mardi 30 septembre 2008

Laïcité et totalitarisme

Les récentes attaques des prétendus et soi-disants laïcs contre la visite du pape Benoît XVI ont fait l'objet de plusieurs de mes billets. J'ai essayé de montrer que le laïcisme est une idéologie totalitaire. Une vraie laïcité serait la neutralité. Et la neutralité est nécessairement pluraliste dans l'exposé des opinions.
J'ai déjà signalé le livre remarquable de Jacques HEERS, intitulé L'histoire assassinée. J'en extrais ce qui suit avant de développer ma pensée.
Toute propagande d'état commence d'abord par l'école. Elle doit former des citoyens et, pour bien remplir sa mission, prendre complètement les enfants en charge, les 'formater' dirions-nous aujourd'hui, en en faisant des hommes mal à l'aise, honteux dès qu'ils auraient l'idée de penser par eux-mêmes et de remettre en cause quoi que ce soit. Cette école s'est définie laïque, on ne voit pas pourquoi puisque, dès les premiers temps, elle devait servir et imposer une idéologie. [...] Une école qui depuis 1932, ne se réclame plus d'un service d'Instruction Publique mais d'Education nationale. Les mots disent ce qu'il faut : on ne se contente pas d'instruire, d'apprendre à lire et à écrire, à savoir compter et s'exprimer, on 'éduque'. De l'éducation au dressage intellectuel quelle différence ? Et, pour éduquer, bien former et façonner les esprits et les comportements, l'Histoire fut, dès Jules FERRY, à la pointe du combat, arme d'assaut.
Illustration ? On nous cache les horreurs de la Révolution française. On n'expose que les idées de ceux qui la soutinrent, alors que de nombreux critiques, de Joseph de MAISTRE à Léon BLOY, de Louis de BONALD à BALZAC, de BARBET d'AUREVILLY à BERNANOS, présentent des analyses lumineuses de cette folie collective, de cette crise mimétique sur laquelle René GIRARD aurait bien des choses à dire. A défaut de présenter ces critiques, nos professeurs d'histoire pourraient présenter les témoignages d'écrivains ou voyageurs étrangers : BURKE, DONOSO-CORTES, B. FRANKLIN. Que nenni ! On nous ressert SIEYES, l'Abbé GREGOIRE, ROUSSEAU, que sais-je encore. Tous ces prétendus penseurs qui avec leur idéologie ont déchaîné une inouïe violence, une bassesse de coeur, une envie dévorante et nous ont conduit où nous en sommes.
Un historien s'est-il penché sur les raisons qui ont conduit la Iere République à se jeter dans les bras d'un tyran, BONAPARTE, la deuxième à embrasser Louis-Naopoléon dans la fièvre, la troisième (à majorité de gauche) à se soulager le ventre en se donnant à un Maréchal impuissant, la quatrième à sombrer dans une incapacité ridicule et à passer la main à un homme qui fut le dernier des Grands Français ? Comment va donc finir la cinquième ? A quel poigne se soumettra-t-elle ? Ce sont là de vraies questions.
Mais on continue imperturbablement à nous servir la déclaration des Droits de l'Homme, la Liberté-Egalité-Fraternité, les Lumières, Voltaire, sans voir que ce sont là des cache-misère, des leurres, des trompe-couillons. Nous ne voulons pas voir d'où nous venons. Cet aveuglement nous mène tout droit à la désagrégation nationale. La "laïcité" de l'école est un bourrage de crâne. Elle porte des fruits vénéneux. Et nous commençons à subir les effets de leur consommation inconsidérée

dimanche 28 septembre 2008

Gustave, toujours

Je ne me lasse pas de lire et relire Gustave THIBON. Hier, j'ai trouvé dans son ouvrage majeur Diagnostics. Essai de physiologie sociale, ceci, que je vous livre, en pensant à ce que je vous disais hier sur les grands patrons.
Tu n'avais pas le droit de me ressembler, peut dire l'homme d'en bas à l'homme d'en haut. Tu as exaspéré et déchaîné ma bassesse en me révélant la tienne. L'envie qui me dévore aujourd'hui n'est que le cadavre de ma vénération d'hier. Tu as tué en moi le sens vivant de la hiérarchie, la douceur et la noblesse de l'obéissance. [...] Tu as fini par me prouver que tu me ressemblais. Eh bien ! je veux maintenant que nous nous ressemblions tout à fait (cette volonté s'appelle révolution, égalitarisme, communisme).
Comment ne pas être d'accord avec ce constat ? Nos grands patrons, nos hommes politiques devaient mériter notre respect en étant respectables, en offrant à nos yeux et à nos pensées le meilleur d'eux-mêmes. Le spectacle que nous donnent les uns et les autres est attristant. Le dernier en date, celui de madame ROYAL faisant de la politique au Zénith en montant sur les planches accompagnée "d'artistes" en vogue est affligeant, tout comme l'est, du reste, celui d'un Président en train de faire du jogging. Et encore, je comprends mieux que l'on ait envie de faire du sport, que de palabrer sur une scène. Mais on peut le faire dans la discrétion, et en absence de photographes. C'est la rançon d'une certaine candeur plus que le fruit du calcul. Un prince doit s'entourer de mystère, et non de pom-pom girls. C'est en tout cas mon avis.

samedi 27 septembre 2008

Petits commentaires



Lacan revisité par Ubu.
Je ne résiste pas au plaisir de vous communiquer les impressions de Michel SCHIFFRES après la lecture qu'il a faite dans Libération (livraison de jeudi) d'un article jailli de la plume de Julia KRISTEVA. Il a, dit-il, commencé sa lecture à 10 h 44 et l'a terminé à 15 h 07. Texte assez long, ajoute-t-il, qui fait 236 lignes (en effet). Il avoue qu'il a trébuché sur nombre de paragraphes dont celui-ci que je vous livre : Le symptôme Sarah PALIN et autres passages à l'acte féminin, qui signent le malaise actuel de civilisation relèvent moins d'une 'virtuelle essence féminine' que d'une crise hystérique destructrice sous son masque salutaire. Avec ses dérives borderline de toute-puissance maternelle, sexuelle et divine, une telle posture défigure l'expérience complexe de la maternité, qu'elle fige dans l'impénétrable pouvoir de la matrone phallique, fantasmée comme prothèse des mâles défaillants et châtrés.
Personnellement, j'aurais écrit, plus sobrement (à supposer que j'aie compris ce que veut dire l'auteur) : La candidature de madame PALIN à la vice-présidence des Etats-Unis ne sert pas la cause des femmes. Elle met en relief leur soif de pouvoir, et d'une certaine façon leur masculinité. Et madame PALIN n'est qu'un prétexte pour ce pauvre monsieur McCAIN, insuffisamment sûr de lui, assez peu viril, qui cherche dans cette colistière un soutien peu glorieux.
Michel SCHIFFRES est plus humble que moi qui conclut : Découvrir qu'on est d'une intelligence moyenne et d'une capacité de compréhension moyenne est une expérience terrifiante.
Il a raison. Je suis au bord des larmes. Je puise ma consolation dans l'idée que l'article de madame KRISTEVA est un remake de LACAN, revisité par UBU.
Parachute doré.
Monsieur MESSIER, qui a failli ruiner VIVENDI par sa désastreuse mégalomanie, a perçu après sa démission une indemnité de 20 millions d'euros ; monsieur ZACHARIAS, qui démissionne de VINCI, n'a perçu que 13 millions d'euros ; monsieur FORGEARD, ex-coprésident d'EADS, démissionne de son poste en 2006, au moment où explose la crise (prévisible) de l'Airbus A380, et touche 8,5 millions d'euros. Quant à monsieur TCHURUK, malheureux dirigeant d'ALCATEL, dont les affaires ne sont pas très brillantes, il reçoit à son départ une aumône de 5,65 millions d'euros. Tout cela est inacceptable. Ces grands patrons, quelles que soient leurs qualités, n'ont pas rendu à leur entreprise des services tels qu'ils méritent d'être traités aussi somptueusement au moment de leur départ. Il y a une disproportion qu'aucun esprit amoureux de la justice ne peut accepter. Il ne s'agit pas d'exprimer ici de l'envie ou de la jalousie, mais de regarder en face la réalité. Rétribuer confortablement des dirigeants qui ont de lourdes responsabilités est une chose ; les "récompenser" par des indemnités pharaoniques, quand bien même ils ont géré leur entreprise de manière désastreuse en est une autre. On peut toujours m'objecter qu'ailleurs, aux Etats-Unis, par exemple, on utilise couramment ces pratiques. J'en doute fort. Là-bas, un patron qui rate est renvoyé par les actionnaires sans autres forme de procès. Et si la situation des dirigeants est si belle que cela, que nos grands patrons aillent aux Etats-Unis louer leurs services. Je ne les regretterai pas, et j'aurai à l'esprit qu'ils ont une âme de mercenaires. Toutefois qu'il y réfléchissent à deux fois : je n'aimerais pas être le PDG de la défunte et faillie société LEHMAN-BROTHERS ; son sommeil doit être agité.
Les répercussions de la crise financière sur la Chine.
Julie DESNE nous apprend dans les pages saumon du Figaro d'hier que 67.000 PME ont fermé leur porte en Chine au premier semestre de l'année 2008, laissant sans emploi 20 millions de Chinois. CHEN XINGDONG, économiste à la Banque BNP PARIBAS confirme que le gouvernement chinois ne peut pas se permettre de descendre sous la barre des 8 % (sous-entendu, "de croissance annuelle"). Il confirme ainsi les dires de CAI ZHONGGUO ou de Thierry WOLTON dont j'ai évoqué les analyses dans des billets précédents. Or les analystes économiques prévoit une hausse du PIB de 10 % en 2008 et de 9 % en 2009 (Banque Asiatique de Développement) ou (moins optimiste) de 9,9 % en 2008 et de 7,9 % en 2009 (Standard Chartered Bank). Nous devons nous inquiéter de cette situation qui risque de plonger la Chine dans une situation économique et sociale dramatique, d'autant plus que les récentes affaires du lait maternisé en poudre SANLU, du dentifrice à l'antigel, ou des fauteuils CONFORAMA (fabriqués en Chine) dont les tissus provoquent des allergies gravissimes n'est pas de nature à donner confiance aux consommateurs occidentaux, principaux clients de l'Empire du Milieu.
Conclusions de cette petite revue : (a) on ne fait pas de politique avec la morale ; j'en conviens. Mais rien n'interdit aux dirigeants haut placés d'avoir le sens de la mesure et le goût de l'intérêt général ; (b) la course aux paillettes, à la renommée médiatique, pousse souvent des esprits brillants à des excès qui frisent le ridicule ; ils font la mode hélas ; c'est là qu'est l'os aurait dit BOURVIL, s'il était encore des nôtres, parodiant une de ses immortelles réparties de la Grande Vadrouille ; (c) le monde est devenu un village ; le froissement d'une feuille dans une forêt de l'Amazonie peut déclencher une tempête en mer de Chine : c'est du moins ce que nous apprennent les mathématiciens de la Théorie du chaos (mot terrible s'il en fut !).

vendredi 26 septembre 2008

Ségo perd les pédales

Il est assez piquant de voir une éminente représentante du parti qui a inventé la CSG (laquelle atteint aujourd'hui 10 % de tous les revenus non salariaux) critiquer la mesure prise pour financer le Revenu de Solidarité Active proposé par Martin HIRSCH. Elle prétend que ce 1,1 % est une taxe sur "l'épargne des moyens revenus, sur les loyers perçus ou sur les assurances vie." Que n'a-t-elle eu ces scrupules quand a été inventé par son parti l'impôt susmentionné ? Que propose-t-elle, hormis cette critique, pour soutenir une mesure qui est tout sauf démagogique, puisqu'elle consiste à faire abonder par la collectivité nationale les revenus d'un chômeur ou d'un RMIste en reprise de travail ? Devons-nous baisser les bras devant cette annihilation sociale que constitue le chômage, surtout de longue durée, en laissant courir les indemnités versées par les ASSEDIC jusqu'à épuisement des droits, avec à la clé, un RMI stigmatisant ? Les solutions de Ségo sont bien connues : recrutement de fonctionnaires, augmentation des impôts frappant "les riches" ; je crains fort que ses mesures ne frappent ceux qu'elle prétend défendre dans un grand mouvement de menton solidaire. Quant au bouclier fiscal qu'elle pourfend, il ne protège pas grand monde. Ceux qui auraient pu l'utiliser ont en majorité placé leur patrimoine à l'étranger.
A force de critiquer tout azimut, sans analyser les problèmes réels qui se posent au pays, à force de proposer des recettes éculées pour y trouver des solutions, l'ex-candidate perd en crédibilité. Je doute fort que l'invention de la démocratie participative soit de nature à régler les énormes difficultés économiques qui surgissent dans le monde. Quant au concept de (je cite) la révolution démocratique partout en économie comme chez les socialistes, j'aimerais bien savoir ce qu'il signifie vraiment. Je le répète, on ne peut pas distribuer des biens et des richesses qui n'ont pas été produits. La France soufre de ne pas produire assez de richesses, et non de ne pas assez les redistribuer. C'est aussi simple que cela. A vrai dire, Ségo a perdu et ses soutiens et les pédales.

jeudi 25 septembre 2008

Merci à Véronique !

