dimanche 20 avril 2008

Etait-il vraiment maudit ?

Avec quelle lippe gourmande, quels sous-entendus obliques ne nous parlaient-ils pas de lui, nos professeurs de français ? Pensez-donc, un homme qui fricote avec le vice, révolvérise son ami, touchote un peu à la drogue, passe quelques temps en prison, mais écrit des vers sublimes, voilà de quoi émoustiller les adolescents que nous étions, en quête de liberté et d'expériences nouvelles. C'était un des poètes maudits que l'on présentait à notre vénération.
Eh puis, il y a quatre jours, le choc pour moi. Un journal publie de lui le poème que voici. Il est intitulé "Angélus de midi".
"Il me faut à tout prix un secours prompt et fort.
Ce fort secours, c'est vous, Maîtresse de la mort
Et Reine de la vie, ô Vierge immaculée
Qui tendez vers Jésus la face constellée
Pour lui montrer le sein de toutes les douleurs
Et tendez vers nos pas, vers nos vies, vers nos pleurs
Et vers nos vanités douloureuses les paumes
Lumineuses, les Mains répandeuses de baumes.
Marie, ayez pitié de moi qui ne vaut rien
Dans le chaste combat du sage et du chrétien.
Priez pour mon courage et pour qu'il persévère
Pour de la patience en cette longue guerre.
Ah ! vous aimer, n'aimer Dieu que par vous, ne tendre
A lui qu'en vous sans plus aucun détour subtil
Et mourir avec vous tout près. Ainsi soit-il."
Ce poème bouleversant, Paul VERLAINE l'écrivit en 1873. Je dis, je prétends et je maintiens que si nos professeurs nous avaient présenté VERLAINE dans tous ses états, y compris celui qui l'habita quand il écrivit ce texte sublime, ils auraient pu SAUVER bien des jeunes gens et des jeunes filles en grande détresse morale. Hélas, ils ne l'on pas fait. C'était contraire à la laïcité, n'est-ce pas. Lâcheté, aveuglement, haine ou mépris de la vérité, ou plus vraisemblablement ignorance, ils ne l'ont pas fait. Sinon ils ne l'auraient pas qualifié de "maudit". Peut-il être "maudit" celui qui se confie ainsi dans sa misère ? Certes non !
Nous crevons aujourd'hui de désespoir, de culpabilité, et de reniement. Mais il nous est toujours possible de "nous lever et d'aller vers notre père". Cela suppose du courage, celui de chercher la vérité. Elle est dans ce qui est, pas dans nos idéologies.

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