mercredi 11 juin 2008

Les historiens d'hier ; les historiens d'aujourd'hui

Voici comment Henri de VALENCIENNES commence son ouvrage intitulé Continuation de l'Histoire de Ville-hardouin. On comparera, en s'amusant, avec la manière dont un grand historien contemporain considère son travail.
Moi, Henri de Valenciennes, suis d'avis que lorsque quelqu'un s'entremet de bien dire et de raconter, et qu'il a pour cela les talents et qualités nécessaires, doit travailler à rechercher sur toutes les choses la pleine vérité. Aussi veux-je dire et traiter ce dont j'ai été témoin, et que je peux garantir, etc.
Henri de VALENCIENNES ne prétend pas écrire l'Histoire, ni l'interpréter, ni en donner le sens. Il désire raconter ce qu'il a vu. Certes, il lui manque la méthode scientifique, et surtout le recul. Mais du moins fait-il l'effort de rester près des faits, et l'on chercherait avec peine des passages où il exprime son propre sentiment ou un début d'interprétation de ce qu'il a vu.
Voyons maintenant comment Jacques LE GOFF, dans son ouvrage Civilisation de l'Occident médiéval intitule les chapitres successifs de son ouvrage (plan cité, commenté, et heureusement ridiculisé par Jacques HEERS ; cf. mon billet d'hier) : La lutte des classes en milieu rural ; La lutte des classes : société urbaine et société féodale ; La femme dans la lutte des classes (sic !) ; Rivalités à l'intérieur des classes ; L'Église et la Royauté dans la lutte des classes.
Pour faire de l'histoire, monsieur LE GOFF ne s'est point appuyé sur son sens critique, ses connaissances, l'analyse objective des documents de l'époque et DE CE QU'ILS DISENT DE CELLE-CI (ce qui est le B.A. BA de la méthode historique scientifique). Non. Monsieur LE GOFF, armé du Capital de papa MARX, s'est échiné à faire rentrer ceux-ci dans la grille qui explique tout sans rien démontrer : celle de la lutte des classes. C'est une absurdité, à l'évidence, et qui montre comment fonctionne l'idéologie. On a des faits, on les trie, et on les fait rentrer dans son système. Tant pis s'il quelquefois il faut les forcer, les égratigner, les tordre. IL FAUT QU'ILS Y RENTRENT.
On est loin de ce qu'écrit Luc au début de son Évangile et que je vous rapporte pour terminer : Puisque beaucoup ont entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous, tels que nous les ont transmis ceux qui furent dès le début témoins oculaires et serviteurs de la Parole, j'ai décidé, moi aussi, après m'être informé soigneusement de tout depuis les origines d'en écrire pour toi l'exposé suivi, illustre Théophile, afin que tu te rendes compte de la solidité des enseignements que tu as reçus.
Luc s'informe. Il n'est pas témoin oculaire (monsieur LE GOFF non plus, mais on ne peut lui en vouloir), il fait un récit suivi (monsieur LE GOFF aussi), il s'informe soigneusement de tout depuis les origines (monsieur LE GOFF puise dans MARX et ses continuateurs les instruments de tri et d'analyse ; son histoire est un conte accomodé à la sauce moderne).
On appréciera la différence.

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