Heureusement, la plupart de nos enseignants ont la tête sur les épaules. Un professeur de français en ZEP, madame Véronique BOUZOU, publie aujourd'hui un éditorial intitulé : Mes élèves n'iront pas voir voir la Palme. Son analyse est pleine de bon sens. Elle commence par déplorer que la Mairie de Paris souhaite inviter 10.000 élèves de 4e et 3e de Collèges parisiens situés en ZEP à aller voir gratuitement ce film. Et elle fait ce constat : Tout au long du film, qui ressemble à s'y méprendre à une émission de téléréalité, les jeunes passent leur temps à invectiver le professeur ! L'enseignant laisse faire... Comment exiger alors des élèves qu'ils soient assidus et concentrés en classe quand ceux d'Entre les murs reçoivent la Palme d'or en récompense de leur mauvaise conduite.
Et elle conclut : Boycotter ce film, c'est refuser les clichés, les compromis et la mainmise des puissants sur la destinée des plus faibles. C'est également dénoncer la récupération financière de la Palme d'or qui sert les intérêts d'une minorité au détriment du plus grand nombre.
Plusieurs remarques. D'abord merci à madame BOUZOU ; c'est une femme qui pense et qui analyse les faits, avant de conclure. Elle est loin de l'idéologie du politiquement correct, et de cette gauche caviar qui s'imagine régler le problème des ZEP en canonisant la faiblesse, pour ne pas dire plus, d'un enseignant, en faisant pleurer Margot dans les chaumières, et en gonflant l'égo de collégiens qui méritent mieux que ce mépris. Madame BOUZOU a sur ces messieurs du jury un très gros avantage : elle enseigne en ZEP. Elle n'emmènera pas ses élèves voir ce film. Elle invite à son boycott. Je la soutiens. J'ai vu quelques scènes de ce film. C'est lamentable.
J'ai voulu lire le roman qui a engendré le film. J'ai abandonné au bout de vingt pages. Il s'agit d'une oeuvre qui frise la nullité. Sur son auteur, j'ai un petit avantage. Les trois dernières années de ma carrière universitaire, j'ai donné bénévolement des cours à des jeunes issus de quartiers sensibles, et qui désiraient passer le Diplôme d'Accès aux Études Universitaires (DAEU). Je me souviens leur avoir dit combien l'effort quotidien, l'investissement personnel, et SURTOUT une bonne maîtrise de la langue était indispensable pour monter dans l'ascenseur social. Et il me souvient justement d'un jeune qui, en plein cours, m'a dit : M'ssieu, j'ai épaté mes copains. J'ai utilisé le mot "fallacieux" ; ils ne savaient pas ce que ça voulait dire, je leur ai expliqué. J'avais intentionnellement utilisé et expliqué ce mot lors d'un précédent cours, et je m'appliquais toujours à soigner ma langue. Vouloir pour ces jeunes le meilleur, exiger d'eux le meilleur, c'est ne pas les mépriser, c'est leur faire confiance, c'est leur dispenser l'enseignement le plus profond, le plus élevé possible, comme aux fils et aux filles de famille. Tout le reste est de la littérature. Et si en plus, on leur manifeste le respect auquel ils ont droit et qui nous permet d'exiger en retour un respect analogue pour notre personne, si on leur manifeste de la compréhension, de l'écoute, de la bienveillance et de l'affection, il se tisse des liens indestructibles. Et il me plaît ici d'évoquer deux de mes anciens, STEVE et JONATHAN, avec qui j'ai toujours gardé des contacts personnels. Quelle rencontre ! Ils sont merveilleux, et ils ont fait leur chemin.
Encore une fois, merci à Véronique BOUZOU.

mercredi 24 septembre 2008

Aux innocents

De très fidèles amis de STRASBOURG viennent de m'envoyer un diaporama qui montre l'étendue du drame démographique en train de dévaster la Chine. On y voit dans le caniveau le cadavre d'un nouveau-né, une petite fille de quelques heures manifestement. Des passants indifférents déambulent sans jeter même un coup d'oeil sur l'innocente injustement tuée. Des voitures éclaboussent de déchets et de saletés le petits corps. Quelqu'un quand même met dessus un carton jusqu'à ce qu'un chinois compatissant se saisissent du paquet et le dépose dans une poubelle.
Voilà où une politique totalitaire et criminelle amène les êtres humains : à la plus épouvantable indifférence à la misère d'autrui. Il y a aujourd'hui 30 millions de jeunes chinois qui ne trouveront pas et ne trouveront jamais d'épouse en 2020, sauf à l'acheter. Aujourd'hui, il en coûte 2000 euros. On peut s'en procurer une à LENGSHUIHE, par exemple, un village des montagnes du SHAANXI (cf. l'article du journal ELLE, numéro du 15 septembre 2008 Le village où l'on achète des femmes). Le déséquilibre des naissances a atteint en Chine des proportions inouïes : actuellement, 120 garçons pour 100 filles en moyenne (ce ratio était de 117 en 2000, et dans certaines régions il est déjà de 130 !). La folie totalitaire d'un régime corrompu conduit ce grand pays à la ruine, à la violence, à l'infanticide, car outre l'avortement devenu très courant, et qui permet de supprimer les foetus de sexe féminin, l'exposition publique dans la rue, l'assassinat pure et simple permettent de respecter une tradition multiséculaire, celle du fils qui entretient les tablettes des parents et sert de tuteur à leurs vieux jours.
Ne me dites pas que la Chine décolle. C'est une imposture entretenue par une ingénieuse propagande, celle des communistes au pouvoir. La Chine s'enfonce. Elle court au devant d'immenses désastres. Et j'ai le coeur serré à l'idée que ce pays que j'aime profondément puisse encore souffrir de troubles politiques, de famine, de guerres civiles, comme semble l'annoncer tous les indicateurs économiques, sociaux, et démographiques.

mardi 23 septembre 2008

Le pape, la science et Yvon Quiniou

Monsieur Yvon QUINIOU a fait paraître dans le Monde un article qui mérite qu'on s'y attarde. Il s'agit d'un article de fond qui critique assez sévèrement la position de Benoît XVI telle qu'il l'a présentée dans sa Conférence aux Bernardins.

Monsieur QUINIOU a l'honnêteté de reconnaître que s'il est philosophe, il est aussi incroyant. Il présente donc le point de vue d'un incroyant opposé à celui d'un croyant. D'un strict point de vue intellectuel cela revient à admettre la relativité des deux positions.

Je vais essayer, en tant que scientifique et croyant, de reprendre point par point les critiques de monsieur QUINIOU. Je note tout d'abord que les trois premières phrases de cet essai sont des phrases de jugement, et de jugement négatif, avec en outre, une utilisation du sens du mot "positiviste" par l'essayiste, qui est tout à fait inappropriée. Le positivisme, tel que je l'ai appris, est le mode de pensée qui consiste à ne prendre en considération que des faits tombant sous le coup de l'expérience concrète, plus précisément de l'expérience des sens, fut-elle transmise par des appareils. Le mot "positivisme" utilisé par Benoît XVI l'est strictement dans ce sens, et il ne recouvre pas entièrement le sens du mot "rationalisme", ou plus justement de celui de "rationalité". Si la raison ne peut s'exercer que sur des faits d'observation et d'expérience, alors la philosophie n'a pas lieu d'exister. Or elle se se construit par des raisonnements spéculatifs, fondés certes sur l'expérience, une expérience non seulement objective et positive, mais aussi une expérience intérieure et c'est justement ce qui en explique l'existence.

Je suis au regret de contredire totalement monsieur QUINIOU quant au supposé rejet de la science par l'Église. J'ai à plusieurs reprises dans des anciens billets expliqué que de nombreux savants étaient des moines et des prêtres qui ont fait faire aux sciences positives des progrès considérables. Reprendre la vieille lune de GALILEE est certes efficace, mais d'une rare malhonnêteté intellectuelle. GALILEE a été condamné non pas parce qu'il disait que la terre tournait autour du soleil mais parce que, ayant prouvé qu'elle le faisait, il ne pouvait que conclure aux erreurs des écritures. On ne disposait pas à l'époque de l'outil de l'analyse littéraire et de la connaissance des genres littéraires et il a fallu plus de trois siècles pour y arriver. Monsieur QUINIOU nous donne à croire que la science a été faite par des incroyants. C'est ce que l'enseignement officiel apprend à nos enfants. Voilà une affirmation un peu courte.

Et puisque monsieur QUINIOU est philosophe, il doit savoir que ne relève du scientifique que ce qui est révocable en doute par l'expérience. L'évolutionisme de DARWIN (qui a été très remanié depuis que son auteur a exposé sa théorie) est une théorie, c'est à dire un ensemble explicatif cohérent qui rend compte de l'ensemble des faits observés, tout comme les théories sur les mouvements des astres, avant COPERNIC, expliquaient ceux-ci presque entièrement. Pour l'instant, il me paraît déraisonnable de n'y pas croire, mais c'est une croyance. En somme, le darwinisme sort de la connaissance positive telle que le conçoit monsieur QUINIOU. Ceci étant dit, je lui accorde qu'il existe un phénomène, appelé "invention génique", qui expérimentalement rend compte parfaitement de la micro-évolution. Je ferai la même remarque sur FREUD. Que ses théories soient opératoires, c'est l'évidence même. Mais elles ne sont qu'opératoires, c'est à dire susceptibles d'être utilisées avec profit dans des circonstances particulières, et ne relèvent en aucun cas de la science positive, au sens où l'entend et monsieur QUINIOU et Benoît XVI, ce qui n'est pas le moindre des paradoxes. En somme, en affirmant ce que critique monsieur QUINIOU, Benoît XVI réintègre dans le champ de la rationalité ce que monsieur QUINIOU s'obstine à mettre dans le champ des sciences positives. Connaître le monde, c'est aussi connaître ce qui relève de l'expérience intérieure, de l'expérience subjective, des faits de conscience.


L'expérience nous apprend aussi combien sont rares les moments de plénitude, et fréquents, obsédants ceux qui nos ramènent à nos limites, à notre finitude. Si nous n'aspirions à rien d'autre qu'à satisfaire des besoins terrestres, ce qui est en partie réalisé dans les pays riches pour un grand nombre de personnes, nous devrions nous contenter de cette satisfaction. Il n'en est rien. Des gens comblés se suicident, se droguent, meurent d'ennui, sont déprimés, comme s'ils étaient incapables de trouver du sens à leur vie. C'est bien là tout le problème. Sortant du point de vue scientifique pour rentrer dans celui du croyant, j'attribue au désir d'infini qui habite le coeur de l'homme, cette soif qui n'est jamais étanchée, même et surtout par les biens matériels.


