vendredi 31 octobre 2008

Citoyens responsables

J'ai beaucoup aimé l'article publié dans le magazine La Vie (semaine du 22 au 28 octobre 2008). Intitulé Les dix commandements du citoyen responsable, il donne quelques indications claires et pratiques sur les comportements qu'il convient d'appliquer en ces temps de crises. Je les résume :
-Ne pas retirer ses économies par peur.
-Se refuser à spéculer.
-Ne pas acheter d'or.
-Ne pas retarder ses projets immobiliers.
-Privilégier l'épargne solidaire.
-Regarder où est son prochain (très belle évocation de la question posée à Jésus : Qui est mon prochain ? question à laquelle Jésus répond par la parabole du Bon Samaritain qu'il conclut par une question : De qui cet homme (le blessé pris en charge par le Samaritain) a-t-il été le prochain ?
-Soutenir la création d'échange et de troc.
-Faire l'effort de comprendre.
-Pratiquer la sobriété intelligente.
-Demander aux politiques de trouver des alternatives.
J'ai beaucoup aimé cet article, car, selon moi, il traite de questions politiques et économiques avec une très belle hauteur de vue, en liant - ce que je ne cesse de faire avec ce Blog depuis sa création, trois aspects importants de la vie : l'honnêteté intellectuelle (comprendre), la politique et l'économie (solliciter les politiques, ne pas spéculer), et la vie morale (épargne solidaire, prochain). Il sollicite aussi bien l'intelligence que la sensibilité et la volonté, ces trois facultés qui font l'homme. Il lie la pensée à l'action.
Et j'aime bien qu'en bandeau il rappelle ceci :
Quand la finance prétend être sa propre fin et n'est plus animée que par le désir exclusif du profit, elle perd la tête. Quand le souci de l'homme, de tout l'homme et de tous les hommes, redevient prioritaire, la confiance renaît. (Déclaration du Conseil des Évêques pour les questions familiales et sociales du 8 octobre 2008.)

mardi 28 octobre 2008

Impartiaux les journalistes ? Mon oeil !

Le patron de la communication gouvernementale, Thierry Saussez, a indiqué lundi qu’il "réfléchissait à une émission gouvernementale à la télévision". Ce projet est "à l’étude", a-t-il indiqué en précisant qu’il aimerait que l’émission soit diffusée "dans l’idéal sur le service public". "Mais c’est ouvert", a-t-il ajouté.
Comme des vierges effarouchées, les journalistes de l'audiovisuel protestent.
La Société des Journalistes de France 2 proclame :
"Nous avons des mauvaises fées qui se penchent sur notre avenir. Après Frédéric Lefevre (un des porte-parole de l’UMP) qui estime que le départ de salariés de France Télévisions est évidemment nécessaire, la garde rapprochée du chef de l’État anticipe les futurs programmes avant même que le parlement ait statué".
Carole Petit, déléguée SNJ de France Télévisions, se dit"sidérée", et elle ajoute : "ce genre de proposition est très grave. C’est de la communication officielle et c’est comme si les journalistes ne faisaient pas leur métier d’explication".
"Quand on voit déjà la pression qui existe dans la loi sur l’audiovisuel avec la désignation-révocation du président de France Télévisions par l’exécutif, on n’est pas surpris par ce genre de proposition".
Ces journalistes-là nous prennent pour des pommes. S'ils faisaient correctement leur métier, ils ne connoteraient pas leur discours par des adjectifs et des verbes qui insinuent, suggèrent, jugent, et dénaturent les positions d'un gouvernement qu'ils exècrent, en faisant mine d'être impartiaux. Qui sont-ils donc ces gens qui prétendent que leur commentaires sont des plus objectifs ? J'ai donné dans mes billets de nombreux exemples de commentaires biaisés, pour ne pas dire mensongers. Et pourquoi faudrait-il que les journalistes soient au-dessus des critiques ?
Une information impartiale, et il arrive qu'elle le soit avec certains journalistes des chaînes publiques comme privées, consiste (a) à citer ses sources ; (b) à laisser le pouvoir exprimer ses propositions et les expliquer ; (c) immédiatement après la présentation de la position du gouvernement, à laisser la parole pour des temps égaux et successivement, aux représentants de la majorité et de l'opposition, sans débats ni discussion.
Le pire des mensonges a été la présentation du paquet fiscal par ces soi-disants juges autoproclamés de la justice. J'ai déjà dit que la mesure concernant le bouclier fiscal n'était pas des plus judicieuses sur le plan symbolique et pratique. Mais il aurait été juste et conforme à la vérité de souligner que la majeure partie des dispositions du paquet fiscal concernait les emprunts et les droits de succession, et qu'elles intéressaient les ménages aux revenus moyens, et non pas les riches et les grossiums. En outre, il faudrait s'interroger sur la portée économique et budgétaire réelle de ces allègements fiscaux. Il me paraît nettement plus anormal que 7.000 grosses fortunes ne paient aucun impôt au motif que leurs possesseurs se font construire des villas dans les DOM-TOM ou y ancrent des yachts. Et si l'on instaure un plafond, il serait bon aussi qu'il y ait un plancher.
Quand l'idéologie se mêle de la vérité et se moque des faits, elle ravage l'opinion. L'envie est très mauvaise conseillère ; l'exemple silencieux est certainement plus efficace. Moins de "paroles verbales", plus de partages réels et silencieux, plus de mesures, d'analyse, et de réflexion. Voilà ce que l'on est en droit d'attendre d'un journaliste qui fait bien son métier.
Alors, impartiaux, les journalistes des chaînes de télévision ? Mon oeil !

