dimanche 29 juin 2008

Des réalités qui dérangent

J'ai glané dans divers journaux des informations qui éclairent d'une lumière douteuse ou oblique des personnalités qui furent en vue ou le sont encore. Bien entendu, il ne faut jamais enfermer un être humain dans un acte ou une parole, et nul ne peut dire ce qu'il aurait fait s'il avait été à la place de ces personnalités. Du moins est-on en droit d'attendre d'elles, sinon la contrition, du moins l'aveu de ce que fut leur vie, une certaine cohérence donc. Ainsi, Anne-Marie CAZALIS, lauréate en 1943, du Prix Paul VALERY (créé par le Groupement des Étudiants de France, émanation de VICHY), deviendra sans complexes ni remords l'égérie des existentialistes. Marguerite DURAS qui fait la pluie et le beau temps à la Commission de Contrôle du papier d'édition, à la botte de l'occupant, se flattera dans La Douleur (sous le pseudonyme de Mme ANTELME), d'avoir torturé des collabos en 1945 (informations données par le journal Présence, N°605, samedi 7 juin 2008). La seule douleur tolérable, disait je-ne-sais-qui, assez psychologue ma foi, est la douleur des autres ; peccadille donc que ces tortures infligées à autrui, surtout si c'est une ordure.
Le très pointilleux Président de la HALDE, Haute Autorité de Lutte contre la Discrimation et l'Exclusion, discute doctement de l'égalité devant l'emploi d'un candidat de 45 ans et plus, d'un jeune diplômé se prénommant Pierre, et d'un autre répondant au prénom de Mohamed. Il se désole de voir que leurs chances, à compétences égales, ne sont pas identiques. Monsieur Louis SCHWEITZER ne risque point, certes, d'avoir de ces problèmes. Ancien conseiller de Laurent FABIUS, membre du Conseil de Surveillance du Monde, il préside les conseils d'administration d'ASTRA-ZENECCA (un très gros laboratoire pharmaceutique) et de RENAULT ; il est administrateur d'AB VOLVO, de BNP PARIBAS, d'EDF, de l'OREAL, de VEOLIA, et membre du Conseil de Surveillance de PHILIPS ; il touche au titre de ces diverses fonctions, les indemnités et jetons de présence afférents. N'y-a-t-il pas un indécent cumul de revenus pour une responsabilité sociale assez mince ? Et moi qui ne suis pas énarque, mais n'ai trouvé un emploi stable qu'à Bac + 15, aurais-je eu les mêmes chances que monsieur SCHWEITZER ? Je ne le crois pas, et ça ne me gêne pas. (Je n'envie aucunement monsieur SCHWEITZER qui doit avoir une vie de chien et un agenda rempli au point de fatiguer ses artères et son coeur.)
Dans un régime politique où l'on érige la liberté individuelle au rang d'un dogme qui n'est que celui de l'individualisme, il est assez plaisant de constater que l'on refuse aux chefs d'entreprise le droit d'embaucher le candidat de leur choix pour un poste dont ils sont les seuls ou presque à connaître intimement les contraintes et le profil. Il n'y a qu'un façon de régler le faux problème de la discrimination à l'embauche, c'est de contraindre par la loi les chefs d'entreprise à recruter x% de candidats dont le nom a une consonance qui en indique l'origine étrangère et y% de candidats de plus de 45 ans. Mais on pourrait aussi éliminer une partie du premier problème en interdisant, comme jadis, à tout citoyen français de porter un prénom qui ne figure pas au martyrologe ou qui n'est pas sanctionné par un antique usage. Cette règle a été modifiée par les socialistes et a conduit à la situation que l'on sait et que condamne la HALDE. J'ai ainsi connu un étudiant originaire du Proche-Orient, un chercheur remarquable, qui en prenant la nationalité française a changé son prénom de Mohamed en Marc, et a francisé son nom. Il faisait ainsi confiance à sa nouvelle patrie qu'il honore par son talent et son travail, je puis vous l'assurer. Merci à vous, très cher Marc !
On pourrait multiplier ces exemples de contradictions entre les paroles et l'action. Et nous n'en sommes pas davantage exempts que les personnages en vue cités plus haut. Mais justement ils sont en vue, et servent de MODÈLES. On est en droit d'attendre d'eux qu'ils ne déshonorent pas un tel statut.

samedi 28 juin 2008

Informations positives, informations négatives

Deux sénateurs roumains, l'un du parti au pouvoir (le Parti National-Libéral), l'autre du Parti de La Grande Roumanie, ont fait voter, à l'unanimité, par leurs collègues, un projet qui prévoit que les programmes d'actualités des télévisions et radios devraient, dans la même contenir des informations positives et négatives.
Bien entendu, levée de bouclier de la part des journalistes qui ne partagent pas l'objectif visé par les sénateurs d'améliorer le climat général et d'offrir au public la chance d'avoir des perceptions équilibrées de la vie quotidienne, psychiquement et émotionnellement.
Une actualité est une actualité, elle n'est ni positive ni négative, elle reflète tout simplement la réalité dit avec une apparente justesse, le président du CNA (Conseil National de l'Audiovisuel), Rasvan Popescu. Cette remarque serait effectivement juste si les médias avaient la possibilité de connaître la totalité de l'actualité, y compris dans les plus petits faits, ceux qui ne font pas de bruit et sont cependant positifs et remarquables. Absolutiser l'actualité, comme le fait monsieur POPESCU, en feignant de croire ou en croyant qu'on peut y accéder dans sa totalité, est au mieux une erreur, ou une idolâtrie, au pire un poison, un mensonge et une manipulation en vue d'accéder à la puissance sur les esprits. Je veux bien croire à la sincérité de monsieur POPESCU, mais je mets en doute son sens critique. A vrai dire, pas plus que je ne crois à la neutralité des médias (qui choisissent les sujets, les ordonnent selon une progression intentionnelle, les commentent [je donnerais un exemple tout à l'heure], et leur donnent une couleur, positive ou négative justement), je ne crois à la possibilité de ventiler les nouvelles en catégorie positive ou négative. Je peux simplement espérer plus d'objectivité dans leur présentation, et de plus solides références aux valeurs, ou aux vertus sur lesquelles notre système politique est construit. Bref, un recours à plus de pensée et de réflexion, et un refus du recours au réflexe conditionné de l'idéologie.
Ainsi, le SMIC vient d'être augmenté de 2,5 %. Présentation des médias : "Le SMIC est augmenté de 2,5 % ; c'est moins que l'inflation". Cette présentation est intentionnellement négative, et diffusée sous cette forme en vue de nuire. Il était plus juste de titrer : "Le SMIC est augmenté de 2,5 % ; les bénéficiaires notent que c'est moins que l'inflation, et juge cette augmentation insuffisante", et plus juste d'indiquer, dans le commentaire, que cette augmentation n'est pas négligeable en cette période de difficultés économiques, surtout si l'on y ajoute tous les coups de pouce qui ont été donnés ici et là aux ménages les plus modestes (prime de rentrée scolaire, prime à la cuve, prime pour l'emploi, etc.), et viennent abonder leurs ressources. Vous le voyez, la méthode des médias est simple : ils isolent un fait de son contexte, comme s'il avait une existence propre (ce qui est bien évidemment stupide), et ne cherchent pas (pour la plupart) à les mettre en relation avec d'autres faits.
En somme, selon le caractère optimiste ou pessimiste du journaliste, selon ses opinions politiques, philosophiques ou religieuses, il présentera, avec la meilleure bonne foi du monde, une série de faits qu'il aura sélectionnés parmi ceux dont il aura eu connaissance, et il nous donnera pour vérité définitive ce qui n'est qu'une présentation personnelle d'une toute petite partie de l'histoire quotidienne du monde.
Toutefois, je partage l'avis des deux sénateurs (et j'en veux pour preuve l'euphorie des Français après la victoire de notre équipe au Mondial de football), l'humeur des gens, et leur vie même, sont très fortement influencées par la tonalité et la couleur que les grands médias donnent à leurs informations. Il faut cependant se garder de tout ce qui ressemblerait à de propagande ou de la manipulation.
J'en profite pour dénoncer ici avec violence et révolte, une publicité de la Mairie de Paris, payée avec l'argent des contribuables. Une affiche : on y voit sous ses meilleurs airs, en couleur, l'hôtel de ville, et sous la photo, un commentaire : "Paris protège l'amour" ; à la place du soleil, un préservatif aux reflets dorés. Paris protège ainsi les relations sexuelles à risque, lesquelles n'excluent pas l'amour certes, mais ne les incluent pas forcément non plus, et j'aurais même tendance à dire s'en passent fort bien. Voilà comment avec des mots on tourneboule la cervelle de nos concitoyens, on assène des équivalences (amour égale relations sexuelles quand on veut, si l'on veut, où l'on veut) qui n'ont aucun appui sur le réel ou le vécu des êtres de chair. Lamentable ! Triste ! Honteux ! Dangereux. Bien dans l'esprit du temps, bien dans l'esprit parisien.
Remarque du soir. Je viens de passer devant l'une de ces publicités de la Mairie. Je n'avais pas vu que l'Association ou le Groupe qui soutient cette initiative s'appelle "Paris-Plaisir/Paris-capotes". Mon commentaire est donc amplement justifié : c'est le plaisir que l'on protège, et certainement pas l'amour. Pouah !

vendredi 27 juin 2008

Au risque de vous lasser

Ceux de mes lecteurs qui me font l'honneur de consulter quotidiennement mes billets peuvent à bon droit se poser des questions. Il touche à tout, ce type ! Où veut-il en venir ? Politique, Chine, Philosophie, Morale, Histoire, et l'on en passe. Tous les jours il change ! Et il ne tape que sur la gôôôôche (ce qui n'est pas tout à fait vrai). IL NOUS GONFLE !
Eh bien je vais vous étonner. Il y a une profonde cohérence dans mes propos, et une intention délibérée : celle d'inciter à penser plutôt que de se contenter d'idées toutes faites. Je n'aurais pas su expliquer plus clairement mon objectif, si, continuant de lire mon cher Gustave (THIBON), je n'avais trouvé ceci, que je vous livre, au risque de vous lasser :
Quoi qu'il fasse et quoi qu'il désire, qu'il se cramponne au passé ou qu'il coure vers l'avenir, qu'il se cherche ou qu'il se fuie, qu'il se durcisse ou qu'il s'abandonne, dans sa vertu comme dans son péché, dans sa sagesse comme dans sa folie, l'homme n'a qu'un voeu et qu'un but : échapper au filet du temps et de la mort, franchir ses limites, être autre chose qu'un homme. Sa vraie demeure est un au-delà, sa patrie réside en dehors de ses frontières. Mais son malheur veut - et là gît le noeud de cette perversion que nous appelons erreur, péché ou idolâtrie - que, trompé par des apparences et cherchant l'éternel au niveau de ce qui passe, il s'éloigne encore davantage de cette unité perdue, de cette perfection entrevue en songe.
[...]
Jamais l'homme ne s'était senti aussi mal à l'aise dans ses limites : comme il a désintégré les atomes, il a fait éclater en lui toutes les dimensions de l'humain ; il s'est tellement vidé de son équilibre naturel et de ses assurances terrestres qu'il ne peut plus être retenu sur la pente du néant que par le contrepoids de l'absolu. C'est le grand signe de notre temps que la révélation de l'inanité des compromis, des demi-mesures, des vertus utilitaires et ornementales ; le dilemme : Dieu ou rien ne se présente plus comme un thème de dissertation philosophique ou d'envolée oratoire : il a pénétré jusqu'au noeud de notre chair et de notre âme, il se pose avec l'urgence d'une manoeuvre de sauvetage à bord d'un navire en perdition.
In
Notre regard qui manque à la lumière.
Fayard, Paris, réédition de 1995.
Cette analyse est profonde et pénétrante : elle explique, sans les justifier, les excès des altermondialistes et leurs violences lors des conférences internationales tenues ici et là sur le Commerce, ou les Echanges ; l'émergence des écologistes, les faucheurs volontaires d'OGM ; les propos enflammés d'un Olivier BESANCENOT ; et ceux, apparemment sages et mesurés, mais tout aussi idolâtres, des grands de la finance ou de la politique ; le désespoir des pauvres. L'heure n'est plus aux demi-mesures, aux vertus aseptisées par le conformisme moral ou le politiquement correct. L'heure est au choix, car c'est l'heure (combien de fois l'ai-je dit) de l'apocalypse, l'heure où le voile se lève sur le néant vers lequel nous courons si nous ne changeons pas, et qui nous plonge dans l'urgence d'une décision.
Les politiques se gargarisent avec le développement durable, les énergies renouvelables, la solidarité internationale. Ce ne sont là que des "paroles verbales", de mots creux, des "attrappe-voix". Ils n'affrontent pas CONCRÈTEMENT les vrais problèmes. Nous ne pouvons plus vivre comme si les richesses de la terre étaient inépuisables, l'air et l'eau, des biens sans valeurs, et l'humanité, un vivier de main d'oeuvre, sans dignité, sans cervelle, sans désirs. Pour satisfaire notre soif d'infini, il nous faut renoncer à toutes les idolâtries, et vivre plus pauvrement, mais avec plus de densité. Et il faut choisir Dieu. Pour ce qui me concerne, je mesure la difficulté de ce choix ; je l'ai déjà dit, je suis dans le même bateau que mes cibles. Il faudra bien pourtant que je me décide. Et réfléchir avec vous à voix haute grâce à ces billets quasi quotidiens est pour moi une aide puissante.
Quelqu'un aura-t-il la gentillesse de commenter ?