Il me semble et je conclus, qu'une attitude ouverte et véritablement scientifique consisterait à accueillir sans préjugés, et comme également honorables et utiles, les deux attitudes : celle de l'incroyant, celle du croyant, laissant au libre arbitre de chacun un choix qui donne du sens à sa vie. Le totalitarisme consiste justement à affirmer qu'il n'y a qu'un voie possible, celle que l'on présente. D'accord avec monsieur QUINIOU, je trouve un peu raide l'affirmation qu'il n'y a qu'une culture véritable, celle qui est fondée sur la recherche de Dieu. Mais essayant d'en examiner le plus grand nombre, je suis arrivé à la conclusion que les cultures les plus sublimes sont celles qui se sont efforcées de le faire. Et il serait intéressant, d'un point de vue psychologique de faire des enquêtes comparatives sur le sentiment de bonheur personnel qu'éprouvent les croyants et les incroyants.





jeudi 18 septembre 2008

Oui au mérite

Madame Valérie PECRESSE vient de prendre une excellente mesure qui consiste à attribuer aux étudiants qui auraient eu une mention Très Bien au baccalauréat et dont les parents ne paieraient pas d'impôts sur le revenu, un pécule de 200 euros mensuels. Les fanatiques de l'égalité s'étranglent. Ils ignorent simplement qu'il existe des étudiants brillants mais désargentés qui ne peuvent continuer leurs études faute de revenus et que cette mesure est de simple bon sens. Je suis bien placé pour le savoir, car j'ai rencontré ce type d'étudiants pendant ma carrière universitaire.
A quoi est due cette haine du mérite chez les partisans les plus déclarés de l'idéologie socialiste ? Et pourquoi cette haine suscite-t-elle tant de rejet dans l'esprit de nombre de conscience droite qui, par leurs actes, prouvent au quotidien qu'ils ont l'esprit de partage et le souci des autres ?
Dans un article signé par Paul-Augustin d'ORCAN, publié dans cette mine qu'est Le Livre noir de la Révolution Française, la question est très clairement présentée et la réponse non moins claire montre combien le mythe de l'égalité est une aporie. Voici le paragraphe qui me semble résumer au mieux la pensée de l'auteur.
L'instinct démocratique, qui tente et obtient d'imposer à l'Occident sa domination, tourne autour d'une notion que cet instinct avance comme un dogme semblant aujourd'hui intangible et dont NIETZSCHE montre la problématique intrinsèque avant d'en démasquer l'origine PSYCHOLOGIQUE. Ce "dogme" est celui de l'égalité. La question insoluble posée par la décision qui met l'égalité au principe est simple : (et de citer ici NIETZSCHE) Problème de l'égalité, alors que nous avons tous soif de distinction ; or on nous prescrit au contraire de nous appliquer les mêmes exigences qu'à autrui. C'est d'une telle stupidité, d'une si visible folie ! Mais elle est considérée comme une idée supérieure, on y perçoit à peine la contradiction rationnelle.
En fait, le souci égalitaire n'est jamais que l'expression d'un instinct parmi les autres, une volonté de puissance qui entend s'imposer et qui effectivement l'emporte aujourd'hui. Le fondement du partage et de la justice n'est pas l'égalité, c'est la fraternité ontologique, la compassion, la reconnaissance de l'unicité de chaque être humain, et non point ce principe né de l'instinct le plus vil, celui d'accaparer ce que les autres possèdent et que l'on ne possède pas. Cela n'exonère pas les riches de l'exigence de partage, bien au contraire. Car la fraternité implique que l'on reconnaisse être de la même famille.
Madame PECRESSE a bien raison. Il faut soutenir cette initiative qui permettra une véritable ascension sociale à ceux des jeunes qui en ont le désir, le goût et les aptitudes.

La France et l'Afghanistan

Une visite au Musée GUIMET, et plus spécialement aux salles consacrées à l'art antique afghan, me fait découvrir dans le détail les extraordinaires découvertes qu'y ont fait les savants français. FOUCHER ou HACKIN, par exemple. Ces éminents archéologues ont fait faire à la connaissance de l'histoire de ce pays des progrès considérables. La France a eu longtemps le monopole des fouilles dans cette lointaine contrée. Elle fut conquise par ALEXANDRE, et de nombreux colons grecs s'y installèrent au point que des Royaumes hellénistiques durables y furent fondés. Tout cela fut découvert, ou redécouvert par nos compatriotes. Nos concitoyens s'en moquent sans doute éperdument. C'est bien dommage. Car notre pays jouit en Afghanistan d'un grand prestige. La France a aidé à sa reconstruction après les ravages provoqués par les guerres civiles successives et les Taliban (pas de s à ce mot qui est déjà un pluriel), et sa diplomatie se souvient qui toujours se déploie sur le long terme.
Il serait lamentable et lâche de laisser le peuple afghan tomber entre les mains de fanatiques ; il serait infiniment triste d'avoir inutilement versé le tribut du sang avec la perte récente de dix de nos soldats. La tentation est grande pour l'opposition comme pour l'opinion publique de renoncer. Mais l'histoire nous montre que les renoncements ne conduisent jamais aux résultats qu'on en attend. Les jeunes ne savent pas ce que fut la honte de MÜNICH. Et comme on ne transmet plus, ils n'ont aucune idée de ce que fut notre lâcheté. (On dit que DALADIER, acclamé par la foule à son retour à PARIS aurait murmuré à l'un de ses collaborateurs : Ah ! Les c... S'ils savaient !). Oui la foule et certains hommes politiques se félicitaient à l'époque de ce que cet accord honteux nous assure pour longtemps "le pain et la liberté". Deux ans après nous étions occupés, nous avions à peine de quoi nous nourrir, et nous étions dans le déshonneur.
Quand le monde est aussi dangereux qu'il l'est aujourd'hui, quand de lourdes menaces pèsent sur la paix, nous avons mieux à faire que de polémiquer sur une vidéo de monsieur DARCOS, le CD de madame SARKOZY-BRUNI, ou les conciliabules des éléphants à LA ROCHELLE. Quand les Français seront-ils unis ?

mercredi 17 septembre 2008

La liberté du culte selon le citoyen Lequinio, conventionnel

Lequinio aux Vendéens :

Tous les cultes sont libres. Le premier des droits de l'homme est de penser librement en tâchant de rendre hommage au dieu que son imagination lui peint. N'est pas libre celui dont l'esprit est tourmenté par les discours d'un autre. Nul n'a le droit de prêcher des absurdités et celui qui le fait devient réfractaire à la loi qui consacre la liberté des cultes puisqu'il veut, par la magie de son éloquence, forcer les autres à pratiquer le sien. Tout homme qui s'avise de prêcher quelques maximes religieuses que ce soit viole la Constitution républicaine. Afin que la liberté des cultes existe dans sa plénitude, il est défendu à qui que ce soit de prêcher ou d'écrire pour favoriser un culte ou une opinion religieuse, quelle qu'elle puisse être, sous peine d'être arrêté à l'instant comme ennemi de la Constitution républicaine et livré au tribunal révolutionnaire.
LEQUINIO était un montagnard hébertiste, groupe qualifié par ROBESPIERRE d'Exagérés. Il serait malhonnête de ne pas signaler que ce grand terroriste a quand même condamné ces excès-là.
Je dis, je prétends et je maintiens que les plus sectaires des laïcistes pensent encore exactement de cette manière. Et que leur idée de la laïcité est liberticide et conçue pour empêcher toute transmission de la foi, spécialement de la foi chrétienne, et encore plus spécialement de la foi catholique. Et si les initiatives de monsieur LAIGNEL, le plus représentatif de ces sectaires, avaient abouti à la suppression de l'Enseignement libre sous le premier septennat de monsieur MITTERRAND, nul doute que nous en serions là aujourd'hui.
Je puis donner un témoignage personnel à ce sujet. Nous sommes à la fin du printemps 1981. Mes parents m'ont convié à aller avec eux dans l'Aisne où ils ont une petite maison de campagne. En route, nous nous arrêtons dans une petite église, près de COMPIEGNE pour aller à la messe. Le Curé, à la fin de son homélie, lie une circulaire de monsieur DEFERRE, Ministre de l'intérieur et des cultes, dans laquelle il est rappelé que les églises sont propriétés publiques et qu'elles ne peuvent être utilisées à d'autres fins que le culte, et en tout cas pas pour des concerts, conférences et manifestations culturelles. Je trouve ça très rigolo, et je me demande ce que dirait aujourd'hui, par exemple, le maire de SAINTES (socialiste), s'il ne pouvait disposer des Églises de sa ville pour y faire donner de magnifiques concerts pendant le festival. Il est vrai qu'il a ce droit puisqu'il est le représentant du peuple communal, censé être le vrai propriétaire collectif et indivis de ces biens. Mais que se passerait-il si l'évêque de SAINTES et LA ROCHELLE s'avisait d'utiliser ces bâtiments pour y faire donner des concerts dont il maîtriserait la programmation. Il lui faudrait demander l'autorisation au maire ? Je ne voudrais pas trop m'avancer, mais je crois que oui. Heureusement, je crois savoir que le maire de SAINTES n'est pas sectaire et qu'il donnerait cette autorisation qu'il aurait tout à fait le droit de refuser. C'est ce qu'on appelle la liberté.
CLÉMENCEAU était vendéen. Dans les années 1890, il déclara que la Révolution était un bloc, voulant dire par là qu'elle était à prendre ou à laisser. Compte tenu de ses origines, je ne peux pas imaginer qu'il ait ignoré les exactions des armées de la Convention dans ce département. Je suis amené à admettre qu'il passait par profits et pertes toutes ces horreurs, qu'il les prenait pour un détail de l'histoire, et qu'elles ne comptaient pour rien, en regard des bienfaits que la Révolution avait apportés. Cela n'enlève rien à ses mérites, qui furent grands lors de la première guerre mondiale. Je redis ici que le mythe entretenu de Révolution cache le mystère des origines sanglantes de notre actuelle République, que la Révolution est comprise comme l'année zéro de notre histoire dans l'inconscient collectif, et que ce tour de passe-passe, qui offense la vérité et les français, a été volontairement conçu par une minorité de militants hostiles à toute forme de transcendance sauf à celle de l'égalité et élevés dans la haine du christianisme. A vrai dire, il faut refonder la République, en commençant par reconnaître cette origine sanglante et anti-religieuse. On pourrait ainsi ranger au placard les ridicules gesticulations de monsieur BLONDEL, du Réseau Voltaire, et des soi-disants défenseurs de la laïcité.

mardi 16 septembre 2008

Je suis pour les médailles

L'idée de donner des médailles aux jeunes bacheliers ou diplômés titulaires de mention est une excellente idée. Les protestataires qui prétendent que cette mesure est bling-bling, inutile, et qu'elle ne traite pas des inégalités (sic) devraient un peu s'informer. J'ai sur eux un certain avantage qui est celui de l'expérience de terrain : j'en ai deux exemples qui méritent d'être ici résumés.
Le premier a trait à l'enquête que l'Institut pour la Promotion du Lien Social (IPLS) a conduite dans 20 collèges du Bas-Rhin. J'ai été le Président de cet Institut pendant trois ans, et j'ai interviewé près d'une trentaine d'intervenants surtout dans les Collèges de ZEP (sur la centaine d'interrogatoires conduits dans le cadre de cette étude). Tous mes interlocuteurs, en des termes divers mais convergents, ont souligné le déficit de transmission intergénérationnelle, l'absence de prise au sérieux des jeunes, indéfiniment cantonnés dans l'irresponsabilité de leurs vie par des adultes eux-mêmes irresponsables, la difficulté qu'ils avaient à intéresser les parents aux problèmes rencontrés par leurs enfants. Que des générations d'adultes marquent leur intérêt pour les performances scolaires des jeunes gens et jeunes filles me paraît aller dans le bon sens, permet de les préparer à la vie active, manifeste qu'ils existent comme futur responsables ou acteurs dans la société. Donc, malgré les dénégations des syndicats et d'une fédération de parents d'élèves, émanation des organisations dites de gôôôche, les enseignants, principaux, conseilles principaux d'éducation, psychologues, infirmières, conseillers d'orientation, insistent sur la nécessité de prendre au sérieux les jeunes et de les reconnaître comme des acteurs de leur vie, et des responsables de leurs actes et de leurs choix. Du reste, dans le cadre des activités de l'IPLS, nous avons organisé depuis plusieurs années au début du mois de mai, un Forum de la Tolérance et de la Fraternité, auquel étaient invités plus d'une centaine de jeunes des collèges et lycées. Il leur était proposé de découvrir ces notions à travers des ateliers de mime, d'écriture, de musique, de théâtre, de jeux de rôle, etc. Ils venaient accompagnés d'un enseignant de leur établissement. Nous leur remettions, à la fin de la journée, un diplôme d'Ambassadeur de la Tolérance et de la Fraternité. Il fallait voir la fierté de ces jeunes se faisant photographier, groupe par groupe, en exhibant leur diplôme (pour certains, le premier jamais reçu, et sans doute l'unique). Il fallait voir aussi la déception des très rares participants, inscrits trop tard, et pour qui nous n'avions pas eu le temps de faire imprimer ces diplômes et qui réclamaient qu'on le leur envoyât (ce que nous avons fait). Et enfin, il était intéressant de noter au minimum l'intérêt, au mieux l'enthousiasme des accompagnateurs pour cette initiative.
Deuxième exemple. J'ai enseigné pendant 33 ans à l'Université Louis Pasteur. Les trois derniers doyens qui ont conduit les affaire de la Faculté, ont réintroduit une séance de remise solennelle des diplômes, suivi d'un cocktail festif. L'atmosphère de cette fête était et est toujours extraordinaire. Étudiants bien habillés (pour une fois), étudiantes en robe pimpante (idem), parents fiers de leurs enfants, enseignants entourés et sollicités (pour des photos, par exemple).
On me rétorquera qu'il s'agit là de l'élite. Je veux bien. Mais faut-il, parce qu'ils sont l'élite, les mépriser ? En quoi honorer les meilleurs ôte-t-il à ceux qui ont moins et pour lesquels la nation fait beaucoup (je peux en témoigner ; voir enquête évoquée ci-dessus) ? Toujours cette haine qu'éprouve le médiocre pour ce qui le dépasse, ce ressentiment des incapables, cette prétention qu'il suffit de dénoncer un mal pour croire qu'il est guéri. Pas une tête ne doit dépasser dans l'esprit de ces fanatiques de l'égalité. Et c'est sans doute pourquoi leurs ancêtres se sont employés à en couper autant lors de la Révolution. Rien n'est pire qu'un médiocre qui accède au pouvoir. Ou bien il est violent, ou bien il est impotent. Ou bien, et c'est le cas le plus fréquent, il est les deux à la fois.
Merci à un ami très cher, le Pr D. G... qui a lancé cette idée de remise solennelle des diplômes quand il était Doyen (un très bon...)

