellent "Thèse officielle" la description de l'accident de Villiers-le-Bel par les autorités par opposition au récit qu'eux-mêmes font de cet accident en fonction de leurs informations et de leurs convictions. Il suffisait de dire : "Les autorités disent que l'accident etc.", et non pas "affirment" ou "prétendent", ni même "déclarent" et éventuellement de rajouter, "par commodité de langage nous parlerons de thèse officielle ou de version officielle".
Troisième règle, laisser parler son interlocuteur jusqu'au bout ; je traduis pour les journalistes : ne pas sélectionner dans un discours ou dans une image, celle qui favorise son propre point de vue (j'ai donné un bel exemple de cette sélection immorale en présentant le témoignage de monsieur Robert WAHICKO, qui sur France 3 affirme que les policiers sont immédiatement intervenus auprès des jeunes victimes en faisant des massages cardiaques, et qui sur France Info, a vu les policiers déplacer la voiture accidentée et quitter très rapidement les lieux.) Selon que l'on sélectionne l'une ou l'autre partie de ce témoignage, on a des avis différents sur l'attitude des policiers ; si on les joint, alors les choses prennent une tout autre signification.
HABERMAS cite un philosophe américain du nom de WHITE : "La vérité morale, dit ce dernier, n'est pas tant de savoir s'il faut faire quelque chose, que le fait que cette chose-là est la seule QUE L'ON PUISSE FAIRE". En somme, ces trois règles mettent à bas les principes des grands maîtres modernes du soupçon qui ont nom MARX, NIETZSCHE et FREUD ; elles sont la marque d'un esprit bienveillant, qui se réclame d'un maître autrement plus lumineux et sublime dans son humanité et qui s'appelait JESUS.

1 commentaire:

Anopheles a dit…

Bonsoir,

Je suis pleinement d'accord avec vous sur ces réflexions concernant la désinformation (trop) fréquente dans les médias journalistiques.

Il est évident que l'application de ces quelques règles améliorerait la qualité de la transmission des informations. Si la première règle semble applicable, de même que la deuxième, la troisième règle semble moins envisageable, des contraintes de temps, ou de nombre de mots, rendant impossible la citation complète des paroles d'un interlocuteur.

Néanmoins, et c'est une note d'espoir, s'offre aujourd'hui à nous un nouveau média, Internet, qui permettrait aisément de mettre en ligne pour qui veut en savoir plus l'intégralité d'une interview, d'une vidéo ou d'un commentaire audio.

Il est évident que cela pose d'autres questions relatives à l'authentitification de ce que l'on peut trouver sur Internet : qui est l'auteur, le document a-t-il pu être altéré ou modifié etc.

Nicolas B