jeudi 26 juin 2008

Quand le monde marche sur la tête

Quelques commentaires sur les nouvelles de ce jour.
Le Procureur du tribunal correctionnel d'AVESNES-SUR-HELPE a requis 800 euros d'amende contre un Professeur de BERLAIMONT (Nord) qui a donné une giffle à un élève après que celui-ci l'eut traité de connard. Ce Procureur, qui pense tellement politiquement correct, Bernard BEFFY, a même vu dans le geste de ce Professeur excédé, une volonté d'humiliation, ce qui est une circonstance aggravante. Ainsi, chers Collègues de tous les ordres d'enseignement, du primaire à l'université, vous devez accepter d'être injurié par les malotrus sans réagir, surtout quand il s'agit d'un fils de gendarme. J'aurais été le père de ce jeune, j'aurais doublé la dose et il eût reçu une BONNE PAIRE DE CALOTTES, et quelques sanctions supplémentaires. Je pense que nous devons manifester notre solidarité à cet enseignant qui n'a pas su et pas pu maîtriser une légitime colère. Et que nous devons demander à notre ministère de tutelle une meilleure protection contre ces actes, révélateurs de la décadence de nos moeurs, et de l'aveuglement de certains parents.
Un groupe de travail du Sénat sur la Maternité pour autrui a proposé hier de légaliser la pratique des mères porteuses. Certes, le rapport ne prend en compte que les couples hétérosexuels et stériles ; certes, il exclut (et c'est bien le moins), toute rémunération, à l'exception d'un dédommagement raisonnable (?) des frais que la Sécurité sociale ne couvriraient pas. Le texte prévoit qu'une soeur puisse porter un enfant pour sa soeur, mais non une mère pour sa fille (ah mais ! on a des principes au Sénat !), limite à deux le nombre de grossesses conduites pour autrui (Pourquoi deux ? On se le demande. Ce pourrait être un, trois, ou un nombre illimité pendant qu'on y est). Tenez-vous bien, la mère porteuse peut, dans un mouvement de repentir, garder l'enfant comme le sien propre si elle le décide dans les trois jours qui suivent la naissance. On a quand même envie de poser la question de l'enfant. Comment pourra-t-il se situer dans une situation triangulaire de ce type ? Quand on connaît les difficultés qui encombrent la vie d'adolescents et d'adolescentes adoptés, en dépit de l'amour que leur a porté leurs parents adoptifs, on est stupéfait de voir surgir ces propositions. Il est bon, peut-être, de rappeler que l'enfant est un don, non un dû (Jean-Paul II). Il se peut que ce propos déplaise. Je dois dire que ça m'est égal. Je le crois conforme à la nature humaine, à la vérité profonde de l'homme. Tout ce qui vient en outre ne sert que de fondations au malheur de vivre de ces malheureux voulus non pour eux-mêmes mais pour satisfaire le désir de leurs parents.
Folie des grandeurs à DUBAÏ. On projette d'y construire une tour dynamique de 80 étages. Chaque étage, qui ne comportera qu'un appartement, pourra faire un tour complet en une à trois heures, sans se soucier du mouvements des appartements sis au-dessous ou au-dessus. Ainsi les habitants pourront choisir l'orientation de leur nid douillet en toute liberté. Les dix derniers étages se verront dotés d'ascenseurs pour voitures. Certains appartement feront 1200 mètres carrés et seront vendus 23 millions d'euros, pour la plus grande satisfaction des philippins et des pakistanais, employés comme petites mains, personnels de maison, domestiques, etc., qui sauront où l'on conserve leur passeport, et pourront bénéficier du meilleur ensoleillement possible. Car les maîtres, pour se garder leur monde, confisquent les passeports de leurs employés de maison. Nous n'avons pas de leçons à recevoir de ces pays qui traitent les étrangers à leur service comme du bétail humain. Et les organisations de gôôôôche qui critiquent les reconduites à la frontière pourraient a contrario manifester à DUBAI pour les promouvoir, les organiser et les favoriser.
Tout cela est fou, démesuré, loin de tout réel ; tout cela fait fi de la fraternité ontologique de tous les êtres humains ; tout cela révèle que l'homme de nos jours, est réduit à un atome social, au rouage d'une mécanique mue par l'individualisme et par l'argent.
Croyez-vous que cela puisse durer encore longtemps ? Je ne le pense pas, et je devine chez de nombreux jeunes des mouvements profonds de régénérescence sociale, morale et religieuse. Ils ne font pas de bruit. Ils ne sont pas people. Ils ne vont pas à la Star Ac, et ils ne la regardent pas. Mais ils visitent les malades, les emmènent à Lourdes, fréquentent les Associations humanitaires, et certains, mirabile auditu, vont à la messe tous les jours. Ils font de l'alphabétisation, aident au Resto du coeur, s'occupent de jeunes en difficulté. Le bien ne fait pas de bruit. Mais le bruit ne fit pas de bien.

mercredi 25 juin 2008

De la sincérité

J'ai déjà chanté mon admiration pour Gustave THIBON. Tout ce qu'il dit est rare, dense, pensé, pesé et il faudrait tout retenir de ses écrits. Voilà par exemple un petit bijou, qui éclaire bien des comportements, des opinions, et des choix politiques ou moraux. (In Notre regard qui manque à la lumière. Fayard, Paris, réédition de mai 1995)
Je ne connais pas, dit le philosophe vigneron, de notion qui prête le plus le flanc à l'équivoque (et au mensonge) que celle de la sincérité.
Si la sincérité consiste à manifester extérieurement ce que l'on est l'intérieur, je ne crains pas d'affirmer que tous les hommes sont sincères, y compris les pires menteurs. Car le mensonge révèle un être au même titre que la vérité : il est la fidèle projection au dehors d'une nature intrinsèquement frelatée. L'âme du faux-monnayeur est faite d'un alliage aussi impur que les produits de son industrie. L'inconstance, la fourberie sont la "sincérité" du décadent, du lâche et de l'intrigant : leurs actes expriment leur âme, il y a coïncidence entre l'extérieur et l'intérieur. Il ne s'agit donc pas de sincérité ou de mensonge, mais de la qualité, du niveau des sincérités. Tout est sincère en nous, même le masque, car dans l'ordre moral, le masque est un visage malade.
Et ceci encore, aussi fort, aussi dérangeant, aussi juste.
A celui qui ne peut pas guérir, il ne reste qu'une issue, qu'une revanche : répandre son mal au dehors. Sous le masque de la morale, de l'art ou de la religion, que d'efforts déploient chaque jour des coeurs infectés pour rendre contagieux un mal incurable. On rapporte avec horreur l'acte du tuberculeux qui crache dans les aliments pour communiquer son mal à ses proches. Ce misérable a beaucoup d'émules dans l'ordre spirituel ; ils sont peintres, philosophes ou romanciers, mais au lieu de susciter le dégoût, ils récoltent la gloire. Je préfère ne pas citer les noms illustres que la nausée met sur mes lèvres... Le sommet de la pureté, pour de tels malades, serait de renoncer simultanément à la guérison et à la diffusion de leur mal.
Vous comprenez peut-être, si vous êtes un lecteur assidu de ces pauvres billets, pourquoi je lutte contre le penser faux, l'idéalisme utopique, le "tout se vaut", la culture décadente qui nous cerne, nous infiltre, nous envahit, et se diffuse comme un cancer. JE ME PROTÈGE D'UN PLUS GRAND MAL. Croyez bien que je n'entretiens aucune illusion sur moi-même ; je sais bien que je ne vaux pas plus que ceux que je critique. Du moins essayé-je de ne pas répandre mes propres poisons dans mon entourage. Le fond de ma pensée est simple : compassion pour la faiblesse et l'imperfection des tous les êtres humains, et je m'inclus, sans trop insister, dans les objets de ma compassion, - il est difficile d'aimer les autres si l'on n'a pas l'amour de soi (les aimer "comme soi-même" dit Jésus). Mais je désire ouvrir les yeux sur mes propres limites, ma propre maladie. Car le même Jésus condamne ainsi ceux qui disent avoir la lumière : Parce que vous dites "je vois", VOTRE PÉCHÉ DEMEURE.
Inlassable recherche de la vérité, inlassable quête de la lumière, n'est-ce pas là le but de toute vie humaine, là où elle se déploie, dans un lieu, une histoire, une culture précis et incarné ? N'est-ce pas là le but que tout homme politique devrait assigner à son action : conduire ses concitoyens à la FIN QUI LEUR EST DUE, la lumière, la vérité, et le sens ?