lundi 15 septembre 2008

La vraie laïcité

Le politique et le religieux relèvent de deux ordres différents, pour un chrétien en tout cas. Tout le monde connaît le fameux épisode du denier de César où Jésus dit à des hypocrites qui tentaient de le prendre au piège : Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. Et Jésus dira devant Pilate : Mon Royaume n'est pas de ce monde. (Il lui dira aussi : Tu n'aurais sur moi AUCUN pouvoir s'il ne t'avait été donné d'en haut).
Il faut donc affirmer avec force (a) que les chrétiens n'ont pas à vouloir instaurer le règne de Dieu sur la terre et (b) que les autorités politiques ont reçu pouvoir de diriger les nations et les peuples et qu'un chrétien est tenu EN CONSCIENCE de leur obéir, tant qu'elle n'offensent pas les droits de Dieu et ne font pas violence à leurs convictions.
Là est tout le problème. Les grecs nous ont appris à mettre la conscience au-dessus de la tyrannie. ANTIGONE a préféré obéir aux dieux en ensevelissant son frère que d'obéir à CREON, ce tyran, qui prétendait l'en empêcher. Pour un chrétien, il vaut mieux obéir à Dieu qu'aux hommes quand se pose le problème du choix. Ce sont là droits élémentaires, non pas ceux de l'individu, mais ceux de la personne.
Selon moi, la vraie laïcité consiste (a) à ne pas prendre de décisions politiques qui s'inspireraient d'une religion ou D'UNE IDÉOLOGIE ; elles ne doivent désirer que le service du bien commun ; (b) à laisser à la conscience tous ses droits, y compris celui de s'exprimer dans l'espace public.
Voilà pourquoi nous devons admettre (a) qu'il existe des conceptions diverses du bien commun, lesquelles s'expriment (plus ou moins nettement, et d'une manière plus ou moins idéologique) au moment des élections et s'offrent au choix du citoyen ; apprendre (b) à ne pas protester quand un pape visite notre pays, mais pas davantage quand des fidèles musulmans organisent leur grand rassemblement au Bourget, ou les protestants l'assemblée du Désert, ou les fidèles juifs la commémoration des déportations et des camps de la mort ; et (c) à refuser de faire ce que notre conscience réprouve ; ce droit est donné aux journalistes sous la forme de la "clause de conscience" ou "de la protection de l'anonymat de leurs sources", il doit être donné aux médecins chrétiens qui refusent de procéder à des avortements ou à des euthanasies actives, à des militaires chrétiens qui refusent de pratiquer la torture (cf. le général de La BOLLARDIERE), à des fonctionnaires chrétiens qui ne veulent pas couvrir des pratiques de corruption, à des enseignants chrétiens qui combattent les mensonges historiques. Cela me paraît être le minimum de respect que la vraie démocratie doit aux citoyens. La chose est admise en théorie. En pratique, c'est un peu différent... En revanche, et au nom même de la conscience, se soustraire à l'impôt, frauder le fisc, transgresser les lois par tous les moyens, cela un chrétien ne peut pas le faire. (Et c'est pourquoi je ne trouve pas honteux de payer 1,1 % d'impôts sur les revenus du patrimoine pour permettre à des chômeurs de réintégrer une vie sociale normale en travaillant. Ce n'est pas là une mesure injuste.) Voilà, selon moi, ce qu'est la vraie laïcité : non pas un combat permanent entre la calotte et les hussards noirs de la République, mais un respect des lois, et la possibilité d'exprimer - de manière argumentée - dans l'espace public, qui est l'espace politique par excellence, des choix de conscience. Et par espace public, je n'entends pas parler des médias, mais des lieux où s'élaborent et se décident les lois.

dimanche 14 septembre 2008

In memoriam

Voici les noms et les âges des enfants massacrés aux LUCS-SUR-BOULOGNE en Vendée, par les colonnes infernales du Général TURREAU, détachement du Général CORDELLIER. J'en ai la gorge serrée, et je ne sens pas le courage de faire le moindre commentaire. Oui, Dans Rama s'est fait entendre une voix, qui sanglote et se lamente : c'est Rachel pleurant ses enfants ; et ne veut pas qu'on la console, car ils ne sont plus ; je reprends là un verset de l'Evangile (Matthieu, 2, v18, tiré de Jérémie, 31, 15) qui décrit le massacre des saints Innocents par les soldats du Roi HERODE. Lecteurs, si vous avez du coeur, ayez une pensée et même une prière pour ces pauvres petits, victimes parmi tant d'autres, d'un génocide. Cent-dix enfants massacrés, parmi les 564 personnes tuées aux Lucs ce jour-là, le 28 février 1794.


Marie-Modeste AIRIAU, de la Ricoulière, 5 ans et 7 mois,
Thomas AIRIAU, de Villeneuve, 10 mois,
Joseph ARCHAMBAUD, de Puyberne, 20 mois,
Agathe ARNAUD de Belleville (tuée au Lucs ) 4 ans et demi,
Etienne BERIAU, de l’Erzandière, 15 (QUINZE) jours,
Marie-Madeleine BERIAU, de Roblin, 2 ans et 11 mois,
Jeanne BERIAU, du Petit-Luc, 4 ans,

Marie BERNARD, de la Jarrie, 3 ans,
Céleste BOISSELEAU, de la Grézaudière, 6 ans,
Pierre BOISSELEAU, de la Gaconnière, 6ans et demi,
François BOSSIS, du bourg du Grand-Luc, 7 mois,
Joseph BOSSIS, son frère, 23 mois,
Louis BOSSIS, autre frère, 5 ans,
Pierre BOUET, de la Surie, 27 mois,
Louis BOURON, de Bourgneuf, 3 mois,
Madeleine BOURON, sa cousine, de Bourgneuf, 3 ans,
Marie CHARUAU, de la Guyonnière, 2 ans,
Marie-Madeleine CHARUAU, sa sœur, 4ans et 3 mois,
Jean CHARRIER, de la Devinière, 3 ans,
Marie DAVIAUD, de l’Erzandière, 1 mois,
Pierre DAVIAUD, son frère, 5 ans et 8 mois,
Jeanne DAVIAUD, au Petit-Luc, 2 ans et 11 mois,
Pierre DAVIAUD, son frère, 4 ans et 10 mois,
Louis EPIARD, du Chef-du-Pont, 5 ans et 10 mois,
Jean-François ERCEAU, de la Sorinière, 27 mois,
Pierre FETIVEAU, de la Gaconnière, 27 mois,
N…FETIVEAU, son frère, 3 mois,
Jeanne FEVRE, du Chef-du-Pont, 5 ans et demi,
Suzanne FORGEAU, de la Sorinière, 20 mois,
Rose-Aimée FORT, du Champ-Dolent, 31 mois,
Pierre-René FORT, son frère, 5 ans et 9 mois,
Marie-Anne FOURNIER, bourg du Grand-Luc, 30 mois,
Jacques FOURNIER, son frère, 5 ans et 5 mois,
Marie GARREAU, de la Cornetière, 7 ans,
Marie-Anne GAUTRET, de la Guénière, 7 ans,
Pierre GEAI, des Temples ; 25 mois,
Jean GIRARD, du Chef-du-Pont, 1 an,
Marie-Jeanne GIRARD, sa sœur, 4 ans et 2 mois,
Pierre GIRARD, leur frère, 6 ans et 4 mois,
Pierre GOUIN, des Temples, 1 an,
Louis GRALEPOIS, de la Grézaudière, 13 mois,
Jeanne GRALEPOIS, de la Bretonnière, 5 ans,
Pierre GRATON, du Puy, 3 ans et 4 mois,
Jeanne GRIS, de la Cernetière, 5 mois,
Pierre GRIS, son frère, 5 ans,
Lubin GUILLET, du Bourg du Grand-Luc, 6 ans,
Marie GUITET, de l’Erzandière, 4 ans et demi,
Marie HERMOUET, du bourg du Grand-Luc, 5 mois,
Louis HIOU, de Bourgneuf, 2 ans et 11 mois,
Marie-Anne JOLI, de la Bromière, 27 mois,
Marie MALARD, du Marchais, 4 ans,
Jean MALIDIN, de la Primaudière, 18 mois,
Marie MALIDIN, sa sœur, 3 ans et 11 mois,
Jeanne MALIDIN, de la Bruère, 3 ans,
Rose MALIDIN, sa sœur, 6 ans et 2 mois,
Joseph MANDIN, du bourg du Grand-Luc, 23 mois,
Louis MANDIN, son frère, 5 ans et 9 mois,
Véronique MARTIN, de la Moricière, 1 an,
Marie-Françoise MARTIN, du Petit-Luc, 2 ans,
Louise MARTIN, sa sœur, 5 ans et 4 mois,
Rosalie MARTIN, de la Guénière, 2 ans et 10 mois,
Louise MARTIN, sa sœur, 5 ans et 3 mois,
Rosalie MARTINEAU, de Bourgneuf, 2 ans et 11 mois,
Jean MIGNEN, de la Sorinière, 1 an,
Louise MINAUD, du Brégeon, 15 jours,
Louise-Marie MINAUD, sa sœur, 15 mois,
Jean MINAUD, leur frère, 5 ans et 3 mois,
Pierre MINAUD, autre frère, 6 ans et 11 mois,
Jeanne MINAUD, de la Davière, 15 mois,
André MINAUD, son frère, 4 ans et 2 mois,
Véronique MINAUD, leur sœur, 6 ans et 8 mois,
Pierre MINAUD, leur cousin de la Davière, 4 ans,
Louise MINAUD, de l’Ethelière, 33 mois,
Marie-Anne MINAUD, sa sœur, 6 ans et 11 mois,
Anne MORILLEAU, de la Primaudière, 2 ans,
Céleste MORILLEAU, sa sœur, 6 ans et 5 mois,
Jean PERROCHEAU, du Retail, 5 ans et 3 mois,
Pierre POGU, de la Pellerinière, 22 mois,
Jean POGU, son frère, 5 ans,
Rose PREVIT, de Villeneuve, 10 mois,
Marie PREVIT, sa sœur, 6 ans,
Rose REMAUD, de Bourgneuf, 4 ans et 11 mois,
Marie REMAUD, de la Grande-Métairie, 4 ans et demi,
Pierre RENAUD, de la Nouette, 18 mois,
Catherine RENAUD, sa sœur, 3 ans et demi,
Jeanne RENAUD, leur cousine, de la Nouette, 4 ans,
Marie-Anne RENAUD, de la Petite-Brosse, 4 ans,
Pierre RENAUD, son frère, 6 ans et demi,
Marie RICOULEAU, de la Bromière, 22 mois,
Jeanne ROBIN, de la Retardière, 5 ans,
Marie-Anne RORTAIS, de la Guyonnière, 4 ans,
Jeanne ROUSSEAU, de la Gaconnière, 23 mois,
Jean ROUSSEAU, son frère, 3 ans et 11 mois,
Louis ROUSSEAU, autre frère, 7 ans,
Victoire ROUSSEAU, cousine, de la Gaconnière, 11 mois,
Jeanne ROUSSEAU, sœur de Victoire, 4 ans,
Jeanne SAVARIAU, de la Sorinière, 5 ans et 10 mois,
Pierre SIMONEAU, de la Moricière, 6 mois,
Jean SIMONEAU, son frère, 4 ans et 10 mois,
Jacques SIMONEAU, de la Bugelière, 18 mois,
Joseph, SIMONEAU, cousine, de la Bugelière, 8 mois,
Henri SORET, du Petit-Luc, 2 ans,
Jacques SORIN, de la Bromière, 5 mois,
Jean SORIN, son frère, 3 ans et 3 mois,
Madeleine TENET, du Chef-du-Pont, 7 ans,
Louis VRIGNAUD, de la Ricoulière, 23 mois,
Marie-Jeanne VRIGNAUD, de la Cornetière, 3 ans,
Jean-Baptiste VRIGNAUD, son frère, 4 ans et 5 mois.

