dimanche 1 juin 2008

A la Chine, son paquet

Je viens t'achever la lecture du petit livre sur la Chine dont je vous avais parlé hier. CAI CHONGGUO nous y apprend des choses bien intéressantes. Et le récent séisme pourrait bien entraîner des mouvements analogues à ceux que ce dissident chinois nous révèle. Le 11 juin 2005, par exemple, une émeute faisait à DINGZHOU (HEBEI) six morts et plusieurs centaines de blessés. Trois cents hommes armés avaient attaqué des paysans qui manifestaient contre la confiscation de leur terre par la GUOHA, une société de production d'électricité. Entre le 18 et 26 juin 2005, des dizaines de milliers de Chinois venus de toutes les provinces du pays, montent à PEKIN, font le siège du Bureau des Plaintes pour réclamer qu'on leur rende les terres dont on les a spoliés. Toujours le 26 juin 2005, 10.000 personnes défilent dans les rues du district de CIZHOU (ANHUI) et mettent le feu aux voitures de police stationnées au Commissariat : la raison de cette manifestation est simple ; un de ces nouveaux riches qui mettent la Chine en coupe réglée, a renversé un lycéen avec sa belle voiture. Pour le punir d'avoir, lors de cet accident, abîmé le véhicule dont il était si fier, il le bat comme plâtre. L'incident se transforme en émeute quand la Police, corrompue jusqu'à la moelle, prend le parti de l'automobiliste, bien en cour auprès du parti. WEN TIENJUN, un sociologue, estimait en 2005 toujours qu'il y avait en Chine, en moyenne, 60.000 manifestations, protestations, grèves ouvrières, émeutes, d'ampleur variée.
CAI CHONGGUO identifie cinq faiblesses fondamentales dans le système chinois actuel, qui combine, avec un rare cynisme, un système politique tyrannique verrouillée par le parti communiste, et un système économique d'une rare brutalité, inspiré d'un libéralisme mal digéré. Je ne ferai que les citer : (a) le divorce est consommé entre la population et les élites politiques, économiques ET culturelles ; (b) la classe politique entretient des rapports malsains, maffieux et népotiques avec le monde des affaires : ainsi, le Groupe de HUA NENG (une entreprise d'électricité), et le Groupe d'Electricité de la Chine sont dirigés l'un par LI XIAOPENG, le fils de l'ancien premier ministre LI PENG, l'autre par LI XIAOLIN, la fille du même. Ces deux sociétés d'électricité sont les deux plus importantes de Chine ; (c) la pauvreté de la Chine est extrême ; "l'ouverture" a permis l'émergence d'une classe moyenne de 100 millions de Chinois, et aussi d'une classe riche, évaluée à 5 % de la population, mais 900 millions de Chinois vivent au-dessous du seuil de pauvreté défini par les Nations Unies ; (d) le système bancaire est d'une extrême fragilité ; les autorités locales, après la réforme du mode d'imposition, ont dû contracter des dettes énormes auprès des banques d'Etat, elles-mêmes menacées par les faillites d'entreprises et la spéculation immobilière (tiens ! tiens !). La dette publique atteint 150 milliards d'euros, soit 15 % du PIB ; (e) la dépendance de la Chine s'est accrue vis-à-vis de l'extérieur et c'est une conséquence directe de "l'ouverture" telle que l'a pratiquée le Parti Communiste Chinois. Ainsi la situation du peuple chinois, déjà terrifiante sous MAO, mais matériellement mieux assurée qu'aujourd'hui et socialement plus juste et plus équilibrée, s'est considérablement détériorée.
Il faut savoir qu'aujourd'hui, en Chine, tout se paye ; enseignement, soins médicaux, actes juridiques, sous le contrôle absolu du Parti qui distribue les prébendes et les avantages à ses seuls cadres. Dans un de mes billets, j'avais déjà souligné des faiblesses de la Chine, et j'avais dit que je ne pariais pas sur un avenir radieux pour ce pays dont j'aime profondément la culture, l'art, l'histoire, le peuple. La mentalité des Chinois ne me semble pas avoir beaucoup changé dans le peuple lui-même, et il est probable que celui-ci doit voir dans les terribles catastrophes naturelles dont il est la victime le signe que le Mandat du Ciel abandonne le pouvoir. On peut s'attendre de la part de ce dernier à des durcissements, un renforcement du contrôle sur parti sur les actes, pensées et paroles des citoyens, et peut-être à une explosion générale.
Nassim est-il content ?

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