mardi 24 juin 2008

Martine se confesse

Les journaux ont assez peu rendu compte des propos de Martine AUBRY, tenus il y a deux jours sur RTL. Ils valent la peine d'être rapportés. Mère des catastrophiques 35 heures, Martine trouve très grave que le gouvernement ait balayé le protocole signé par le CGT et la CFDT et le MEDEF avec un texte qui remet en cause le paiement des heures supplémentaires et le repos compensateur. Je n'ai pas suivi d'assez près ces négociations pour savoir où est vraiment la vérité. Elle doit être entre les déclarations lénifiantes de Xavier BERTRAND et les fulminations forcées de Bernard THIBAULT et François CHEREQUE. Mais il faut quand même que madame AUBRY se rende compte de la désorganisation qu'elle a introduite dans la marche des entreprises et des administrations d'état, et en particulier des hôpitaux, où il est impossible d'appliquer sa loi, faute de personnel. (C'est un milieu que j'ai bien connu par profession. Le personnel hospitalier est admirable de dévouement ; la loi lui fait obligation s'assurer la continuité des soins ; de sorte que les trente-cinq heures relèvent de l'aimable plaisanterie. Accumulation de RTT et de repos compensateurs non pris, travail harassant dans un système où les "Droits des usagers" et la crainte des poursuites judiciaires de la part de malades mécontents, ont faire perdre une partie de l'intérêt du métier, démobilisent les bonnes volontés, accumulent de l'amertume, et font fuir vers le secteur privé.)
Martine poursuit : elle est favorable aux 41 années de cotisation pour une retraite pleine et entière. Tiens ! tiens ! Mais voilà qui est nouveau. Alors pourquoi son parti soutient-il les grèves destinées à protester contre cette mesure de bon sens ? Elle ajoute, et je suis d'accord avec cette remarque, que ce qui est possible pour beaucoup de catégories (ah ! ce mot de catégorie, tellement aimé des socialistes, qui fustigent l'existence des classes et feignent de croire que changer de mots suffit à changer la réalité) ne l'est pas quand on a commencé à travailler tôt, quand on a eu des emplois pénibles.
Martine, très généreuses avec l'argent des autres, surtout quand il s'agit des contribuables, suggère de donner un bonus aux entreprises qui ont un pourcentage de salariés seniors plus élevés, par le biais de cotisations sociales. Je ne comprends pas ce que veut dire ce dernier membre de phrase, ou plutôt je crains de comprendre qu'on pénalisera les méchants qui ne veulent pas employer le nombre de seniors fixé par la loi. Plaignons les entreprises d'élagage, de transport routier, de jardinage, ou toutes entreprises qui requièrent de leurs employés un certaine forme physique.
Et, cerise sur le gâteau, Martine est favorable à une régularisation importante des sans-papiers, mais pas à une régularisation générale. Pour le membre d'un parti qui réclame plus de transparence de la part de l'administration chargée de distribuer des titres de séjour, il y a là un léger flou : que veut dire importante ? Et pourquoi faudrait-il régulariser des personnes qui ont délibérément enfreint la loi ? Quels critères appliquerait-elle si elle était aux affaires ? Ne voit-elle pas que ceux qui souffrent de cette immigration, compréhensible (je l'ai déjà dit) mais incontrôlée, ce sont précisément les catégories dont elle prétend défendre les intérêts ? L'homme est ainsi fait qu'il a besoin de repères pour s'identifier. C'est la raison pour laquelle, en France même, on voit des regroupements d'immigrés maliens, turcs, ou chinois, qui finissent par changer le paysage familier auquel nos propres compatriotes étaient habitués depuis leur enfance, et qui leur font perdre des repères identitaires auxquels ILS ONT NATURELLEMENT DROIT. Pourquoi acceptons-nous ces ghettos communautaires là où il faudrait au contraire permettre aux arrivants de s'immerger complètement dans leur pays d'accueil ?
Martine a compris cependant, et c'est un grand écart, qu'il faut reconduire à la frontière les personnes qui ne respectaient pas nos règles ce qui ne l'empêche pas de critiquer la politique du chiffre de monsieur HORTEFEUX. Et s'il s'agissait simplement de reconduire systématiquement toute personne qui ont délibérément enfreint la loi ? J'attends toujours que Martine nous dise comment elle aiderait les pays du tiers-monde à se développer, quel pourcentage du PIB elle entendrait consacrer à l'aide économique des pays émergents, comment elle envisage une vraie politique durable de coopération avec ces pays, dans des perspectives humanisantes, j'attends d'elle autre chose que cette politique d'assistanat qui ne reconnaît aux pauvres que des droits (sans les leur assurer) et aucun devoir, ce qui leur ôte toute dignité. Mais je note avec intérêt que les idées de Martine évoluent. Fasse le ciel qu'elle puisse influencer les éléphants dans le bon sens. Martine s'est confessée. Les éléphants lui donneront-ils l'absolution ?

lundi 23 juin 2008

La rencontre de l'autre

L'exacerbation des haines raciales ou religieuses de par le monde ne laisse pas d'interroger sur leurs raisons et les conditions qui permettraient de les atténuer, voire de les faire disparaître. J'y ai longuement réfléchi pendant le week-end, passé à STRASBOURG. Et je me sens dans l'obligation de vous livrer les fruits de ma réflexion.
La première des conditions, me semble-t-il, consiste à considérer l'autre COMME SON SEMBLABLE. D'aller vers lui (de s'en rapprocher physiquement et psychologiquement) sans prévention, sans a priori, et je dirais même, avec sympathie. Le prochain, en effet, est celui DONT ON SE REND PROCHE.
La deuxième condition est de reconnaître, connaître et estimer ses différences. On peut aisément les cerner : différences de couleur de peau ou de cheveux, d'aspect physique, de langue, d'origine géographique, de culture, de codes de communication et de politesse. Elles font que si l'autre est notre semblable, il n'est ni notre double, ni une réplique de ce que nous trouvons être l'idéal de l'être humain.
La troisième est, s'il est possible, de connaître les fondements de cette culture, de ces codes de communication et de politesse. Nous ne pouvons exiger de l'autre qu'il connaisse les nôtres. Mais nous pouvons EXIGER de lui qu'il applique dans ses relations avec nous les codes de politesse et de communication de sa culture d'origine. Je me suis laisser dire qu'il existe douze modes de relation de courtoisie au Japon, lesquels dépendent de la position sociale ou professionnelle, du sexe, ou d'autres facteurs qui échappent quelquefois à nos catégories. Je trouverais anormal que ces codes ne me fûssent pas appliqués par un Japonais. Réciproquement, nous devons appliquer à l'autre les règles de respect et de courtoisie qui sont les nôtres, et qu'il est aisé de lui expliquer.
La quatrième condition est d'admettre que nous vivons sur une grande illusion depuis les Lumières, celle de l'universalité de nos valeurs. Il n'en est rien. Nos valeurs ne sont pas universelles. Peut-être en est-il une qui fut partagée par de nombreuses et brillantes civilisations (je pense à la civilisation égyptienne ou à la civilisation chinoise) et qui était chez nous, jusqu'à un passé récent, comme NATURALISÉE : ne pas faire à autrui ce que l'on ne voudrait pas qu'il nous fasse (des textes égyptiens le disent presqu'en ces termes, et CONFUCIUS le dit expressément). Certes, par un effort de pensée, toute conscience droite peut admettre ce principe, principe que Jésus, dans un discours que l'on appelle la règle d'or, formule d'une manière unique car positive : FAIS A AUTRUI CE QUE TU VOUDRAIS QU'IL TE FASSE. Voilà la grande Révolution, voilà le moteur d'une histoire qui prend du sens. Et c'est au nom de cette règle d'or, et non pas en celui de principes idéologiques déconnectés de tout réel, que nous devons aide, secours, assistance, fraternité à tout être humain dans la détresse. Je ne connais pas d'autres moyens que de faire évoluer le monde vers plus de justice, et de fraternité (qui n'est pas la solidarité).
Voilà pourquoi je pense - et je ne l'ai pas toujours fait - que la Fête de la Musique qui vient de s'achever, et dont la paternité revient à Jack LANG, est une bonne initiative car elle permet de vraies rencontres. Il y des scories, et parmi celles-ci, la honteuse et démagogique initiative de madame BACHELOT qui a fait distribuer au frais du contribuable un million de préservatifs ? Certes ! Mais il y a aussi de très belles découvertes, des moments de communion fraternelle dans des musiques anciennes, exotiques, étranges, étrangères, modernes ; et tout ce qui fait converger l'humanité vers plus d'unité est bon.

vendredi 20 juin 2008

Relâche

Je m'absente jusqu'à dimanche soir. Reprise du Blog le lundi 22 juin.

jeudi 19 juin 2008

Une directive européenne sur l'expulsion des clandestins

Le Parlement européen a adopté à une large majorité (367 voix pour, 206 contre et 109 abstentions) une directive censée harmoniser les politiques européennes en matière d'expulsion des étrangers en situation irrégulière, ceux que l'on appelle les clandestins. Les belles consciences de gôôôôche (les verts, SOS racisme), et les associations de défense des droits de l'homme (Amnesty international, notamment) protestent, car cette directive porte à 18 mois maximum la durée de détention. Essayons d'y voir plus clair et avec objectivité.
D'abord, il s'agit d'une durée maximale. Et qui peut le plus peut le moins. En France cette durée est de 32 jours, et le ministre n'entend pas changer cette règle. Mais il faudra que la Grande-Bretagne et les Pays-Bas s'y mettent, chez qui cette durée de détention n'a pas de limite. Grosso modo, il s'agit donc d'une sorte d'amélioration.
Nous vivons en démocratie. Ce qui y règle les comportements dans l'espace public, c'est la loi. Il en résulte qu'une situation de non droit ne peut créer de droit. Il me semble que ce principe doit rester intangible. Mais il faut aussi que la loi et son esprit soit respectée par la puissance publique. C'est aussi un principe intangible.
Tout être humain a le devoir de vivre. C'est, selon moi, encore un autre principe intangible. On ne saurait donc accabler a priori ces pauvres diables qui ont réussi, au prix de mille périls, à traverser les océans, souvent sur des bateaux de fortune, qui ont perdu nombre de leurs compagnons pendant cet exode.
J'ai déjà eu l'occasion de dire qu'il n'y a pas de droits sans devoirs corrélatifs. Les défenseurs des droits de l'homme devraient donc rappeler à leurs protégés qu'ils sont accueillis dans un pays qui a des lois, et qu'ils ont le devoir de les respecter, quand bien même leur séjour est entaché d'une tare originelle. Nous ne pouvons accepter la polygamie, le trafic de drogue ou de faux papiers, les rapines, les violences et les arrogances de ceux que nous hébergeons momentanément. Ils doivent être considérés comme tous les citoyens de notre pays.
Il faut que les belles consciences de gôôôôche comprennent que l'on ne peut à la fois réclamer l'augmentation du pouvoir d'achat, l'accroissement des dépenses publiques improductives (l'Etat devait à la Sécu, aux dires de Philippe SEGUIN, un milliard d'euros au titre des soins gratuits dispensés aux clandestins), l'augmentation du nombre de fonctionnaires, le maintien de structures administratives coûteuses et vermoulues, et l'empilement de dispositifs sociaux qui aboutissent à créer de nouvelles structures, grandes dévoreuses de papiers, tatillonnes, et viscéralement méfiantes vis-à-vis des administrés. On peut toujours faire payer les riches. En France, les riches sont à l'heure actuelle les titulaires de hauts salaires. Ils sont des forces importantes pour entretenir la vigueur économique et l'innovation dans notre pays. Les autres riches, les vrais, ont fichu le camp depuis longtemps, avec la bienveillante complicité politique des socialistes et du Traité de Maastricht.
Alors que faire devant la détresse de ces pauvres gens qui croient trouver chez nous l'Eldorado, et ne rencontrent que mépris et misère ? Il me semble qu'il ne faut pas attendre 18 mois (directive votée) ni 12, ni 6. Il faut immédiatement renvoyer chez eux ces clandestins. Ceci n'est pas suffisant. Il faut aider beaucoup plus et beaucoup mieux les pays pauvres, les pays en voie de développement, les pays émergents, payer les matières premières à leurs producteurs directs, en évitant les spéculateurs, traders, courtiers, et autres intermédiaires qui ne sont que des parasites. Il faut aussi comprendre que les modes de développement de ces pays ne sont pas forcément les nôtres, adapter nos aides à leurs cultures, éviter d'y faire du tourisme à la mode du Club Méditerranée, y aller le coeur et l'intelligence ouverts, et savoir dépenser généreusement sans se faire avoir (ce qui n'est pas bon non plus). Bref, il y a toute une politique à reconsidérer, et qui passe aussi par l'éducation de nos concitoyens.
Et puis monsieur MAMERE, qui est maire de BEGLES pourrait peut-être demander à ses administrés de recevoir chez eux ces clandestins, il pourrait donner l'exemple lui-même ; il pourrait aussi construire un Foyer d'Accueil pour eux, et les embaucher comme employés municipaux dans des conditions qui autoriseraient leur régularisation. Mais entre l'action et les paroles verbales, il y a un pas que monsieur MAMERE hésite à franchir. A vrai dire, d'ailleurs, tous les élus socialistes, notamment dans les grandes villes (ils les administrent presque toutes) devraient en faire autant. Ils mettraient ainsi en accord leur discours et leurs actes.

mercredi 18 juin 2008

Le bout de l'oreille (d'Anne)