In memoriam.

Laïcité, une idée totalitaire

1-La République est la fille de la Révolution.
La République Française, le seul état au monde qui ait inscrit la laïcité dans sa constitution, est une fille de la Révolution. Dans un si court espace, il ne m'est pas possible d'apporter une démonstration totale de la chose, sur laquelle d'ailleurs, tous les Français s'accordent. Deux faits historiques suffiront à rappeler que cette affirmation est bien fondée. Le 5 mai 1889, la République, alors présidée par Sadi CARNOT, célèbre en grande pompe, le centenaire de l'ouverture des États Généraux et la Grande Révolution. Le Président CARNOT ira ensuite dans la Galerie des Glaces du château de Versailles pour faire un discours devant tous les corps constitués de la Nation. Auparavant, il aura dévoilé une plaque commémorative dans la Salle du Jeu de Paume. La 14 juillet 1989, c'est au tour du Président MITTERRAND de célébrer le bicentenaire de ce Grand Bouleversement. Ainsi, la République, non seulement se réclame de la Révolution, mais encore elle en est fière. J'observe que dans les deux cas, on passe pudiquement sous silence le corps central des événements révolutionnaires qui ont engendré notre actuelle République. Dans le premier cas, c'est l'ouverture des États Généraux, dans le second cas, c'est la Fête de la fédération (et non pas la prise de la Bastille, comme le prétendent mensongèrement et les médias, et nombre de manuels d'histoire) que l'on célèbre. Rien de tout cela n'évoque le sang, les procès, les atrocités de toutes sortes dont se sont rendus coupables les Conventionnels. Ces détails de l'histoire pour reprendre une expression abominable, on les passera par profits et pertes. (cf. Le Livre noir de la Révolution.)
2-La Révolution est responsable de la confusion du politique et du religieux. Son but est la destruction du christianisme.
J'observe avec étonnement que les tenants de la laïcité, de fervents républicains, sont les héritiers directs d'un régime qui, précisément, est le premier responsable de la confusion des genres : politique et religieux. Ce n'est pas l'Église catholique, c'est la Constituante qui a inventé la Constitution civile du clergé ; elle obligeait tous les ministres des cultes à prêter serment de fidélité à la nation, à la loi et au roi, et à la Constitution votée par l'Assemblée Nationale et sanctionnée par le Roi. Il s'agissait par là d'empêcher la naissance d'une quelconque opposition spirituelle à l'entreprise totalitaire qu'avait dans la tête un certain nombre de doctrinaires, dont trois ans plus tard, le ci-devant chevalier de SAINT-JUST fut le plus brillant et le plus féroce représentant. Quant à la Convention, elle s'est appliquée à persécuter méthodiquement ceux des Français qui précisément se refusaient à mélanger religieux et politique. On voit par là que le but des révolutionnaires n'était pas de séparer le religieux du politique, mais très clairement de supprimer le religieux pour mieux régner sur les coeurs et sur les âmes. Leur entreprise était totalitaire comme l'est celle de leurs continuateurs. Là encore, je n'ai pas la place de développer plus avant.
3-Quelques statistiques ; quelques faits.
Huit milles prêtres, religieux et religieuses, sans compter les nombreux laïcs fidèles à leur foi, ont été massacrés par les révolutionnaires, avec une invraisemblable férocité, notamment en Vendée, où les colonnes infernales se rendirent coupables de crimes que des nazis auraient pu inventer. On y fit brûler vif des femmes et des enfants dans des fours à pain chauffés à blanc, car disait l'un des responsables de ce drame épouvantable, c'est ainsi que l'on fait cuire le pain de la République.
En 1794, madame BEAUZAC, âgée de 60 ans, est condamnée à mort, au PUY-EN-VELAY pour avoir reçu chez elle son fils, prêtre réfractaire. En mai 1794, 32 religieuses de quatre congrégations différentes sont enfermées à la prison d'ORANGE. Elles se réunissent dans la même chambre, élaborent et adoptent la même règle puisqu'elles devaient avoir la même destinée. A six heures du matin, quand on vient chercher certaines d'entre elles pour les conduire à l'échafaud, elle se réunissent, agenouillées, elles récitent la prière des agonisants et se relevant elles chantent le Laudate Dominum. Le 26 juillet 1792, l'abbé de LARTIGUE est massacré à CLAIRAC par une foule en folie, en décembre 1793, 143 prêtres sont noyés par le sinistre CARRIER à NANTES, à TOULOUSE, l'héroïque abbé DUCHELIN est guillotiné le 7 novembre 1793, à PARIS, Anne POULAIN et sa servante, sont condamnées à mort le 21 décembre 1793 pour avoir reçu un religieux proscrit, l'abbé de FENELON est guillotiné en juin 1794, à MONTPELLIER, Marie COSTE, une paysanne, est guillotinée pour avoir donné à manger à un prêtre proscrit. Et les 16 Carmélites de COMPIEGNE, immortalisées par BERNANOS, et les 13 Ursulines de VALENCIENNES, les 193 prêtres et religieux massacrés dans les prisons des Carmes, de Saint-Firmin et de l'Abbaye, et les 19 chrétiens de LAVAL, et les 99 martyrs d'AVRILLE qui comptaient 84 laïcs parmi eux, et le père Adrien TOULORGE, religieux prémontré, guillotoné à COUTANCES le 13 octobre 1793, et les 110 ENFANTS DE MOINS DE 7 ANS, massacrés au LUCS-SUR-BOULOGNE en VENDEE, et tous les prêtres des affreux pontons de ROCHEFORT, morts avant que d'avoir pu être déportés en GUYANE ? Leur sang ne crient pas vengeance. Il nous enseigne. (Données puisées dans un article de Jean de VIGUERIE, professeur honoraire à l'Université de LILLE III, dans Le livre noir de la Révolution.)
4-De la laïcité de l'école.
La laïcité de l'école, et la main mise de la faction antireligieuse et doctrinaire sur l'enseignement n'avait et n'a toujours qu'un but : mentir sur l'origine sanglante et fondamentalement antichrétienne de la Révolution. Je doute fort que la description des atrocités par elle commises à l'encontre des Petits Tambours du 10 août 1792, ou des 110 petits martyrs du LUC-SUR-BOULOGNE donnerait à nos enfants d'aujourd'hui un grand amour de cette période de notre histoire. La NATIONALISATION de l'enseignement n'avait qu'un but et n'en a qu'un seul encore, empêcher que la vérité ne soit connue de jeunes âmes innocentes et justes. Allez, je mets l'inénarrable monsieur BLONDEL au défi de me dire qu'il approuverait cette initiative de salubrité publique. On ne saurait le rendre responsable de ces abominations. Mais son silence, ne l'en rendrait-il pas solidaire ? En d'autres termes, qu'a-t-il à nous dire là-dessus, ce chantre de la Libre (!) Pensée ?
En d'autres termes encore, j'accuse formellement ces doctrinaires de vouloir exercer sur nos enfants une pression analogue à celle qu'ils accusaient l'Église d'avoir sur eux sous l'Ancien Régime, et jusqu'à la séparation de l'Église et de l'Etat en 1905. Je les accuse formellement d'avoir une pensée et des visées totalitaires au sens le plus strict du mot. Et sur ce point, je veux bien avoir un débat public avec eux.
Devant ce déni de justice, ce mémoricide incroyable, ce mensonge d'Etat érigé en dogme, on comprend que nombre de Chrétiens aient longtemps résisté à l'idée de République à la sauce révolutionnaire, et à la confusion savamment entretenue entre démocratie, et régime politique républicain à la française. Je suis farouchement démocrate...

samedi 13 septembre 2008

Laïcité républicaine ?

D'ordinaire mieux inspiré, monsieur BADINTER s'est livré hier à un exercice périlleux, celui de commenter la visite de Benoît XVI, en y mettant toutes les nuances, en condamnant sans condamner, tout en désapprouvant mais en réservant quelques éléments positifs qui etc. etc. Bref, il s'est pris les pieds dans le tapis. Voici, en substance, ce qu'il dit :
La Constitution de la République française en son article un stipule que la République est une, laïque et indivisible. Par conséquent la laïcité n'est ni positive ni ouverte, elle est républicaine. Na ! Et il ne convient pas de raviver une querelle qui était en train de s'éteindre (à vrai dire on se demande qui ravive la querelle, si ce n'est les opposants à une visite prévue depuis longtemps)
La laïcité est donc républicaine. Voilà, selon moi, une affirmation qui ne veut strictement rien dire, et que chacun peut entendre de la manière qui lui convient. Les tenants du "camp laïc" y comprendront qu'il faut continuer de combatte les Églises et les religions, et plus précisément l'Église catholique. D'autres, moins sectaires, comprendront que les décisions des politiques ne doivent pas s'appuyer sur des considérations religieuses ; d'autres, ce sont sans doute les plus nombreux, que la religion (qu'ils appellent croyance) doit être cantonnée à l'espace privée. Et puis il y a les gens qui s'intéressent aux faits, et qui remarquent que l'homme est un être en quête de sens, un sens qui ne peut être absolument trouvé dans la seule satisfaction des besoins matériels. Et ils se demandent si ce besoin peut trouver un moyen d'expression dans l'espace public. Le sens, les uns le trouvent dans le sport, d'autres, dans les arts, dans la politique, certains encore dans le travail intellectuel ; pour d'autres encore, dont le nombre croit, le sens sera trouvé dans le recours aux voyantes, aux gourous, à l'astrologie, à la numérologie, au yoga, à la méditation zen, aux pratiques bouddhistes. Un observateur minutieux de la société française contemporaine ne peut que constater cette soif de sens de nos concitoyens, soif qui renvoie l'homme à sa finitude et lui révèle, pour autant qu'il ait le courage et l'honnêteté de le faire, son désir d'infini ; en même temps, l'observateur verra l'émiettement des efforts dans la quête du sens. Ce désir-là d'infini, on le trouve dans une forme à la fois touchante et populaire, qui fait rimer amour avec toujours. Je suis du reste tout près à accorder aux tenants du laïcisme pur et dur cette tension vers le sens ; souvent ce sont des hommes et des femmes dévoués et généreux, ouverts à la détresse des pauvres. Qu'ils le veuillent ou non, ils sont sur un chemin de sens qui est un chemin spirituel.
Or les milieux qui font l'opinion publique ne croit pas à l'amour, car ils ne l'aiment pas. (Tout au plus prôneront-ils la générosité, d'une tout autre nature.) C'est pourquoi tel journal consacrera un article "au divorce sans douleur", un autre narrera les frasques extra-conjugales de telle ou telle lectrice, ou la fierté qu'elles ont trouvée à faire chuter un homme marié (je n'invente rien). Bien entendu, personne n'étudie les effets de ces campagnes et de ces pratiques sur la stabilité de la société, et sur l'efficacité du politique dans un contexte aussi libertaire. Pourquoi en effet, se soumettre aux rigueurs de la règle, quand la culture dominante baigne dans la jubilation de la transgression et l'exaltation de la jouissance ?
Il n'est alors pas étonnant que les esprits droits, souvent du reste des esprits simples, des esprits d'enfance, se tournent vers des sources de sens plus unifiantes. C'est du reste l'une des raisons essentielles du succès des églises évangéliques. Elles réfutent toute institutionnalisation, connaissent, cultivent, diffusent, interprètent la parole de Jésus, parfois en se plaçant hors de la Tradition reçue des disciples passés. Mais elles ne font pas semblant, ces églises. Et je connais nombre de chrétiens évangéliques qui sont des exemples, des témoignages.
En somme, en refoulant dans l'espace privé les grandes questions que l'être humain se pose, en se bornant à combattre les religions, en se cantonnant (souvent) à un matérialisme de bas étage, la laïcité se passe de toute une réflexion qui permettrait au politique de trouver des issues acceptables à de brûlantes questions, s'il pouvait en débattre dans l'espace public, le sien. Monsieur BADINTER a des croyances, comme les chrétiens ; il rend un culte à la constitution, en oubliant que la Loi est faite pour l'homme et non l'homme pour la Loi ; il donne l'impression que les religions sont nuisibles à la société ; mais il ne trouve aucune solution de substitution pour répondre aux questions existentielles de ses concitoyens. On n'adore pas un taux de croissance ; on ne donne pas sa vie pour le PIB ; on ne va pas en pèlerinage au Sénat ou à l'Assemblée Nationale ! Or le but du politique est de conduire l'homme à la fin qui lui est due. J'aimerais savoir quelle fin notre éminent juriste assigne à ses congénères et si finalement il est d'accord que c'est là la justification de la politique.
J'ajoute, pour terminer, que ce climat de persécution molle qui pèse sur les chrétiens, et tout spécialement sur les catholiques, va très exactement à l'encontre du but poursuivi. On attendait 15.000 jeunes sur le parvis de Notre-Dame, hier soir ; il en serait venu, (chiffre à confirmer) 50.000. Il y avait 220.000 personnes ce matin sur la Place des Invalides (chiffre de la Préfecture, ceci à l'intention de madame DROIT avec qui je préférerais dire un Notre Père que polémiquer). Plus ils critiqueront, et plus ils susciteront dans le coeur des disciples le désir de témoigner. Merci à monsieur BADINTER, merci à monsieur BLONDEL !

