mercredi 19 novembre 2008

A un proche

Un proche m'envoie un poème plein d'humour dans lequel il s'étonne de mon apparente volte-face d'opinion sur madame Ségolène ROYAL, et de mes piques dirigées exclusivement contre "la gauche".
Je tiens à mettre ici les choses au point. Je persiste à croire que madame ROYAL n'a pas les compétences politiques requises pour jouer un rôle de premier plan dans notre pays. Mais je suis bien obligé de constater que ses remarques d'hier ou d'avant-hier font appel à des valeurs qui me sont chères et que j'ai toujours défendues depuis l'ouverture de ce Blog : l'honneur et la fraternité. Je trouve parfaitement pertinent les critiques qu'elle porte sur le décalage entre la volonté politique affichée de ses compétiteurs : instaurer une société plus fraternelle, et leurs pratiques qui sont tout sauf fraternelles. Il y a là une contradiction difficilement dissimulable. Quant au ralliement de monsieur DELANOE à madame AUBRY, il s'est négocié selon toute vraisemblance contre le retrait de madame PENINOU, partisan de madame AUBRY, devant monsieur FERAUD, ami du maire de PARIS et candidat aux élections de secrétaire de la section socialiste parisienne, aux fins de remplacement de monsieur BLOCHE. Monsieur DELANOE semble avoir vu plus loin que le bout de son nez dans cette affaire où, de toute façon, il avait perdu la partie nationale.
Quant à ma critique concernant la non application des lois, revendiquée par des élus de gauche, elle ne porte pas sur le fait qu'ils sont à gauche - c'est un constat - mais sur le fait qu'il est difficile de revendiquer la démocratie quand on se refuse à l'appliquer. Les lois, votées par une majorité élue démocratiquement, s'imposent à tous dans l'espace public. J'ai déjà eu l'occasion de dire, et je le redis ici, que les consciences des citoyens sont infiniment plus violées par les lois sur l'avortement qu'elles ne le sont par celles qui instaurent le service minimum d'accueil. Ces lois, il est vrai, respecte la conscience des praticiens, et aucun d'entre eux n'est obligé de pratiquer des avortements s'il réprouve ces actes.
Il en ira de même, je l'espère, si par malheur la loi légifère sur le droit à mourir. (Petite remarque annexe : J'ai longuement fréquenté le milieu médical, et je puis vous dire que les médecins veulent la vie et non la mort, le soulagement et non la souffrance ; ils sont tout simplement d'accord pour ne pas pratiquer un acharnement thérapeutique qui ne prolongerait que de quelques heures les jours de leurs patients sans alléger leurs douleurs, et peu d'entre eux approuve la pratique de l'avortement, hormis cas d'inceste ou de viol, il faut le ici dire par honnêteté.)
A dire vrai, nous ne savons plus penser. Nous réagissons comme des automates à la moindre contrariété ou dissentiment politique. Nous ne sommes pas capables de faire le crédit de la bonne foi à nos contradicteurs ou à nos adversaires politiques. Au lieu d'argumenter en raison, on ostracise ; madame AUBRY a été remarquable dans cet exercice hier soir sur France 3. Si elle est élue premier secrétaire (on ne m'en voudra pas d'utiliser un masculin, signe de l'intensif dans la langue française), on risque d'entendre souvent des condamnations de Nicolas SARKOZY et un minimum de propositions ; elle a affirmé qu'il y en avait aux difficultés que traverse la France, mais elle s'est bien gardé de nous dire lesquelles : la semaine de 10 heures et la retraite à 35 ans peut-être ? Tout cela est assez peu responsable.
La solution n'est pas uniquement dans l'augmentation du pouvoir d'achat, même si ce point est sensible pour nombre de français et doit être traité par les pouvoirs publics, ni dans le renforcement des "luttes sociales" ; la solution est dans un changement de paradigme social. Il ne passe ni par l'individualisme forcené, ni par la collectivisation. Le désir de posséder, dans tous les cas reste le même. Car l'homme est ainsi fait. Il passe par une vigoureuse promotion de la fraternité, par le développement d'entreprises de plus petites dimensions, conduites par des entrepreneurs responsables, par une analyse socio-économique rigoureuse des dangers de l'industrialisation outrancière, par un réaménagement complet des modes de transport, d'alimentation, de production et d'utilisation d'énergie, par un regard plus fin porté sur la publicité et les petites manies journalistiques (les connotations des discours des journalistes de droite comme de gauche ne trompent pas un lecteur attentif). Bref par un retournement complet de l'anthropologie telle que l'envisage le monde politique et économique. Il y faudra des années, des décennies, des siècles peut-être, mais ce nécessaire changement est inscrit dans la nature même des méfaits de notre civilisation.

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