Madame Anne HIDALGO, candidate malheureuse aux élections municipales dans le XVe arrondissement, a déploré hier que Philippe GOUJON, député-maire UMP de cet arrondissement refuse d'organiser des cérémonies de signature de PACS et de parrainage civique à la mairie. Ce à quoi, non sans malice, le maire a répondu qu'il était un élu respectueux de la loi de monsieur JOSPIN qui prévoit que les PACS soient signés au tribunal d'instance. Toujours à la recherche de solutions démagogiques aux problèmes de société, le Conseil de Paris a adopté lundi un voeu du PS, demandant que l'ensemble des mairies d'arrondissement accueille des cérémonies de PACS et de parrainage civil.
Ces initiatives n'ont qu'un seul but : faire légaliser le mariage homosexuel, en commençant par donner à ce qui en tient lieu, le PACS, l'un des caractères symboliques du mariage normal et naturel. Nous devons de toutes nos forces nous opposer à cette proposition. Elle ne ferait qu'aggraver la situation de détresse de la majorité des homosexuels.
En effet, hier encore, lors de la journée que j'ai passée à TIBERIADE, une association qui accueille des sujets séropositifs, j'ai longuement discuté et accueilli les confidences de personnes homosexuelles. Aucune ne réclame le mariage ; toutes souffrent de leur situation qu'elles disent ne pas avoir choisie mais subie ; toutes reconnaissent le caractère compulsif de leurs habitudes sexuelles, et le caractère labile et changeant de leurs attachements : ceux-ci, disent-elles, ne durent qu'un moment ; toutes souffrent de leur solitude, mais aucune ne réclame le droit à l'adoption, bien que l'absence d'enfants soit une souffrance réelle. Enfin, en général, mais cependant non uniformément, nombre de mes interlocuteurs reconnaissent le caractère non-normal de l'homosexualité. Bref, les opinions de ces personnes sur leur état et leur orientation sexuelle me paraissent infiniment plus saines que les opinions de ces bateleurs de foire que sont les élus socialistes de Paris. Pourtant, il faut reconnaître à monsieur DELANOE plus de tact et de retenue qu'à madame HIDALGO.
Je vous renvoie à un billet intitulé "Le stigmate du socialisme". Une citation de Gustave THIBON y illustre bien le caractère essentiel de cette idéologie : la sanctification ou la canonisation de tous les comportements, pourvu qu'ils soient "sincères". Or, tous les comportements humains ne se valent pas, et s'il n'y a pas de mal absolu, il y a dans certains comportements une privation du bien, définition philosophique incontournable de ce que l'on appelle le mal (mal qui est autre chose que le Malin, l'Accusateur des frères, l'Homicide dès l'origine, mais qui résulte de l'emprise du Prince des Ténèbres sur le monde). Le socialisme veut changer l'homme en agissant sur son environnement culturel, social et politique. Pour faire quoi ?
Il faut avoir l'esprit tordu, malsain, troublé, il faut avoir un sacré goût du pouvoir, pour saper ainsi les fondements même de notre société, compromettre l'avenir de notre pays, et installer le désordre des moeurs au coeur de la loi, dans le seul but d'accéder à l'Imperium.
Je suis tout disposé à débattre de ce sujet avec madame HIDALGO, en me faisant accompagner le cas échéant de quelques uns de mes amis de TIBERIADE. Je crains très fort que le débat ne tourne à la confusion de cette dame qui a pointé le bout de l'oreille par son initiative intempestive. Ca ne lui coûte pas cher que de parler. Que ne va-t-elle à la rencontre de ceux qu'elle prétend défendre ? Car à la différence de madame HIDALGO, je respecte infiniment les homosexuels, je ne les juge pas (ni négativement - qui serais-je pour le faire ? ni positivement) - j'ai une profonde affection pour ceux d'entre eux qui m'ont honoré de leur confiance, je ne cherche pas à les faire changer, pas davantage à les convertir. Simplement à les écouter, à prendre en compte leurs souffrances et leur histoire.
Avant de faire des lois sous la pression de certains bobos, effectivement homosexuels, qui cherchent à se déculpabiliser par le moyen de la loi, il serait bon d'écouter ce que la majorité silencieuse d'entre eux dit de son état. Chiche ?

mardi 17 juin 2008

Contresens ou contre-vérité ?

Georges DUMEZIL est un de ces intellectuels qui font l'honneur de la pensée française. Spécialiste des langues du Caucase dont il a sauvé quelques unes de la disparition, c'est aussi et surtout le père de la théorie des trois fonctions qui a structuré les sociétés indo-européennes, des temps les plus anciens jusqu'à un passé relativement récent. Il a montré que les panthéons des sociétés indo-européennes étaient triples tout comme les sociétés et correspondaient aux différentes fonctions qui permettent à la société de se constituer et de survivre : la fonction religieuse, la fonction guerrière, et la fonction de production des biens agricoles et "industriels".
Il faut bien comprendre ce que signifie le mot "fonction". Il désigne l'ensemble des modalités selon lesquelles une structure fait face à une nécessité vitale. Les prêtres exerçaient la fonction de souveraineté magique et religieuse ; les guerriers, la fonction de défense de la communauté contre ses ennemis ; les paysans, laboureurs et artisans fournissaient à la communauté de quoi vivre matériellement. A ma connaissance, et je m'en étonnais (mais je n'ai pas tout lu de cet auteur, même si je possède dans ma bibliothèque la quasi totalité de ses oeuvres), DUMEZIL n'avait pas noté que les trois ordres qui structuraient la société française de l'Ancien Régime, Clergé, Noblesse, Tiers-Etat, correspondaient à ces trois fonctions. J'ai découvert avec surprise, dans un petit ouvrage très intéressant (Jean VARENNE. Zoroastre, le prophète de l'Iran. Editions Dervy, Paris, 2007. [page 19]), la première allusion à cette correspondance entre nos ordres et les très antiques habitudes indo-européennes.
Que le temps, l'usage, les déviations qu'imposent la nature humaine et ses appétits, aient défiguré ces ordres, et les aient fixés dans un système finalement injuste, nul ne peut en disconvenir. Car, en tout cas en France, à la fin du XVIIIe S., les responsabilités sociales de ces ordres n'étaient plus assurés par leurs membres, qui avaient remplacé dans leur esprit, l'égalité dans la diversité par une hiérarchie naturelle des mérites et des qualités fort discutable. Là, me semble-t-il, n'est pas le point. Qu'il eut fallu réformer, c'était l'évidence. Mais remplacer les ordres et les fonctions par les classes sociales, et instaurer une impitoyable lutte entre elles, comme si les fonctions devaient disparaître, est une aberration intellectuelle. Analyser l'histoire de l'Ancien Régime avec cette catégorie moderne revient à vouloir écraser une mouche avec un marteau-pilon, ou plus exactement un éléphant avec chasse-mouche, tant la structure des trois fonctions a marqué notre histoire et marque encore notre société. C'est un contresens ou une contre-vérité. Mais si papa MARX et ses admirateurs ont un moyen spécial pour supprimer l'armée, faire pousser les légumes sans agriculteurs, produire des voitures et des téléviseurs, des poteries et des chaussures sans artisans et sans ouvriers, qu'ils le disent. Quant aux prêtres qu'ils se sont acharnés à faire disparaître avec un certains succès, il me semble avoir été peu avantageusement remplacés par les voyantes, les cartomanciennes, les astrologues et les horoscopistes de tous poils. Car, au coeur de l'homme, demeure l'interrogation centrale du sens de la vie.
Je conclus : assumer ses responsabilités sociales, trouver un sens supérieur à son existence, et savoir se battre pour elle, la sienne propre et celle des autres, me semble être le début d'une vie bonne.

lundi 16 juin 2008

Sommes-nous aveugles ?

Un ami de Strasbourg me transmet le texte que voici. Il ne m'étonne guère. Mais il devrait nous ouvrir les yeux sur les faiblesses de la Déclarations des Droits de l'Homme qui a passé sous silence ses devoirs. Ci-dessous un exemple de la manière dont des fanatiques exploitent ces faiblesses :
Voici ce que vient de déclarer Mohamed Sabaoui, jeune sociologue de l'université catholique de Lille, d'origine algérienne, naturalisé français ; ceci est plus que prometteur...:
« Notre invasion pacifique au niveau européen n'est pas encore parvenue à son terme. Nous entendons agir dans tous les pays simultanément. Comme vous nous faites de plus en plus de place, il serait stupide de notre part de ne pas en profiter. Nous serons votre Cheval de Troie. Les Droits de l'homme dont vous vous réclamez, vous en êtes devenus les otages. Ainsi, par exemple, si vous deviez vous adresser à moi en Algérie, ou en Arabie Saoudite, comme je vous parle maintenant, vous seriez, dans le meilleur des cas, arrêtés sur-le-champ. Vous autres Français n'êtes pas en mesure d'imposer le respect à nos jeunes. Pourquoi respecteraient-ils un pays qui capitule devant eux ? On ne respecte que ce qu'on craint. Lorsque nous aurons le pouvoir, vous ne verrez plus un seul allogène mettre le feu à une voiture ou braquer un magasin... Les Arabes savent que la punition inexorable que mérite chez nous le voleur,c'est l'amputation d'une main ».
Et, toujours du même Mohamed Sabaoui lors d'une interview récente : " Les lois de votre République ne sont pas conformes à celles du Coran et ne doivent pas être imposées aux musulmans, qui ne peuvent être gouvernés que par la Charia. Nous allons donc œuvrer pour prendre ce pouvoir qui nous est dû. Nous allons commencer par Roubaix, qui est actuellement une ville musulmane à plus de 60 %. Lors des futures élections municipales, nous mobiliserons nos effectifs, et le prochain maire sera musulman. Après négociation avec l'État et la Région, nous déclarerons Roubaix enclave musulmane indépendante et nous imposerons la Charia (loi de Dieu) à l'ensemble des habitants."

"La minorité chrétienne aura le statut de Dhimmis. Ce sera une catégorie à part qui pourra racheter ses libertés et droits par un impôt spécial. En outre, nous ferons ce qu'il faut pour les amener par la persuasion dans notre giron. Des dizaines de milliers de Français ont déjà embrassé l'Islam de plein gré, pourquoi pas les chrétiens de Roubaix ? Actuellement à l'université de Lille, nous mettons sur pied des brigades de la foi, chargées de "convertir" les Roubaisiens récalcitrants, chrétiens, ou juifs,pour les faire rentrer dans notre religion, car c'est Dieu qui le veut ! Si nous sommes les plus forts, c'est que Dieu l'a voulu. Nous n'avons pas les contraintes de l'obligation chrétienne de porter assistance à l'orphelin, aux faibles et handicapés. Nous pouvons et devons, au contraire, les écraser s'ils constituent un obstacle, surtout si ce sont des infidèles."
Il ne s'agit pas de rodomontades. Il s'agit au contraire d'une pensée très structurée. J'aimerais que Nassim, l'un de mes contradicteurs récents (je refusais que l'on donne aux étrangers non communautaires le droit de vote aux élections locales) me donne son point de vue. J'ignorais l'existence de monsieur SABAOUI. Elle ne fait que renforcer, en bloc, mon opposition absolue aux imbécilités des bobos parisiens manoeuvrés par la gôôôche. Heureusement, très heureusement, le Saint Esprit est à l'oeuvre, et en Algérie même, dont monsieur SABAOUI est originaire, des centaines de ses anciens compatriotes rencontrent Jésus et le suivent. Semences de martyrs, sans aucun doute ; semence d'une Église qui renaît en des lieux où des fanatiques du genre de monsieur SABAOUI pensaient l'avoir fait disparaître.
Et nous, qui ne cessons d'apostasier, faudra-t-il en arriver aux situations envisagées par monsieur SABAOUI pour que nous ouvrions les yeux ? Évangélisons plutôt que de construire des mosquées. Et demandons au Recteur de l'Université Catholique de Lille de révoquer ce fou, dont on se demande comment il a pu être recruté comme enseignant et/ou comme chercheur. Mais il doit savoir, monsieur SABAOUI, que nous ne laisserons pas faire. Le Dieu d'amour est plus fort que son idole, car le dieu de monsieur SABAOUI n 'est pas le Dieu d'Abraham, c'en est une caricature. Mais ce Dieu d'amour n'a jamais exigé que nous devions accepter l'injustice et la violence. Il a même dit le contraire.
Sommes-nous aveugles pour accepter de tels propos ? Qu'en pense monsieur DELANOE si fier de la votation citoyenne de 35.000 parisiens sur le vote des étrangers ? Et madame ROYAL ? Et monsieur FILLON ? Et le Président de la République ? Monsieur SABAOUI devrait être déchu de sa nationalité française dont il n'est pas digne. Il devrait être renvoyé dans cette Algérie qu'il n'aurait jamais dû quitter. Qu'il se rassure, on ne lui couperait pas la main avant de le mettre dans l'avion.

dimanche 15 juin 2008

Je ne l'ai pas fait exprès...