vendredi 12 septembre 2008

Lettre ouverte à madame Irène Droit

Madame,

Vous avez fait paraître dans le Journal Le Monde un article dont on se demande s'il est écrit par un chrétien, qui plus est un prédicateur réformé, celui que vous prétendez être. Autant il est faux de vouloir juger les événements passés à l'aune de nos valeurs actuelles, autant il est faux de projeter dans le présent des querelles qui ne sont plus.

Je voudrais que vous me donniez des faits précis qui justifient l'accusation de partialité que vous portez contre les médias français. Je ne vois dans la presse, moi, que des articles réservés et critiques, et le moins que l'on puisse dire, est que Benoît XVI n'est pas dans leurs petits papiers. La couverture médiatique de cet événement est sans doute excessive. Mais pouvez-vous nous prouver qu'elle s'est faite sous la pression de l'Église catholique ou des autorités françaises ? Pouvez-vous énumérer les règles déontologiques qui ont été violées par les journalistes, dire lesquels se sont rendus coupables de ces graves transgressions ? Avant de porter de telles accusations, il faut avoir des preuves, et des preuves vous n'en apportez pas. Vous émettez une série d'opinions, ce qui est tout à fait votre droit, mais ce sont des opinions, et comme beaucoup de nos esprits contemporains, vous les transformez en faits avérés. Et je trouve cela désolant pour l'image que les chrétiens peuvent donner du Christ, leur Seigneur, le vôtre comme le mien.
En quoi la laïcité est-elle menacée ? Et pourquoi faudrait-il que les disciples de Jésus manifestent les différences qui divisent les Églises, en exprimant leurs réprobations, en insistant sur les divisions, et sur les responsabilités historiques des uns et des autres. Car, madame, si des catholiques se sont montrés cruels et injustes vis-à-vis de leurs frères protestants, (croyez-bien que j'en souffre autant que vous) vous devriez aussi admettre que la réciproque fut vraie, que vos coreligionnaires se sont rendus coupables d'épouvantables massacres, que les guerres de religion ont été une horrible aberration, et une guerre civile dont nous continuons de faire les frais : votre texte en est la preuve éclatante.
Vous critiquez à l'avance, sans doute pour en limiter la portée, l'évaluation des foules qui viendront assister aux messes de l'évêque de Rome. L'événement n'a pas encore eu lieu que vous en censurez l'éventuelle relation par les médias. Qui, dotée de réflexion, et de probité intellectuelle, pourrait accepter de telles insinuations ? Ni vous, ni moi, ne savons ce qu'il en sera. Il sera temps de réagir si le mensonge (dans un sens ou dans un autre) est trop gros.
Vous êtes, madame, théologienne. Vous savez donc mieux que quiconque ce qu'il en est de l'Église mystique. Elle est une, et c'est Jésus qui le dit. J'aurais tendance à dire, du reste, que nul ne peut dire avec certitude, qui de ceux qui se disent disciples, est dans l'Église mystique. De très grands théologiens catholiques l'ont dit avant moi. La longue fréquentation que j'ai de mes frères luthériens de la Communauté Saint-Nicolas, en Alsace, me prouvent qu'ils sont des pierres vivantes de cette Eglise-là. Voilà pourquoi je trouve faible, pour ne pas dire plus, l'argumentation des 347 Eglises. Il s'agit là d'Eglises Institutions. Et non pas de l'Église mystique dont Jésus a parlé. Vous pouvez ne pas vouloir l'unité visible de cette Église mystique. Mais êtes-vous bien sûre, alors, d'être fidèle au "Qu'ils soient uns pour que le monde croit" ? L'utilisation du singulier "L'Eglise", par les médias n'est pas le fait de l'Eglise catholique, mais le leur.
Nous savons tous qu'il y a plusieurs demeures dans la maison du Père. L'unité visible ne peut être et ne sera jamais l'uniformisation que vous craignez. Ce serait du reste stupide de se priver de toutes les riches traditions des Luthériens, des Réformés ou des Orthodoxes. Sur ce point, ou bien vous êtes mal informée, ou bien vous voulez désinformer.
Enfin, vous accusez l'Église de France et le Président de la République de confondre politique et religion. Il me semble qu'en l'occurrence c'est vous qui le faites ici, et d'une manière insidieuse et, permettez-moi de vous le dire, assez peu honnête intellectuellement. Qui, à propos de ce voyage, parle de Liberté, d'Egalité et de Fraternité. Qui n'a de cesse de rappeler les principes politiques français de la laïcité et de la séparation de l'Eglise et de l'Etat, au nom de sa confession ? C'est vous madame, qui mélangez les genres. Et puisque nous en sommes à philosopher, je dirais que les supporters de la laïcité, sont essentiellement des anticléricaux, ou des athées, et qu'à ce titre, ils sont eux aussi dans une croyance. Je vous renvoie à monsieur Marc BLONDEL, un des grands promoteurs de la Libre Pensée. Outre que cette appellation est proprement stupide, elle indique bien la forme de combat que ses amis entendent mener. Comme si croire en la Parole de Jésus était devenir esclave.
Pour que mes lecteurs comprennent dans quelle contradiction vous vous débattez, je voudrais simplement citer ici la conclusion de votre pamphlet. Il leur sera loisible de constater que c'est vous qui rameutez le politique pour défendre une cause, celle des Réformés, qui n'est nullement menacée.
"Alors ne laissons pas submerger insidieusement cette belle victoire de la liberté sous un flot de tiédeur consensuelle. L'évêque de Rome doit passer quelques jours en France. Ressaisissons-nous, pour que les médias retrouvent tout leur professionnalisme - la République toute sa vigilance pour le respect de la laïcité - et les protestants toute leur rigueur intransigeante. Ainsi nous pourrons dire tous ensemble : Tous les chemins ne mènent pas à Rome. Et certains d'entre nous auront envie d'ajouter : Dieu merci."
Les lecteurs du Monde mérite mieux que ce mauvais message. Et vous ne servez pas l'Église mystique en le publiant. Pour que vous compreniez que je ne suis pas le sectaire que vous pourriez penser, je vous renvoie à mon précédent billet où je rappelai l'héroïque attitude de Marie DURAND, et les droits imprescriptibles de la conscience. Vous conviendrez avec moi que s'ils le sont pour vous, ils le sont aussi pour ceux qui ne partagent pas vos analyses.
Soyez assurée, madame, et malgré que j'en aie, de toute mon amitié fraternelle.
Philippe POINDRON

Les modes de pensée contemporains

Parmi les nombreuses tares qui me semblent affecter les modes de pensée contemporains, il en est deux qui me paraissent corruptrices de toutes réflexions. La première consiste à juger les événements d'hier comme s'ils dataient d'aujourd'hui. C'est là le résultat de l'idéologie. On juge avant de collecter les faits, et quand on en a, on leur applique un système d'analyse préfabriqué. C'est se fermer à toute compréhension profonde de l'histoire, et de plus, c'est d'une rare malhonnêteté intellectuelle. Pour comprendre, il faut d'abord savoir ce que les contemporains des faits en disent et ce qu'ils disent d'eux-même. Il est très facile, et juste, du reste, d'appeler DIDEROT et VOLTAIRE à son secours, quand on veut condamner l'Église catholique de l'Ancien Régime. Il serait intéressant de savoir ce qu'en disent non seulement d'autres écrivains éminents, mais aussi le peuple des croyants. Nous avons peu de documents sur cette question, et c'est bien dommage. Il nous faut donc collecter des faits : que faisaient les évêques, les prêtres, les moines ? Comment les fidèles vivaient-ils les prescriptions (qui nous paraissent aujourd'hui bien pesantes) de l'Église en matière de sexualité ? Et ne serait-il pas juste de les comprendre dans le contexte d'une mortalité infantile effrayante ? (La durée moyenne de la vie humaine était de 29 ans en 1789 ! ). On peut remonter plus haut et s'effrayer du droit de vie ou de mort que les pères de familles romains avait sur leurs enfants. Mais pour comprendre l'existence d'une telle pratique, il faut s'interroger sur les devoirs qui incombaient au pater familias.Etc., etc.
La deuxième tare, tout aussi corruptrice, consiste à isoler des faits de leur causes, et à les juger sans les replacer dans un contexte diachronique. C'est là l'enfant adultérin de la culture médiatique et de la marchandisation des savoirs. Un fruit de l'instantanéité de nos émotions. L'exemple typique et actuel est celui de Bernard TAPIE qui, manifestement, a été victime de goujats financiers. On n'en veut rien savoir. Le pouvoir d'achat des citoyens est en berne ! TAPIE n'a donc droit à rien, même s'il a été floué. En remontant plus haut, et pour prendre un autre exemple, celui de Gaspard de COLIGNY, fameux protestant qui fut assassiné lors des massacres de la Saint Barthélémy, on oublie de signaler que ce martyr de la cause avait fait brûler vif quelques centaines de paysans catholiques, en PERIGORD (à LA CHAPELLE FAUCHER, très exactement), qu'il dévasta la GUYENNE et le LANGUEDOC, et que le meurtre de ce grand seigneur aurait pu avoir pour mobile le désir de vengeance. Inversement, on justifiera les exactions des Dragons du Roi dans les Cévennes pour des raisons politiques, alors que le fond de la question est tout différent : il s'agit des droits imprescriptibles de la conscience, revendiqués à juste titre par les huguenots. On se souviendra alors de Marie DURAND, qui écrivit sur les murs de sa prison, à AIGUES-MORTES : Résister. Et il est bon ici de rappeler que, bien des siècles avant, Jean CHRYSOSTOME, Père de l'Église d'Orient, avait dit : Même si je dois être excommunié, je dois suivre la voix de ma conscience. Cette sentence n'a jamais été contestée ni abolie par aucune autorité dans les Églises d'Orient ou d'Occident. Tout cela mérite donc d'être pesé, examiné, et interprété avec toutes les nuances qui s'imposent, et la plus grande rigueur intellectuelle.
Bref, les deux plus grandes tares des modes de pensée contemporains est qu'elles empêchent l'éclosion d'une vraie pensée et qu'elles favorisent le foisonnement des idéologies. C'est proprement insupportable, et tout le monde a l'air de s'en f...

jeudi 11 septembre 2008

Larmes de crocodiles

On se frotte les yeux. On se pince les avant-bras. On croit rêver. Les belles âmes, socialistes en tête, se scandalisent de voir que le contribuable doit rembourser à monsieur TAPIE 285 millions d'euros, des intérêts de retard, et une somme de 45 millions pour préjudice moral. L'ancien responsable du Consortium de réalisation, puis le Président du Crédit Lyonnais qui a succédé à monsieur HABERER, monsieur PEYRELEVADE y vont de leur étonnement, de leur protestations, de leurs insinuations. Ils ont la mémoire très, très courte. Il convient sans aucun doute de la leur rafraîchir.
Quand monsieur TAPIE était ministre du Président MITTERRAND, les éléphants, éléphanteaux, et momies d'éléphants n'avaient assez de mots pour louer un homme qui clouait le bec à Jean-Marie LE PEN, et contribuait au dézingage de Michel ROCARD. Patatrac. Il apparaît que tout n'est pas net dans les comptes du ministre. Ils commencent à se détourner de cet homme qui fut bien utile à la réalisation de leurs petites combines. Et puis voilà qu'après un procès qui n'en finit pas (il dure depuis 15 ans) et pour mettre fin à une procédure douteuse, devant - il faut le rappeler - les jugements contradictoires de diverses juridictions, le dernier étant, il est vrai, défavorable à monsieur TAPIE, on a recours à la procédure parfaitement légale de l'arbitrage. Monsieur TAPIE, qui ne cache pas sa sympathie pour monsieur SARKOZY, n'en est cependant pas l'ami, ce qu'il a le courage public de regretter ; il est accusé d'avoir bénéficié de la faveur du Prince. C'est faire bon marché de l'honneur des arbitres qui sont connus pour leur probité et leur bon sens. Rien n'y fait. Il est le parfait bouc émissaire de ces petits bonshommes. René GIRARD analyserait fort bien la situation si envie lui prenanit de remuer cette boue. On démolit toujours celui qui vous ressemble ou qui vous a ressemblé. C'est la rivalité mimétique.

J'ai dit que je rafraîchirai la mémoire de ces peu reluisants amnésiques. Voici un article tiré d'internet (je n'en ai pas trouvé la référence malheureusement).

COMBINES ET « TRICHERIES » DE L’ÉTAT DANS L’AFFAIRE DU CRÉDIT LYONNAIS.

La mise en examen de Jean-Claude Trichet pour "diffusion de fausses informations au marché, présentation et publication de comptes sociaux inexacts" est symptomatique de la "corruption" du secteur bancaire français par les hommes de l’Etat. Il doit être clair qu’au-delà du rôle de quelques hauts fonctionnaires dans les artifices comptables pour cacher les pertes de la "plus grande banque européenne", c’est l’Etat-actionnaire et gestionnaire et le système d’entreprises publiques qui devraient se retrouver au "banc des accusés".
Les faits reprochés dans le cadre de l’enquête sur les comptes du Crédit Lyonnais en 1992 et 1993 à Jean-Claude Trichet, actuel gouverneur de la Banque de France, remontent à l’époque où il était directeur du Trésor. Après les plaintes en 1996 du Ministre des finances Jean Arthuis et d’Alain Géniteau (actionnaire minoritaire du Lyonnais) et les perquisitions à la Banque de France et au Trésor, le haut fonctionnaire est soupçonné d’avoir participé au "maquillage" du bilan du Crédit Lyonnais.
Représentant l’Etat (actionnaire majoritaire de la banque) et avec l’appui de ses collègues du Conseil d’administration, il aurait tout simplement dissimulé en 1992 les pertes en sous-évaluant de 50% les risques-pays (correspondant à des pertes liées à des investissements effectués à l’étranger) et en prélevant 3,6 milliards de francs des provisions de l’année précédente. Résultat de l’artifice : le Crédit Lyonnais a affiché pour l’exercice 1992 seulement 1,8 milliards de francs de pertes au lieu de 45 milliards.
En dépit de ce "lifting" comptable, la banque publique continuera à accuser des pertes (7 milliards de francs en 1993 et 12,1 milliards en 1994) et frôlera la "mise en faillite" par la Commission européenne en 1998.
Même si ce scandale bancaire du siècle présente une certaine complexité financière et comptable, le contribuable ordinaire peut et doit comprendre les véritables causes de l’échec du Crédit Lyonnais, qui est un échec de l’Etat-gardien de l’intérêt général, de l’Etat-banquier et de l’Etat-actionnaire.
(1) Tout d’abord, il faut se rendre à l’évidence qu’en réalité, le système d’entreprises publiques (nationalisées) et le capitalisme d’Etat (certains préfèrent la notion de socialisme) permettent à une petite élite, tels un Jean-Yves Haberer (président du Crédit Lyonnais entre 1988 et 1993), un Jean-Claude Trichet ou un Jean-Louis Butch (secrétaire général de la Commission bancaire en France), de faire valoir, aux dépens du contribuable, leurs intérêts et ambitions personnelles. On est très loin de l’Etat-gardien d’un intérêt général quelconque. Quelle belle leçon de morale publique que de se mettre dans l’illégalité aux Etats-Unis pour affaires frauduleuses et de se commettre avec les escrocs.

(2) Ensuite, l’Etat s’avère un mauvais gestionnaire et un très mauvais banquier. Un système nationalisé, à la différence du système de banques privées, pousse logiquement à l’irresponsabilité. Le banquier fonctionnaire n’est pas la meilleure formule pour inciter le dirigeant à bien gérer les risques et le patrimoine de la banque.

(3) Enfin, l’Etat-actionnaire est un mauvais "propriétaire". Alors que théoriquement les entreprises publiques, comme le Crédit Lyonnais, sont la propriété de chaque citoyen, en réalité, une telle forme de propriété publique est source d’inefficacité et de gaspillages.

Ainsi, si l’affaire du Lyonnais fut possible, c’est parce que l’Etat, actionnaire majoritaire et propriétaire de jure et de facto (ayant le pouvoir de contrôle), n’a pas agi correctement pour limiter les dégâts (à la différence des propriétaires et actionnaires privés d’une banque qui sont incités à chercher les informations et à sanctionner la mauvaise gestion). La collusion des parties, responsables de la gestion de la banque (Trésor, Banque de France, Ministre de l’économie, Commission bancaire) s’est faite aux dépens des véritables propriétaires théoriques—les citoyens—qui en définitive vont payer la facture. Et des gadgets, comme la création en 1995 du Consortium de Réalisation (assumant les pertes du Crédit Lyonnais) n’y changeront rien : les Français devront débourser dans cette aventure au moins 100 milliards de francs.
Mais les conséquences de ce scandale vont au-delà des frontières hexagonales. En effet, la mise en examen de Trichet, qui a été désigné comme le successeur de Wim Duisenberg à la tête de la Banque Centrale Européenne à la mi-2002, ne fait que rendre plus incertaine la gestion future de la monnaie unique et renforce la méfiance des opérateurs sur le marché des changes vis-à-vis de l'euro. L'affaire du Crédit Lyonnais n'aura contribué qu'un peu plus à sa chute spectaculaire.
En conclusion, le bon sens et la justice exigent que l’Etat et les politiques se désengagent du domaine bancaire et financier. Liberté, droits de propriété privée dans le domaine de la banque et responsabilité bancaire vont ensemble et sont indissociables.

Ce sont les responsables du CDR - cette structure censée gérer les pertes du Crédit Lyonnais -pertes dont ils connaissent et l'origine et les raisons, qui essayent de se refaire une virginité en accablant un homme seul, abandonné de ses anciens amis, et désigné à la vindicte de la populace au point qu'il a dû inscrire ses enfants à l'école sous un nom d'emprunt pour qu'ils n'aient pas à souffrir d'un opprobre immérité. Les salauds ont de beaux jours devant eux. Je n'ai pas de sympathie particulière pour monsieur TAPIE. J'essaye de partir des faits, de raisonner, et non d'insinuer, d'amalgamer, de nuire venimeusement. Décidément, ces accusateurs de bas étages ne méritent pas notre estime et monsieur TAPIE a droit à ma compassion. Je n'aime pas voir un homme pleurer parce qu'il est accablé par l'injustice populacière et médiatique.
Et si j'utilisais les méthodes d'insinuation de ces pauvres types, je laisserais entendre que monsieur PEYRELEVADE a tout intérêt à insinuer que le Président de la République a arrangé l'affaire ; il est le Vice-Président du MoDem, c'est-à-dire le porte-parole de monsieur BAYROU ; que monsieur AUBERT, l'ancien Président du CDR, ne tient pas à aggraver les comptes de cette structure de liquidation, et que les éminences socialistes - et ils sont là très imprudents - comptent mettre au débit de l'actuel Président de la République, leurs erreurs et leur mauvaise gestion des affaires, quand ils étaient au pouvoir. Mais hélas, je crois qu'ils sont tous de bonnes foi. Et c'est bien cela qui est grave. Leurs vraies larmes à eux sont des larmes de crocodiles.


Un prophète et un volcan

Ah ! Cher Léon BLOY, si vous étiez encore de ce monde, j'irais à votre porte frapper tous les jours, au lever du soleil, et je ne vous quitterais point de la journée, suspendu à vos lèvres. Comme j'aimerais que vous fussiez encore parmi nous. On vous entendrait dire des choses formidables, tonitruer, démonter les systèmes idiots qui nous enferment en un monde clos, sans perspectives et sans issues. Vous l'avez dit : tout était en germe en ce fatal XVIIIe S. qui vit s'annoncer l'écroulement de notre pays.
Lors de l'avènement de IIIe République, née dans la défaite et la guerre civile, vous disiez en cette langue de feu qui n'appartient qu'à vous, ceci que je livre avec délice à mes lecteurs :
La décrépitude originelle de cette bâtarde de tous les lâches est à faire vomir. Jézabel de lupanar, fardée d'immondice, monstrueusement engraissée de fornications, toute bestialité de goujat s'est assouvie dans ses bras et elle ressemble à quelque très antique Luxure qu'on aurait peinte sur la muraille d'une hypogée.
Vous n'auriez point été étonné de la voir finir dans le déshonneur, inscrit dans ses origines même, celui d'un Congrès de parlementaires tremblants de peur, qui abandonnaient entre les mains d'un Maréchal cacochyme - qui fut glorieux, mais osa serrer la main de l'absolu tyran à MONTOIRE - un pouvoir qu'ils disaient tenir du Peuple. Lâche soulagement. Honte que nous devons assumer, sans pouvoir rien y changer.
Sans parler de l'éphémère IVe, dont les pantalonnades faisaient les choux gras des chansonniers, nous voici dans la Ve. Son fondateur avait de hautes vues. C'est le dernier Grand Français. Les successeurs ont jugé utile de changer les règles de son fonctionnement (on ne compte plus les modifications constitutionnelles qui toutes ne sont pas mauvaises, mais donnent finalement l'impression de rafistolage). Faut-il lui prédire une fin analogue à celle de toutes les républiques antérieures ? On ne le souhaite pas. Mais au train où vont les choses, on se pose quand même des questions.
Au secours, cher prophète ! Au secours, cher volcan ! Au secours, cher Léon BLOY ! Vous dénonceriez sans complaisance les fumées que Satan répand sur le monde. Et vous célébreriez tous ceux qui, marqués du sang de l'Agneau, ont donné sa vie pour Lui.

mercredi 10 septembre 2008

Ils ont eu tort de le descendre en plein vol

On se souvient sans doute des coups tordus que le Président MITTERRAND conçut contre Michel ROCARD. Il le détestait. Et il n'avait pas admis que cet honnête homme puisse vouloir se présenter aux élections présidentielles, dont son ego pensait que lui seul, François, pouvait y prétendre. Et pourtant... Michel ROCARD est sans doute l'un des rares socialistes à avoir aujourd'hui une pensée, à regarder en face le réel et à respecter ses adversaires politiques. Il vient de publier dans Le Monde d'hier un article dans lequel il apporte son soutien à Bertrand DELANOE. Bien que je ne partage pas, pour des raisons philosophiques, les options de monsieur ROCARD, j'ai pour lui du respect, et une certaine admiration. Voici un extrait de la déclaration qu'il a faite en compagnie de quelques amis. J'en ai souligné les aspects les plus importants à mes yeux, par des lettres en gras et italiques.
"En 2012, les Français ne choisiront pas le plus habile manœuvrier d'entre nous, mais se détermineront sur le contrat économique et social que nous leur proposerons, et sur l'authenticité de notre comportement.