Je vous jure qu'avant d'avoir acheté le livre qui donne l'extrait (que je vais commenter) d'un ouvrage de Simon LEYS, je ne le connaissais pas. Souffrez que je vous narre ma découverte ! Thierry WOLTON, un spécialiste réputé des relations internationales, a publié, en 2007, un livre intitulé Le grand bluff chinois (Robert Laffont, Paris). Le trouvant d'occasion, j'achète ce livre. Page 15 du dit ouvrage, une époustouflante citation de LEYS. Voici l'extrait que WOLTON approuve et reprend à son compte : Les idéologues occidentaux se servent de la Chine maoïste comme les philosophes du XVIIIe se servaient de la Chine confucéenne : c'est un mythe, une projection abstraite et idéale, une utopie qui permet de dénoncer tout ce qui va mal en Occident et d'en prendre le contre-pied en s'économisant la peine de penser soi-même. (Simon LEYS. Bâtons rompus. In Essais sur la Chine, Collection Bouquins. Robert Laffont, Paris, 1998).

L'étonnant de ce constat, c'est qu'il fait un lien explicite entre l'idéalisme des Lumières, la perte de contact avec le réel, les aberrations utopiques des grandes têtes pensantes qu'ont été les SARTRE, Roland BARTHES, Philippe SOLLERS, avec tant d'autres bonnes valeurs à la bourse des éditeurs parisiens, la dispense de la réflexion et de la pensée, et l'approbation ou l'ignorance des crimes les plus abominables de STALINE ou de MAO.

Je vous jure que je ne connaissais pas cet extrait. Maintenant, je me sens moins seul. Et en bonne compagnie. Car Simon LEYS est un des plus fins connaisseurs de la Chine qui soient. Il ne fait pas de bruit. Il ne s'étale pas dans les journaux télévisés, il ne se vautre pas dans les scandales. Il s'informe et il pense. Maintenant, vous comprenez peut-être pourquoi je m'acharne sur ce fatal XVIIIe S., et en relation avec ses errements intellectuels, pourquoi je ne cesse de dénoncer notre complicité avec les horreurs staliniennes et maoïstes, les méfaits de l'idéologie, pourquoi j'insiste sur la nécessité de partir des faits pour penser. J'exulte !

Je reviendrai sur le livre de WOLTON, dans le prolongement de ce que j'ai dit du livre du CAI CHONGGUO il y a quelques jours. Mais voici tout de même le plan de cet ouvrage admirablement documenté : La mise en condition ; le Bluff politique ; le Bluff économique ; le Bluff commercial ; le Bluff social ; le Bluff pacifique ; Un dragon de papier.

Allez ! Bon dimanche.

samedi 14 juin 2008

L'Europe en crise, vraiment ?

Après le rejet du Traité de Lisbonne par les Irlandais, les journaux écrits et parlés titrent avec un air de catastrophe : L'Europe en crise. Je crois qu'il n'en est rien et qu'il serait plus judicieux de dire : Une certaine idée de l'Europe en crise.
Pour comprendre ce que cela veut dire, il suffit de se rapporter à un passé récent ou relativement récent et de rapporter quelques faits. Les Norvégiens ont refusé, à deux reprises, d'adhérer à l'Europe ; les Irlandais ont refusé de voter la première mouture d'un traité qui instituait l'Union Européenne ; ils ne l'ont accepté qu'en deuxième lecture et après des modifications qui satisfaisaient certaines de leurs exigences ; les Danois n'ont pas intégré le système monétaire de l'Euro, pas plus que les Anglais ; les Français, puis les Néerlandais, ont refusé de voter le Traité Constitutionnel. Ça fait beaucoup de monde. Voilà qui aurait dû alerter les hommes politiques. Quand de nombreuses nations regimbent à rentrer dans un système sorti tout droit du cerveau de fonctionnaires irresponsables, non élus, anonymes (car ce sont eux qui mettent en musique juridique les conclusions des politiques, complètement débordés par le sujet), il faut s'interroger et se demander pourquoi.
Dans le cas des Irlandais, la chose est simple. Cette nation a failli disparaître. Elle a conquis chèrement sa liberté sur les Anglais qui l'avaient colonisée, et qui avaient réduit à la pauvreté et à l'esclavage, avec une brutalité inouïe (on séparait les enfants de leurs parents, par exemple) sa population. On comprend qu'ils se méfient de tout ce qui pourrait attenter à une identité si malmenée par l'histoire. Pour les Français, il en va de même. On ne réduit pas la plus anciennement constituée des nations européennes à un strapontin de Commissaire aux Transports, octroyé du bout des lèvres par un Président qui parle à peine notre langue. On ne joue pas avec l'histoire et avec le sentiment d'appartenance. Je reconnais la grandeur de la nation portugaise, son goût des aventures maritimes, son courage antique. Mais enfin monsieur BARROSO n'aurait pas dû nous offenser ainsi.
Il faut bien comprendre que les peuples n'acceptent pas de se voir régenter par une cohorte de plumitifs bruxellois, qui entendent nous imposer la largeur des pneus, le diamètre des pommes, l'étiquetage de nos produits alimentaires, et leur composition (ah ! l'histoire du chocolat !), et jusqu'à nos moeurs mêmes, et qui sournoisement nous imposent une langue unique, l'anglais, langue admirable certes, mais qui n'est pas la nôtre ni, souvent, celle des rebelles (quand bien même, je dois l'avouer, par métier, j'ai dû la pratiquer, et je l'écris et la lis tout comme le français).
D'où vient cette erreur de perspective ? Hélas je crains qu'elle ne vienne de nos propres philosophes des Lumières, et de leur système de pensée, qui s'est imposé quand la France et sa langue dominaient l'Europe. C'est un juste retour de bâton que d'être puni par où l'on a péché.
Je vous ai dit que le mal avait commencé de prendre racine sous la Régence avec les décisions cyniques et injustes du Régent. Voici un exemple qui vous illustrera ce que je veux dire : DUCLOS, dans ses mémoires secrets dit ceci. L'amour de ma patrie ne me rendra pas partial, ni me fera trahir la vérité ; mais je rendrai service à une province [ndt : la Bretagne] noblement attachée au Roi, et qui réclamait contre la violation de ses privilèges. Les peuples les plus jaloux de leurs droits sont les plus attachés à leurs devoirs ; et le mécontentement des Bretons était fondé dans son origine. Les États [sous-entendu : de Bretagne] voulaient faire rendre compte à MONTARAN, leur trésorier : rien n'était plus juste, et n'intéressait moins l'Etat : le Régent devait, au contraire, approuver une conduite si régulière. Malheureusement pour la Province, MONTARAN avait un frère capitaine aux gardes, gros joueur et fort répandu. Un tel sujet est homme intéressant à PARIS. Il employa le crédit de plusieurs femmes, qui prouvèrent clairement qu'on devait beaucoup d'égards au frère d'un homme si utile à la société ; et les États eurent le démenti de leur entreprise. On embastilla les gentilshommes bretons, on envoya à NANTES une commission pour instruire le procès des accusés. Et le Régent poursuivit sa vie de débauche à PARIS.
Il y a là exactement les mêmes ingrédients que ceux dont nous discutons ici. Remplacez PARIS par BRUXELLES, transposez Trésorier des États à Haut Fonctionnaire, accointances familiales à complicités d'affaires, pressions de ces dames à pression des lobbies, et vous aurez la même structure politique. Pour notre malheur, le Régent était du parti des Philosophes, et les Bretons furent réduits a quia, ce que n'aurait JAMAIS fait un Roi. Le même DUCLOS l'explique et j'y reviendrai dans un prochain billet.
Comme quoi, l'histoire est un éternel recommencement. L'Europe n'est pas en crise. C'est leur idée bruxelloise qui l'est. Le Général avait raison, une fois de plus. Que n'est-il là pour remettre sur la bonne voie le bateau ivre ? Car l'Europe existe, et elle a une vocation historique. Ce qui la construit, c'est une immense diversité, une culture très riche, une histoire mouvementée mais qui fait converger ses peuples vers l'entente et la concorde.
Plutôt que de nous imposer l'anglais, la Commission devrait suggérer que tout locuteur d'une langue latine possédât une langue anglo-saxonne et une autre langue (latine ou slave), que tout locuteur anglo-saxon en fît de même (une autre langue anglo-saxonne, et une langue latine ou slave), que tout locuteur d'une langue slave utilisât une autre langue slave et une langue latine ou anglo-saxonne. Voilà qui permettrait un début d'inter-compréhension, et non point l'unification de la pensée et la rentrée dans une indifférenciation culturelle grosse de violences. (J'y reviendrai avec René GIRARD).

vendredi 13 juin 2008

Le bon sens de soeur Emmanuelle

Soeur Emmanuelle (il est inutile de la présenter) va avoir bientôt cent ans (le 16 novembre). Elle a la tête sur les épaules, et elle dit tout crûment un certain nombre de vérités au journaliste de Métro qui l'interroge aujourd'hui. Excellent article au demeurant. J'en critiquerai simplement le chapeau ; on y déclare que soeur Emmanuelle a consacré sa vie à aider les plus démunis. Non, soeur Emmanuelle a consacré sa vie à aider les pauvres.
A la question que je résume et qui porte sur l'immigration, soeur Emmanuelle répond ceci (et, sans me vanter, je ne cesse de dire la même chose dans les billets que je consacre à cette question) :
Tant que l'on aura pas compris qu'il faut aider les populations à s'en sortir, on n'évitera jamais qu'une horde d'homme affamés cherchent à survivre dans les pays riches. Au lieu de mettre un barrage pour qu'ils n'entrent pas, de repousser les immigrés qui ont fait le voyage, il faut les aider chez eux à se développer par tous les moyens. C'est absurde, en France on donne de l'argent aux paysans pour qu'ils vendent moins cher, mais cela ruine l'agriculture du tiers-monde. Il faut arrêter de se mettre un bandeau sur les yeux.
C'est l'évidence même. Je n'ai jamais cessé de dire que pour lutter contre la pauvreté des pays du tiers monde, il faut payer leurs produits au prix où nous exigerions, nous, qu'ils le fussent si nous en étions les producteurs. Ceci revient à dire que nous devons accepter de payer le café, le cacao, ou les matières première à un prix raisonnable, en jugulant la spéculation des intermédiaires ; ils se payent grassement en ne faisant que téléphoner leurs ordres d'achat, et sans jamais voir la marchandise qu'ils achètent et revendent. Est-ce vraiment cela, travailler ? La vie augmenterait ? Peut-être, mais pas sûr, et l'on épuiserait moins vite les ressources de la planète, on limiterait l'afflux de miséreux qui cherchent à survivre (et c'est leur devoir) et le développement de la violence et du crime dans les pays qui les voient affluer car ceux-ci ne font rien pour enrichir les pays d'où ils viennent.
A la question : "Vous dites souvent que le développement, ce n'est pas l'assistanat..", soeur Emmanuelle répond
L'assistanat, c'est horrible. Je suis tombée dans le panneau la première fois que j'ai travaillé avec les chiffoniers du CAIRE. J'allais tous les sortir de là ! Quelle erreur... Il fallait d'abord écouter leurs souffrances et leurs désirs. Maintenant, mon association les aide sur un pied d'égalité. Nous, Européens, nous ne sommes pas supérieurs aux autres. Dans chaque pays pauvre, il y a des trésors, des forces, des envies. Dès qu'on leur tend la main, qu'on marche ensemble, en cordée, en respectant les identités, on obtient des résultats extraordinaires.
Ce qui me paraît tout à fait intéressant dans ces propos, c'est que soeur Emmanuelle parle d'identité, et en reconnaît l'importance. Ce qui est vrai pour les chiffonniers du CAIRE me semble être vrai aussi pour les Français : nous avons aussi une identité, et nous ne pouvons ni la renier, ni la tordre. C'est pourquoi soeur Emmanuelle ne renierait sans doute pas ce que Henri HUDE appelle le droit naturel à la nation. Elle insiste aussi sur la coresponsabilité, sans laquelle il n'y a aucun respect de la nature humaine. Transposons chez nous ! Et voyons comment la multiplication des prestations sociales de tous ordres, des administrations chargées de les dispenser, des paperasseries qui les accompagnent, réduisent nombre de nos concitoyens à n'être que des spectateurs de leurs vie, alors que nous devrions en faire des acteurs
Dans les petits commentaires qu'elle fait de l'actualité, tous plus savoureux et humains les uns que les autres, s'appuyant sur cette notion d'identité et de tradition, elle dit à propos du mariage annulé pour cause de mensonge sur la virginité de la mariée :
Cette affaire de mariage annulé a fait grand bruit parce qu'on ne connaît pas l'Islam. Dans les pays musulmans, c'est impossible d'imaginer épouser une fille qui n'est pas vierge. [...] Ce que le tribunal français a entériné, c'est simplement qu'un mariage est valide si l'on ne cache rien à l'autre. Sur le fond, cette histoire ne me choque pas, parce que j'ai vécu longtemps en pays d'Islam. Bien sûr, cela révèle une inégalité de traitement entre les hommes et les femmes. (Et soeur Emmanuelle commente je ne dis pas que je l'approuve)
On ne peut pas refuser un tel témoignage. Et il m'apparaît évident que le marié n'aurait pas contracté mariage s'il avait su que sa future avait eu des relations sexuelles avec un ou des autres hommes. Là est le point. Et les juges ont eu raison de prendre en compte cet aspect des choses. La critique qui leur est faite est assez cocasse quand on connaît de quels cercles de pensée elle émane, cercles qui font de la liberté individuelle la clé de voûte de tout comportement humain. Pourquoi faudrait-il enchaîner celle-ci, au motif qu'on juge qualité inessentielle, secondaire, ringarde, antique, la virginité pré-conjugale. Ce que l'on pourrait exiger de l'homme, c'est qu'il en aille de même, et qu'un mensonge à sa future sur ce point, s'il était prouvé, pût entraîner l'annulation pour les mêmes motifs.