Il faut, pour cela, qu'un certain nombre de conditions soient réunies, et vite. D'abord, parler vrai. Ne pas cacher la gravité de notre situation économique et sociale, regarder le monde tel qu'il est, de plus en plus dangereux et instable, y compris à nos portes. Prendre conscience de l'immense fracture qui continue d'exister entre ceux qui s'appauvrissent et ceux qui s'enrichissent au sein de chaque nation et entre les nations.

Ne pas, pour des hommes et des femmes de gauche, se voiler la face devant un capitalisme en mutation, en permanente dilatation, de moins en moins industriel, de plus en plus financier. Bref, un capitalisme qui crée les conditions d'une très grave crise économique, écologique et humaine.

Ne pas, non plus, se payer de mots et ignorer l'état dans lequel l'Europe est plongée à la suite des non français et néerlandais puis irlandais. Bref, dire aux Français que ces réalités demandent autre chose que la répétition des recettes d'hier.

Il faut ensuite être cohérents. Si nous croyons que pour peser dans la mondialisation, pour assurer une régulation mondiale, il faut s'arc-bouter sur l'Union européenne, alors, malgré les difficultés, nous devons réaffirmer clairement que l'avenir de la France est indissolublement lié à l'avenir de l'Europe.

Il nous faudra inlassablement et modestement reprendre contact avec tous nos partenaires pour relancer une dynamique européenne, plus proche des réalités des citoyens mais aussi plus ambitieuse en terme de justice, de démocratie et de politiques communes d'avenir.

Si nous souhaitons rappeler notre attachement à un modèle de développement qui assure une croissance régulière, durable, fondée sur l'économie de la connaissance et respectueuse de notre environnement, alors, il nous faudra présenter des options qui ne reculent pas devant les réformes structurelles. Ne pas semer l'illusion qu'on peut distribuer ce qu'on n' a pas produit.

Ne pas cacher que nous devons prendre à bras-le-corps les problèmes de la désindustrialisation, de la maîtrise de nos déficits et proposer les indispensables investissements pour la petite enfance, pour les familles pauvres, pour les étudiants, les chercheurs, les milliers de jeunes oubliés sur la route et nos territoires urbains ou ruraux marginalisés.

C'est donc avec courage qu'il faut prendre parti sur des sujets difficiles, s'engager, notamment, sur la maîtrise de toutes les formes d'énergie non liées aux hydrocarbures y compris le nucléaire, et sur la réforme de l'Etat et des services publics.

Enfin, être fidèle à soi-même. Sur tous ces points, nous avons travaillé au sein du courant Socialisme et démocratie que nous avons cofondé; nous avons régulièrement avancé des propositions, notamment au moment de la candidature de Dominique Strauss-Kahn, dont les grandes orientations intellectuelles sont toujours les nôtres. Nous pensons toujours qu'il est impossible de séparer les propositions et les idées de la démarche à suivre.

C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas accepté de nous diluer dans des ensembles indistincts où se gommeraient, comme par miracle, les vrais clivages de fond et de pratique politique. Comment être compris des militants et des Français quand on varie au gré de ses seuls intérêts tactiques ?
Pour reconstruire le PS, nous avons besoin de la présence à sa tête d'une autorité incontestable, qui certes, écoute et débat, mais aussi tranche.
Nous avons besoin d'une seule voix qui porte nos convictions, pas de dix porte-parole qui organisent la cacophonie. Nous avons besoin que se dégage, dès le 23 septembre, lors du conseil national une motion claire et homogène ayant vocation à arriver en tête du vote militant et à constituer le pôle majoritaire. Besoin, simplement, d'une partition et d'un chef d'orchestre.
Pour cela, nous appelons tous ceux qui se sont reconnus dans les idées de Socialisme et démocratie, à apporter, dès maintenant, sans se disperser dans une solution de transition, leur soutien à la démarche entreprise par Bertrand DELANOË."
C'est là le discours d'un homme d'Etat qui allie le souci de prendre en compte le réel à celui de la justice, qui ne plaide pas pour un égalitarisme gros de violence et de rancoeurs, mais se bat simplement pour que les pauvres, les vrais, puissent manger et ne point survivre comme des animaux traqués (et je suis d'accord avec lui sur cet objectif). Les socialistes mitterrandiens ont eu tort de flinguer en plein vol Michel ROCARD. Ils seraient encore au pouvoir, s'il lui avait reconnu ces qualités. Mais monsieur ROCARD était honnête, naïf dans le bon sens du terme ; il ne clapotait pas dans les marigots des motions, courants, conciliabules et autres luttes éléphantesques. Il avait dit la vérité. Ils l'ont exécuté.

Triste héritage

On m'accordera que RENAN n'était ni un calotin ni un cul béni. Homme fort savant, spécialiste des langues sémitiques anciennes, il avait de la hauteur de vue et de la sympathie, pour ceux-là même dont il n'approuvait pas les idées. Il est donc tout à fait intéressant de lire ce que ce grand esprit disait dans la préface des Questions contemporaines (1868), à propos de la Révolution sur laquelle il avait jeté le plus lucide des regards :
Avec leur mesquine conception de la famille et de la propriété, ceux qui liquidèrent si tristement la banqueroute de la Révolution dans les dernières années du XVIIIe siècle préparaient un monde de pygmées et de révoltés. Ce n'est jamais impunément qu'on manque de philosophie, de science et de religion. Comment des juristes, quelque habiles qu'on les suppose, comment de médiocres hommes politiques, échappés par leur lâcheté aux massacres de la Terreur, comment des esprits sans haute culture, comme la plupart de ceux qui composaient la tête de la France, en ces dernières années décisives, crurent-ils résolu le problème qu'aucun génie n'a pu résoudre : CRÉER ARTIFICIELLEMENT ET PAR LA RÉFLEXION l'atmosphère où une société peut vivre et porter tous ses fruits (les majuscules sont de votre serviteur).
Voilà le vice originel de notre pensée politique actuelle : croire qu'il suffit d'avoir des idées, sagement ordonnées en un système lisse et supposé dépourvu de contradictions, pour fonder un régime durable, accordé au désir des citoyens, et au but de la politique (qui consiste, on le rappelle, à conduire les hommes à la fin qui leur est due). Ils étaient non seulement cruels et lâches, ils étaient aussi aveugles tous ces petits bourgeois, de la Terreur au Consulat, en passant par le Directoire. Ils nous ont préparé une patrie où il ne ferait plus bon vivre, et qui verrait les meilleurs de ses enfants s'exiler pour respirer et vivre, une patrie qui ne cesserait de perdre de l'influence au cours des années et de l'éclat, et qui finirait par se résoudre en paillettes de pouvoir d'achat, de travail du dimanche, de RTT, de Star Ac, de Ségolène et de Nicolas. Misère de misère ! Où est-il le temps où l'art et la science se faisait à Paris ? Où notre langue était admirée et parlée par les savants de toute l'Europe ? Voilà à quoi ils nous ont réduits : à borner notre désir à celui de devenir (à leur image) des petits bourgeois avides, envieux, rétrécis. J'ai en horreur cette vision atomisante de l'homme, cette vision qui anéantit tous les liens qu'une société pragmatique et riche d'une expérience multiséculaire a tissé, n'en gardant que les meilleurs et les plus solides. Triste héritage que celui de la Révolution. Quand aurons-nous le courage d'en faire l'inventaire et d'en tirer les conséquences ? Il n'est que temps si le mot France nous fait encore vibrer.

mardi 9 septembre 2008

Au risque de choquer

Au risque de choquer mes (rares) lecteurs, je fais mien ce que dit Gustave THIBON dans son Diagnostics. Essai de Physiologie sociale. Avant de commenter ce constat lucide, je le cite dans son ensemble :
C'est un fait : jamais peut-être, d'une classe à l'autre de la société ou entre hommes de niveau culturel différent, on n'avait observé tant de distances et si peu d'échanges. L'influence humaine, positive des élites sur le peuple est maintenant voisine du néant. On avait cru pourtant - et ce fut un des mythes majeurs du XIXe siècle - que la fraternité, la communion symphonique des hommes naîtrait du relâchement de l'esprit de classe et, à la limite, de la suppression des barrières sociales. Mais ce qui arrive n'est paradoxal qu'en apparence. La confusion n'unit pas, elle sépare : elle crée entre les éléments confondus des oppositions irréductibles. Toute réciprocité d'influence implique une solide diversité de nature et de position. C'est dans les sociétés fortement diversifiées et hiérarchisées, où le passage d'un étage à un autre est très difficile, voire impossible, que s'établissent entre les membres de ces hiérarchies, les échanges les plus féconds et les plus durables.
Avant de s'emporter, de pester contre ce vieux réactionnaire de Gustave THIBON, il me paraît utile de se poser quelques questions. Égalité ! Égalité ! crie la populace (que je n'aurai garde de confondre avec le Peuple). Elle se fait l'écho de toute une classe de politiciens qui ne cessent de gloser sur les inégalités, les commenter, critiquer les distinctions sociales, non pour les combattre, mais pour les utiliser à des fins impures : la prise du pouvoir, et rien que cela. En général, leurs petites réunions se tiennent dans des bistrots chics, et l'on trouve autour de la table des normaliens, des énarques, des professeurs (notamment en Sciences Politiques), toutes personnes fort honorables certes, mais qui ont peu de points communs avec un salarié, un ouvrier, ou un fonctionnaire subalterne. Abolissant en esprit la distance qui les sépare de ces citoyens moins favorisés, avec lesquels ils ne fraient point, si ce n'est en paroles, ils feignent de se mettre à leur place en ignorant tout de leurs préoccupations, de leurs angoisses, de leurs désirs profonds. Et ils inscrivent dans les esprits le "Pourquoi pas moi ?" de l'envie la plus basse.
Mais qui de ces jeunes, désolés de leur maigre situation et de perspectives d'avenir bouchées, aurait passé ses vacances à travailler physique ou mathématiques ou anglais, pour préparer la future année scolaire, comme l'a fait un de mes neveux, dont la famille n'est pas spécialement fortunée ? Qui, parmi les revendicateurs, aura profité des six mois de gratuité de nombreux musées nationaux, pour se cultiver, profiter des conférences explicatives, commencer à rentrer dans le monde enchanté de la culture ?
Il n'est pire démagogie que de laisser croire à une ascension sociale automatique, garantie par le seul jeu des lois, de la redistribution des ressources, et de l'abolition artificielle des barrières de classe. S'élever dans l'échelle de la société, réclame efforts, ascèse et responsabilité accrue vis-à-vis de ses concitoyens. L'objectif n'est pas de consommer plus, ni même de gagner plus (fatale erreur), mais d'être plus, plus libre, plus fraternel, plus bienveillant, plus ouvert, plus généreux, plus partageur, plus responsable. Loin de moi l'idée que ces vertus ont déserté le Peuple. Bien au contraire. (Un peuple sain regorge de vitalité, et de richesse humaine. Le rôle du politique est de la détecter et de la mettre au service du pays.) La véritable égalité, selon moi, est de donner à ceux de ses fils qui en présentent le désir et les aptitudes, les moyens, tous les moyens pour réaliser en acte.
Tout le reste est littérature. L'homme n'est grand que s'il est responsable. La responsabilité peut être plus ou moins avérée selon les cas ; mais elle n'est jamais nulle. Mettre sur le compte de la société la totalité des misères qui frappent tel ou tel relève en partie de l'imaginaire. Qu'il y ait des conditions sociales qui favorisent ou défavorisent l'évolution des vies humaines est l'évidence même. Mais il n'y a pas d'automatisme. Et la bonne question que l'on devrait se poser est la suivante : pourquoi, dans des familles à conditions socio-économiques défavorisées, y-a-t-il des jeunes gens et jeunes filles qui développent des talents de tous ordres, réussissent fort bien dans leurs études, font une brillante carrière et restent simples, ouverts et bienveillants ? Pourquoi ? J'en connais, et plus d'un. Si l'on arrivait à trouver des réponses scientifiquement fondées à cette question, on aurait fait faire bien des progrès à l'éducation et à la politique.