jeudi 12 juin 2008

Bien commun et intérêts particuliers : un cas d'école

Un ami alsacien m'envoie un dossier très complet sur une initiative qui risque de dégrader pour près de deux siècles (au minimum) un des plus jolis endroits de l'Alsace bossue.
Et l'on va voir comment, en France en particulier, en Europe en général, une administration arrogante, toute puissante, anonyme et irresponsable vient combiner ses méfaits à ceux des grandes entreprises cotées en bourse, arrogantes, toutes puissantes, anonymes et tout aussi irresponsables.
Dans la vallée de l'ISCH, 95 ha de terres agricoles d'un seul tenant (le Schwabenhof), représentant 15 % du ban agricole du village de HIRSCHLAND, sont convoités par la société Villiers Service, installée à VILLERS-COTTERET dans l'Aisne. Cette société emploie huit personnes. Curieux pour une société qui entend obtenir une concession de 80 ans pour entreposer au bas mot 120.000 T déchets ultimes par an, véhiculés par 6.000 camions. On peut imaginer que la dite société a obtenue des garanties quant à l'obtention de cette concession. En fouillant un peu le dossier, on apprend que Villiers Service agit pour le compte de la COVED, du groupe SAUR, N°3 du déchet en France et filiale d'Axa et DE LA CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATION [CDC] (celle-ci détenant 47 % du capital de SAUR). Ainsi, on risque d'appauvrir, avec le bienveillant concours de la CDC, (un organisme d'Etat, qui est le bien commun de tous les Français), les agriculteurs des 7 villages qui sont situés à moins de 4 km du Schwabenhof, par une décharge qui surplombe deux sources, des terrains humides, un petit cours d'eau répondant au nom charmant de Langenbitzengraben, par une décharge imbécile située à moins de 300 m d'une aire de repos (le Katzenkopf, joli mot pour dire Tête de chat) de l'autoroute A4. Quand on saura, de plus, que le site serait implanté sur un terrain calcaire fissuré, qu'une décharge existe déjà à moins de 4 km (décharge d'ESCHWILLER) qui laisse fuir 3966 m3 de lixiviats par an (ces liquides qui s'écoulent des décharges après avoir traversé la couche de déchets, et qui se chargent surtout de métaux lourds) dont seulement 2739 m3 sont pompées, et qui dégage 1.056.000 m3 de gaz par an (elle doit fermer en 2009), on mesure la bêtise des décideurs, l'égoïsme de quelques intérêts particuliers, et l'injustice du monstre froid qu'est devenu l'Etat et l'administration. Ils peuvent toujours nous dire que toutes les précautions sont prises ; il n'en est rien ; personne en ce domaine ne peut dire si le plastique isolant (qui ne fait que 2 mm d'épaisseur) et qui est percé de trous (reconnu par une norme qui en fixe le nombre maximum admissible par m2 !) résistera pendant les deux siècles nécessaires à la transformation totale du dépôt en matière inerte, sans parler d'une couche de roches supposées être imperméables.
Il faut convenir que nous fabriquons beaucoup de déchets. Mais il serait sans doute possible d'en restreindre la production en imposant des normes pour l'empaquetage des produits : est-il normal que celui-ci soit trois ou quatre fois plus lourd que le produit qu'il est censé protéger ? est-il acceptable que cet empaquetage soit fait de matières premières coûteuses en énergie, toxiques, ou toxigènes ? Il faut que nous modifions nos comportements, et cela de bon gré, avant que les événements ne nous contraignent à les transformer brutalement et de force. Et puis nous devons dénoncer cette collusion des administrations avec les puissances d'argent, car ni AXA, ni la CDC ne sont, me semble-t-il, des entreprises industrielles, mais des banques ou des entreprises de finances.
J'aurai l'occasion de vous montrer comment cette tyrannie de l'Etat a fait son apparition au XVIIIe S., avec les décisions iniques qu'a prises le Régent et qui bafouaient la liberté des corps intermédiaires. Nous ne faisons qu'appliquer les théories des philosophes des Lumières, Jean-Jacques en tête.

mercredi 11 juin 2008

Les historiens d'hier ; les historiens d'aujourd'hui

Voici comment Henri de VALENCIENNES commence son ouvrage intitulé Continuation de l'Histoire de Ville-hardouin. On comparera, en s'amusant, avec la manière dont un grand historien contemporain considère son travail.
Moi, Henri de Valenciennes, suis d'avis que lorsque quelqu'un s'entremet de bien dire et de raconter, et qu'il a pour cela les talents et qualités nécessaires, doit travailler à rechercher sur toutes les choses la pleine vérité. Aussi veux-je dire et traiter ce dont j'ai été témoin, et que je peux garantir, etc.
Henri de VALENCIENNES ne prétend pas écrire l'Histoire, ni l'interpréter, ni en donner le sens. Il désire raconter ce qu'il a vu. Certes, il lui manque la méthode scientifique, et surtout le recul. Mais du moins fait-il l'effort de rester près des faits, et l'on chercherait avec peine des passages où il exprime son propre sentiment ou un début d'interprétation de ce qu'il a vu.
Voyons maintenant comment Jacques LE GOFF, dans son ouvrage Civilisation de l'Occident médiéval intitule les chapitres successifs de son ouvrage (plan cité, commenté, et heureusement ridiculisé par Jacques HEERS ; cf. mon billet d'hier) : La lutte des classes en milieu rural ; La lutte des classes : société urbaine et société féodale ; La femme dans la lutte des classes (sic !) ; Rivalités à l'intérieur des classes ; L'Église et la Royauté dans la lutte des classes.
Pour faire de l'histoire, monsieur LE GOFF ne s'est point appuyé sur son sens critique, ses connaissances, l'analyse objective des documents de l'époque et DE CE QU'ILS DISENT DE CELLE-CI (ce qui est le B.A. BA de la méthode historique scientifique). Non. Monsieur LE GOFF, armé du Capital de papa MARX, s'est échiné à faire rentrer ceux-ci dans la grille qui explique tout sans rien démontrer : celle de la lutte des classes. C'est une absurdité, à l'évidence, et qui montre comment fonctionne l'idéologie. On a des faits, on les trie, et on les fait rentrer dans son système. Tant pis s'il quelquefois il faut les forcer, les égratigner, les tordre. IL FAUT QU'ILS Y RENTRENT.
On est loin de ce qu'écrit Luc au début de son Évangile et que je vous rapporte pour terminer : Puisque beaucoup ont entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous, tels que nous les ont transmis ceux qui furent dès le début témoins oculaires et serviteurs de la Parole, j'ai décidé, moi aussi, après m'être informé soigneusement de tout depuis les origines d'en écrire pour toi l'exposé suivi, illustre Théophile, afin que tu te rendes compte de la solidité des enseignements que tu as reçus.
Luc s'informe. Il n'est pas témoin oculaire (monsieur LE GOFF non plus, mais on ne peut lui en vouloir), il fait un récit suivi (monsieur LE GOFF aussi), il s'informe soigneusement de tout depuis les origines (monsieur LE GOFF puise dans MARX et ses continuateurs les instruments de tri et d'analyse ; son histoire est un conte accomodé à la sauce moderne).
On appréciera la différence.

mardi 10 juin 2008

Mensonge d'état et tyrannie ! Non à l'histoire officielle

Lisez, je vous en supplie, un ouvrage très remarquable, qui nous explique, comment depuis Jules FERRY l'histoire est la principale arme d'assaut de la propagande d'état. Par les manuels et les leçons, l'école républicaine n'a cessé de truquer et de tronquer ce que l'honnête citoyen pouvait écrire. La mise en condition et le "formatage" du citoyen se poursuivent tout au long de sa vie par le commun des journaux.[...] De tout temps, l'Etat veut, en France, soumettre la démarche historique à une étroite surveillance et laisse de moins en moins de libertés aux centres de recherche qui n'ont même plus le loisir de choisir en toute indépendance leurs sujets d'enquête et leurs programmes. (Quatrième de couverture de l'ouvrage en question).
Je ne cesse, depuis que j'ai ouvert ce Blog dont le succès me semble, hélas, très limité, de traquer quelques uns des mensonges les plus criants, répandus par l'histoire officielle. Mais je ne suis pas historien. C'est pourquoi il est bon qu'un spécialiste de l'histoire, un professionnel de la recherche historique, dénonce, preuves, documents, sources, à l'appui, comment l'histoire a été confisquée par la République, pour le plus grand profit de certains courants de pensée, essentiellement anticléricaux, antichrétiens, libertins, et de gôôôôôche.
Jacques HEERS écrit ceci :
Seul, un État capable de faire accepter toutes manières de terrorisme intellectuel peut interdire les déviances politiques et prendre complètement en charge l'étude du passé. Ses agents préposés à la culture refont l'Histoire, détruisent ou brûlent ce qui a été construit avant eux, rayent les noms de héros déchus dans les manuels d'enseignement, les livres et les journaux. Bien évidemment, ils interdisent d'entreprendre des recherches hors du cadre d'instituts surveillés, où les historiens, toujours menacés d'un contrôle et de suppression des crédits, ne sont assurés de rien. [...]
Les murs de la honte sont tombés à l'Est. Où en sommes-nous dans nos démocraties occidentales, plus particulièrement en France, pays de la Liberté haut proclamée et d'une cinquième République affirmée modèle ? Le terrorisme intellectuel, dénoncé depuis une dizaine d'années, s'applique aux enquêtes, à toutes les formes d'investigation et à chaque discours livré au commun des citoyens. L'Histoire n'est pas à l'abri, tout au contraire.
J'ai déjà eu l'occasion de dénoncer les mensonges d'Etat (a) sur l'absence d'écoles sous l'ancien régime, (b) sur le rôle déterminant du clergé et des évêques d'avant la Révolution dans les innovations sociales dont AUCUNE, sauf les congés payés, n'a été inventée par la République, (c) sur les horreurs des guerres de Vendée où l'on a brûlé vif dans des fours, aux grands rires des soudards, des femmes et des enfants "pour faire cuire le pain de la République". (d) Sur Marie-Antoinette. Jacques HEERS multiplie les exemples, prouve combien l'introduction de l'économisme marxiste dans l'histoire rend impossible la compréhension de notre passé, dénonce l'imposture et le ridicule de certains Maîtres qui n'ont cherché que l'intérêt de leur carrière en suivant le sens des vents politiques.
Je dis non, non et non à l'histoire officielle, aux mensonges d'Etat, au Ministère de la Culture, aux Commissions du CNRS, ou de l'INSERM, aux manifestations culturelles des cultureux, à tous ces carcans qu'impose une administration impotente et inculte, à la vie intellectuelle. Si vous êtes d'accord, dites-le.
Référence du Livre.
Jacques HEERS.
L'Histoire assassinée. Les pièges de la mémoire.
Éditions de Paris, Versailles, 2006.

lundi 9 juin 2008

L'entendement et la volonté

Immense PASCAL que son génie même a fait enfermer par les médiocres puissants du siècle présent, dans les oubliettes de la ringardise ! Mais il ne suffit que de le lire pour être convaincu de la justesse de ses pensées. En voilà une qui explique la différence entre entendement et volonté, entre réalisme et idéalisme, entre vérité et système.
Personne n'ignore qu'il y a deux entrées par où les opinions s'insinuent dans l'âme, qui sont ces deux principales puissances : l'entendement et la volonté. La plus naturelle est celle de l'entendement ; car on ne devrait jamais consentir qu'aux vérités démontrées : mais la plus ordinaire, quoique contre la nature, est celle de la volonté ; car tout ce qu'il y a d'hommes, sont presque toujours emportés à croire, non pas par la preuve, mais par l'agrément. Cette voie est basse, indigne et étrangère : aussi tout le monde la désavoue. Chacun fait profession de ne croire, et même de n'aimer que ce qu'il sait le mériter.[...) Ces puissances ont chacune leurs principes et les premiers moteurs de leurs actions.
Ceux de l'esprit sont des vérités naturelles et connues à tout le monde, comme le tout est plus grand que sa partie, outre plusieurs axiomes particuliers, que les uns reçoivent, et non pas d'autres ; mais qui, dès qu'ils sont admis, sont aussi puissants, quoique faux, pour emporter la croyance, que les plus véritables.
Le propre des idéologies actuelles qui toutes portent un nom se terminant en ISME est de feindre, ou de convaincre, qu'elles sont fondées sur l'entendement alors qu'elles le sont sur la volonté (puissance qui nous fait agir), et d'admettre comme des axiomes évidents, des intuitions ou des idées dont la seule justification est de s'accorder à la volonté, entendue comme puissance d'action en vue de la satisfaction d'un désir.
Ceux de la volonté sont de certains désirs naturels et communs à tous les hommes, comme le désir d'être heureux, que personne ne peut ne pas avoir, outre plusieurs objets particuliers que chacun suit pour y arriver et qui ayant la force de nous plaire, sont aussi forts, quoique pernicieux en effet, pour faire agir la volonté, que s'ils faisaient son véritable bonheur.[...] Les principes du plaisir se sont pas fermes et stables. Ils sont divers en tous les hommes, et variables en chaque particulier, avec une telle diversité, qu'il n'y a point d'homme plus différent d'un autre que soi-même, dans les divers temps.
PASCAL expliquera dans la suite de ce texte, en un paragraphe consacré à L'Art de persuader (qui, dit-il, n'est proprement que la conduites des preuves méthodiques et parfaites) que la persuasion passe par trois parties essentielles : expliquer les termes dont on doit se servir, par des définitions claires ; proposer des axiomes ou principes évidents, pour prouver les choses dont il s'agit ; substituer toujours mentalement dans la démonstration, les définitions à la place des définis.
Le propre des idéologies actuelles est d'utiliser des mots entendus différemment par les interlocuteurs politiques, économiques, par les acteurs sociaux, en faisant semblant de croire qu'ils s'accordent tous sur leurs définitions : ainsi en est-il du mot LIBÉRALISME, ou du mot SOCIALISME (il serait malhonnête de ne pas souligner les erreurs, insinuations infondées, imputations irresponsables que font les ennemis de ce système. Mais l'un des grands problèmes du socialisme, et des socialistes est qu'ils entendent bien des choses différentes derrière ce mot. ils l'utilisent cependant, tous, sans ignorer la duperie et en écartant ainsi les problèmes de fond. L'une des grands contradiction du libéralisme et des libéraux est de confondre liberté d'entreprendre et liberté de ruiner les pauvres ou les faibles par la spéculation financière).
Dans ce texte extraordinaire, PASCAL a pressenti HABERMAS et René GIRARD, et l'on peut dire qu'il a précédé DESCARTES sans tomber dans l'idéalisme ou le rationalisme. Il substitue à la raison cartésienne, le raisonnement méthodique. C'est mieux.
Dans l'état où se trouve notre patrie, ne se trouvera-t-il point d'hommes pour admettre ces vérités si simples énoncées dans les trois principes de l'Art de persuader ? Faudra-t-il que le goût du pouvoir passe avant celui du bien commun, que le service de ses idées, passe avant la soumission à l'évidence ?

dimanche 8 juin 2008

Le galet et la racine

Dans un très remarquable livre sur la Chine dont j'ai déjà parlé dans un billet, Simon LEYS écrit ceci qui mérite d'être relevé :
Dans la nausée de SARTRE - bon échantillon de la conscience occidentale, dans sa forme la plus étroite - il y a deux objets dont la vue suscite chez Roquentin un sentiment d'absurdité existentielle tel, qu'il aboutit physiquement à la nausée : un galet poli par les vagues, et une racine noueuse. Il est intéressant de noter que ce sont là précisément deux types d'objets assidûment recherché par les collectionneurs chinois, car mieux parfois que des oeuvres d'art fameuses, ils pouvaient plonger les esthètes en extase.
Il faut avoir l'esprit bien tordu, et une esthétique relevant d'un système préformé, il faut avoir une imagination échevelée mais morbide, pour imaginer le héros de SARTRE. Qui n'a jamais VRAIMENT rêvé, comme les collectionneurs chinois, devant la racine d'un arbre abattu par la tempête ? Qui n'a pas plongé en esprit, à la vue d'un galet, dans ces moments immémoriaux où la terre en gésine donnait naissance aux roches et à l'océan qui les polirait ? Il faut avoir une perversion du goût incroyable pour faire de ROQUENTIN un modèle. Il faut faire violence à ses émotions. Dans cinquante ans, on en sourira, (comme on se posera de sérieuses questions sur le nouveau roman qui relève du même esprit de système). Comme si la beauté ne résultait pas d'un accord subtil et secret entre la nature et l'homme, fruit d'un long commerce, d'une longue patience, et d'une active sympathie ?
On en revient toujours à ce que je disais hier dans mon billet : ce prurit de nouveautés qui reposent sur les nuages des idées, au lieu de s'émouvoir au contact du réel et des sentiments qu'il suscite en nous, pousse l'occident dans une impasse dont il ne sortira que par sa conversion (un retour à ses racines) ou par sa disparition.

samedi 7 juin 2008

Une très ancienne prophétie

Je ne vous dirai pas qui a écrit, il y a près de 2000 ans cette prophétie faite pour notre siècle. Un temps viendra où l'on ne supportera plus l'enseignement solide ; mais au gré de leurs caprices, les gens iront chercher une foule de maîtres pour calmer leur démangeaison d'entendre du nouveau.
Il me semble que ces temps, inaugurés sous les Lumières, sont définitivement advenus. Nous faisons fi de notre histoire, de notre culture, de ce qui nous a constitués, et nous nous ruons vers les dernières nouveautés. Ce prurit de nouveauté s'appuie certes sur un trait constant de la nature humaine, inquiète de trouver des réponses à des questions sur la vie et la mort, et avec elles, la paix qui est censée les accompagner. Mais il est aussi devenu le moteur de notre civilisation marchande qui a besoin, pour honorer l'appétit croissant des gens de la finance, de produire des biens affectés dès le départ d'un coefficient d'obsolescence, de façon à pouvoir inonder le marché, de manière continue, d'objets, d'idées, de modes nouveaux qui tous sont destinés à périr dans l'intention délibérée de leurs concepteurs. Le nouveau, en quelque sorte, est devenu un moyen de faire de l'argent. L'idéologie du progrès a été dévoyée, et ce dévoiement était inscrit dans sa structure même.
Il y a de grandes conséquences à cette manière de vivre : tout d'abord, nous avons du mal à faire des projets et à nous situer dans le temps historique, avec un passé, un présent, un avenir. Nous vivons dans l'instant. Ensuite et en conséquence, nous perdons nos repères culturels ; nous ne les comprenons plus ; nous ne voyons plus comment ils nous ont formés ; et nous en venons à les rejeter pour aller nous ne savons où. Mais il n'y a pas de bons vents pour celui qui ne sait pas où il veut aller, et qui ne sait pas d'où il vient. C'est une des causes de l'actuelle désorientation de la jeunesse. Elle me désole. Il me semble entr'apercevoir des solutions efficaces ; elles requéraient un accord unanime de tous les acteurs sociaux pour être mise en oeuvre. Hélas, HEGEL et MARX ont fait leur oeuvre, et l'on a crucifié JÉSUS une deuxième fois.
Ce qui motive ces acteurs, et l'on ne peut leur en vouloir, c'est la recherche de la notoriété, du pouvoir, de l'efficacité, conditions de leur survie - et qui de nous veut mourir ? - ce n'est pas celle de la vérité, dont il pense qu'elle les tuerait (Guy BEART l'a bien chanté : Ce jeune homme a dit la Vérité, il doit être exécuté) alors qu'en réalité, elle les ferait vivre, elle nous ferait vivre.
Je ne vois plus qu'une issue ; vivre en fonction d'une vérité inlassablement recherchée en espérant qu'elle fera tache d'huile par la vertu de l'exemple.
Tout ce qui est nouveau n'est pas forcément un progrès. Il faudrait trier. Difficile quand la vie intellectuelle se résout à un combat d'écoles, de systèmes, d'idée, et non à un examen contradictoire, bienveillant, objectif des faits, des solutions possibles et de leurs possibles conséquences, par les élites, les responsables politiques, les acteurs industriels, commerciaux et financiers et bien entendu, les citoyens. On peut toujours rêver.

vendredi 6 juin 2008

Ils continuent... Ils sont décidément minables !

Le chômage est au plus bas depuis 25 ans. Les chiffres sont incontestables, aux dires mêmes de monsieur SAPIN qui donne au journal Métro une lecture toute personnelle de l'événement. Comme monsieur SAPIN n'est pas tout à fait idiot, il ne peut en effet contester le fait. Ce qui est intéressant c'est qu'il en conteste l'analyse, et il ajoute : Cette baisse n'est pas la conséquence des mesures prises par le gouvernement, c'est une baisse mécanique que notre homme attribue à la diminution de la population active. Plusieurs remarques : (a) il est possible et même vraisemblable, qu'une partie de cette amélioration soit de nature mécanique ; on en conclut que le nombre des retraités augmente et que celui des actifs diminue, qu'il faudra bien verser des pensions à ce nombre accru de retraités, et que par conséquent la question de leur financement se pose et doit trouver une issue soit par l'allongement de la durée des cotisations, soit par une diminution des prestations, soit par une augmentation du taux des cotisations. Incidemment, la diminution du nombre des actifs a été freiné grâce aux mesures édictées il y a quelques années par monsieur FILLON sur la durée des cotisations. Les chiffres eûssent encore été meilleurs, mais le coût social augmenté si ces mesures n'avaient pas été prises. (b) Il est certain que monsieur SAPIN aurait attribué à la politique gouvernementale une éventuelle augmentation du chômage : pourquoi faut-il qu'au nom d'une idéologie verbeuse et inefficace, il impute le mieux de la croissance et du chômage à d'autres facteurs que les décisions politiques prises récemment, alors qu'il les eût mis à charge du gouvernement si croissance et chômage s'étaient détériorés ? N'est-ce pas là la plus pure manifestation de l'esprit de système qui nous fait tant de mal ? (c) Monsieur SAPIN revient sur le paquet fiscal dont il déclare sans ciller qu'il a creusé le déficit de 6 milliards d'euros, sans voir, par exemple, qu'en accélérant le mouvement d'achat de maisons ou d'appartements, grâce à la déduction des intérêts d'emprunt, il a probablement donné des centaines de milliers d'heures de travail à des artisans et à leurs ouvriers. Toujours cette fameuse insinuation selon laquelle ledit paquet était fait pour les riches, alors que 80 % de ses allègements profitent aux ménages des classes moyennes. C'est un mensonge, un gros mensonge de plus, dont il ne faut pas accabler monsieur SAPIN, persuadé que c'est dans la dérégulation de l'immigration, la régularisation des sans papiers, l'augmentation du volume des prestations sociales, une diminution du temps de travail, l'envolée des dépenses improductives, que l'on trouvera les moyens d'augmenter le pouvoir d'achat des salariés.
Je n'en vois qu'un moi, de moyen, c'est d'augmenter la masse des richesses à répartir, en reconnaissant de manière corrélative que la valorisation des entreprises est due (a) aux risques industriels pris par les investisseurs (et j'aimerais qu'ils soient des personnes privées plutôt que des fonds de pension, des banques, ou des prédateurs), (b) au travail de tous les salariés de l'entreprise. Il serait donc juste que les bénéfices industriels et commerciaux se répartissent tous les ans - une fois payé l'impôt - en trois portions d'égale importance, l'une pour rétribuer le risque industriel pris par les actionnaires, l'autre pour les salariés de l'entreprise, le troisième pour assurer les investissements futurs. Voilà qui enlèverait bien des arguments à papa MARX, voilà qui serait moralement juste et économiquement sain. Enfin, il est indispensable de lutter contre le capitalisme financier. Il faut des fonds pour construire des usines et fabriquer des produits innovants ; il ne faut que du culot pour s'enrichir sur le dos des autres à coup de stock-options, de produits dérivés, d'achats à terme, de spéculation sur les matières premières par la raréfaction volontaire de l'offre. Nos politiques ont là du travail, et la besogne est plus utile que celle qui consiste à s'offusquer de la décision d'un juge sur un mariage manifestement nul, sur le SMS de Cécilia, ou sur l'expulsion de personnes en situation irrégulière.
Mais si monsieur SAPIN connaît la formule magique qui permettrait d'augmenter le pouvoir d'achat, d'augmenter le nombre de fonctionnaires (dont les enseignants), de diminuer le temps de travail, de rapatrier les fortunes qui ont fui la France en leur promettant un surcroît de taxes et d'impôts, surtout qu'il prenne un brevet avec extension internationale. Je subodore que monsieur SAPIN est un prix Nobel d'économie putatif.
Bien entendu, je n'oublie pas la nécessaire solidarité qui découle de la fraternité de tous les hommes et de notre communauté de destin, à quoi j'ajouterais la responsabilité qui seule est en mesure d'assurer la dignité des personnes. Que cette responsabilité soit à moduler en fonction des histoires individuelles, je n'en disconviens pas, mais qu'elle soit TOUJOURS absente, et totalement absente, c'est tout simplement inadmissible (Le Dr YUNUS, est un vrai prix Nobel d'économie, et il a très bien compris cette dimension de la personne humaine avec son microcrédit).
En fait, POUR L'INSTANT, les socialistes sont minables. Ils n'ont aucune proposition concrète crédible, autre que celles de leurs incantations contre les riches et de leurs déplorations sur les plus démunis. C'est un peu court. Ils sont minables... et ils continuent.

jeudi 5 juin 2008

A propos du sens

Il y a bien longtemps, j'ai eu l'occasion d'entendre Armand ABECASSIS soutenir, à STRASBOURG, une thèse remarquable devant un jury constitué - excusez du peu - d'Emmanuel LEVINAS, Georges GUSDORF, Michel TARDY et Lucien BRAUN. Armand, qui me fit l'honneur de son amitié, était un passionné d'herméneutique (la science de l'interprétation des textes). Il soutenait et soutient toujours que le sens est un acte posé pour résoudre une tension intérieure née du désir (lequel s'appuie, me semble-t-il, sur le sentiment que nous sommes faits pour l'éternité et l'infini), et que cet acte étant posé, la tension s'en trouve apaisée (c'est le côté signification du mot sens), mais révèle alors un autre manque, non quelconque, qui pousse à poser un autre acte permettant de creuser toujours ce désir, de l'investir dans un objet de plus en plus précis (c'est le côté direction du mot sens). C'est donc le désir qui fraie au sens son chemin. Il importe de ne pas se tromper sur sa réalité, son intensité, sa valeur, et surtout sur son contenu. Comme il n'y a pas de désirs autonomes, que nous ne pouvons désirer que ce qui nous est désigné comme désirable, il est important que nous soient proposés des modèles qui nous fassent grandir plutôt que de nous abaisser. Tant que les hommes politiques, les enseignants, les éducateurs, n'auront pas compris cet aspect fondamental de la nature et de la psychologie humaines, nous sommes assurés de voir proposer à notre désir une foultitude d'objets, présentés comme dotés d'une valeur équivalente, et qu'il appartiendrait à notre seule liberté d'investir. Ces objets vont des plus dégradants, quand bien même ils apportent du plaisir, aux plus sublimes et inaccessibles, laissant celui qui les voudrait posséder dans un état d'amertume indescriptible (qui veut faire l'ange fait la bête). En somme, il est nécessaire de concilier l'aspiration légitime à faire fructifier à son profit personnel les talents et les aptitudes qui nous sont propres (et les souhaits qui les accompagnent), et la non moins légitime aspiration de la société à les voir mettre au service de tous. Toute la question est d'orienter LE DÉSIR vers un OBJET qui soit adapté à notre nature de sujet social. Vous aurez noté que j'utilise un singulier pour désigner cette grande aspiration humaine à l'éternité et l'infinitude, et un pluriel pour désigner l'investissement de cette force vitale dans un objet précis. Or, nous le savons, c'est la culture qui véhicule les modèles.
Voilà pourquoi, par exemple, au lieu de prétendre contre toute évidence, que les tags qui défigurent nos murs, sont une forme d'art, comme le fit jadis un ministre de la culture dont je tairai le nom, il serait préférable de proposer à nos peintres sauvages d'exploiter leurs talents, en les canalisant dans des formes à la fois plus personnelles, plus esthétiques, d'un plus grand goût. Voilà pourquoi je trouve injurieux pour le peuple de parler de culture populaire. Pourquoi faudrait-il que les grands auteurs, les grands peintres, les grands compositeurs, restent la chasse gardée d'une élite jalouse de son savoir ?
Bien entendu, un tel projet culturel suppose que tous les acteurs, enseignants, médias, musées, hommes politiques, industriels des loisirs (!), etc. puissent se réunir et se mettre d'accord sur une sorte de programme minimum à proposer aux générations actuelles, plutôt que d'aller en ordre dispersé et de jouer par exemple la retransmission du match de foot contre la Star Academy, ou Patrick BRUEL au Zénith contre Johny au Stade de France. Rien de tout cela, en soi, n'est condamnable. Ce qui l'est, c'est la systématisation de ces modèles, c'est l'oubli de tout un pan de notre civilisation qui ne peut tout de même pas se résumer à la Star Academy et à Roland Garros.

mercredi 4 juin 2008

Antigone contre Créon

La tempête souffle sur les médias et le monde politique, de droite ou de gôôôôche, après la décision qu'a prise un Tribunal de Lille d'annuler un mariage, pour motif d'erreur substantielle. On rappelle, mais qui ne le sait, qu'il s'agissait, à la demande conjointe des deux époux, de déclarer nulle cette union, car l'épouse reconnaissait avoir menti, en n'ayant pas dit à son futur, avant le mariage, qu'elle n'était plus vierge.

Il me semble que tout le monde, responsables politiques, journalistes, comme simples citoyens, peut tomber d'accord sur un point essentiel : le consentement au mariage doit être libre et éclairé. La question est donc la suivante : monsieur X... qui a demandé l'annulation se serait-il marié s'il avait su que sa fiancée n'était plus vierge ? Nous n'avons pas à nous poser la question de la sincérité ou de l'opportunisme du requérant ; nous avons, en droit strict, et dans le droit fil du bon sens, à nous poser seulement la question de la validité d'un engagement pris en ignorance de causes.

Pour mieux comprendre ce que signifie cette question, changeons en l'un des termes. Si au lieu de virginité, il s'était agi de séropositivité, ou de l'existence de troubles mentaux ou d'une maladie génétique ou de stérilité (connue de la jeune femme et diagnostiquée), aurions-nous réagi de la même manière ? Mentir sur ce sujet eût paru sans doute être un mensonge tel qu'il aurait justifié la nullité. La question qui vient donc après est la suivante : pourquoi la virginité aurait-elle un statut différent de la maladie, alors qu'elle relève d'une dimension tout aussi importante, la sexualité, que celle du corps malade.

Madame Rachida DATI, une femme absolument remarquable, et critiquée de tous côtés, sans doute parce qu'aux médiocres et aux envieux(ses ! ) elle fait de l'ombre, aussi bien par son élégance naturelle que par ses compétences, avait d'abord soutenu la décision du juge. Mais à sa demande, sous la pression des médias et de l'opinion, le procureur de Lille a interjeté appel, mardi 3 juin, du jugement du tribunal de grande instance. L'annonce de l'annulation de ce mariage a provoqué une vive émotion, notamment parmi les défenseurs des droits des femmes.
Que dit la chancellerie pour justifier ce revirement : "L'annulation d'un mariage par le tribunal de grande instance de Lille a provoqué un vif débat de société. Cette affaire privée dépasse la relation entre deux personnes et concerne l'ensemble des citoyens de notre pays, et notamment les femmes".
A mon grand regret, je suis obligé de dire, de redire, et d'affirmer que cette affaire relève de l'intimité des époux et de leur conscience, et non d'une affaire de société. Les belles consciences ne s'offusquent point de voir dans le métro, de plus en plus nombreuses, des femmes emprisonnées dans des robes noires qui leur tombent aux chevilles quand elles ne couvrent pas leurs chaussures, et dont les yeux sont à peine visibles tant ils sont coincés entre un bandeau frontal et une sorte de masque qui ne laisse deviner que le nez. On peut imaginer deux et même trois explications à ce qui nous paraît une extravagance qui fait violence à la féminité : (a) la contrainte familiale ; (b) le poids de la tradition ; (c) l'assentiment personnel. Est-ce à nous de juger ? Oui, si la preuve est faite qu'il y a violence. Non dans le cas contraire. C'est bien là tout le problème. L'état n'a pas à intervenir par la Loi dans le domaine privé.

Pour Jules, pseudonyme d'un juriste blogueur, le problème n'est pas aussi simple. "Le droit ne dit pas quelles sont les qualités que doit réunir une personne pour faire un(e) bon(ne) époux(-se). Il se contente d'apprécier, concrètement, quelles qualités ont déterminé le choix concret d'une personne. (...) L'appréciation des 'qualités essentielles', donc, est subjective", explique-t-il.
En ce sens, la position du TGI de Lille "témoigne d'un grand libéralisme", du point de vue de Jules. "Un tel libéralisme est-il supportable ? s'interroge-t-il. Car laisser l'individu maître de ses critères maritaux peut conduire à tenir compte d'éléments de la personne que le droit sanctionne par ailleurs. Ainsi, pour aller au plus brutal, de l'appartenance vraie ou supposée à une race, une ethnie ou une religion."
Sur ce point-là, la jurisprudence semble encore être flottante. Une décision du TGI du Mans, citée par Jules, avait ainsi établi une liste de qualités qui ne devaient pas apparaître comme essentielles, comme la race et... la virginité. "On voit bien là que le droit hésite entre une conception classique du mariage soumis aux impératifs de la société et la tendance (post-) moderne, qui est de le livrer à l'empire des aspirations individuelles".
Selon moi, cette dernière décision fait litière de ce que j'appelle le consentement libre et éclairé et le commentaire de Jules, dans sa référence à l'empire des aspirations individuelles propre au post-modernisme, est inappropriée : en effet, si la situation concrète d'un ou d'une future est tue, et que, connue de l'autre partie, elle eût entraîné la rupture des fiançailles, il y a "ruse et dol" et "erreur substantielle sur la personne". Je conviens que la preuve d'un tel état d'esprit est difficile à apporter, mais non point impossible. Que messieurs les députés s'occupent de leurs oignons et non point des choix de conscience de leurs concitoyens. Qu'ils continuent ainsi, et nous allons droit à la tyrannie du politiquement correct, et du totalitarisme.
C'est une grande conquête des Grecs, et non point des tendances (post-) modernes : les droits de la conscience sont supérieurs à ceux du tyran, quand, ils demandent à s'exercer dans le respect des choix de conscience d'autrui et qu'ils ne lèsent pas celui-ci. Antigone aura toujours raison contre Créon.