lundi 27 octobre 2008

Economie du bonheur

Lu ce matin, dans Métro, le journal gratuit, un petit entrefilet qui laisse rêveur. Des chercheurs de l'Université du Michigan ont montré que "sur une longue période, le sentiment du bonheur reste stable alors que le pouvoir d'achat augmente". Des économistes ont défini les facteurs qui doit être pris en compte pour parvenir à ce sentiment lequel va engendrer, selon eux, l'émergence d'un nouveau modèle : "la santé, la satisfaction au travail, les enfants, le sentiment de liberté, l'adhésion à des valeurs". L'entrefilet ajoute que les Français sont les derniers dans l'Union Européenne sur "tous ces indicateurs de bien-être". Philippe MOATI commente ainsi ces résultats : "Ils [les Français] sur la question du pouvoir d'achat, des angoisses existentielles. Certains veulent consommer pour remplir un vide".
Il me semble que ces modestes données devraient être prises très sérieusement en considération. Nous vivons une crise des valeurs et une valeur, disait mon cher LANZA del VASTO, est une quantité de qualité. Or nos hommes politiques, de droite comme de gauche, font dans la quantité, dans les chiffres, dans les statistiques. Ce que veulent nos contemporains, obscurément mais fortement, ce n'est pas avoir plus, mais être plus, c'est-à-dire trouver du sens à leur vie. Si l'on se souvient que le sens est un acte qui tend à apaiser une tension intérieure, en en dévoilant une autre en même temps, une autre qui n'est pas quelconque, alors on comprend que l'acte apaisant ne peut être quelconque, et que la succession d'actes ne l'est pas non plus. Je renvoie le "travailler plus pour gagner plus" de la droite au "et le pouvoir d'achat ?" de la gauche au magasin des illusions, du penser faux, d'une anthropologie croupion. L'homme a autant besoin de relations que de pain. Et être en relation n'est pas être en communication. La relation suppose l'existence de deux sujets symétriques. A creuser si l'on cherche à développer l'économie du bonheur. Mais il y faut du courage. Sans doute la course à l'abîme continuera-t-elle jusqu'à ce que s'impose l'évidence de la fraternité ontologique des hommes, de tous les hommes, sur un pied de symétrie, et non de dépendance, qu'elle soit revendicatrice ou de domination.

samedi 25 octobre 2008

Une Parole pour aujourd'hui

J'ai trouvé dans l'Epitre aux Éphésiens l'appel de Saint Paul à ses amis d'Asie mineure. Que nous soyons ou non chrétiens n'enlève rien à la résonance de cette parole de feu : Alors nous ne serons plus comme des enfants, nous laissant secouer et mener à la dérive par tous les courants d'idées, au gré des hommes, eux qui emploient leur astuce à nous entraîner dans l'erreur.


Peut-être vous souvenez-vous que dans des billets anciens (22, 26 et 30 mai 2008 ; 26 juin 2008), je disais que nous étions rentré dans des temps d'apocalypse, mais que nul ne pouvait dire combien de temps il faudrait pour que soit LEVE LE VOILE (car tel est le sens du mot grec apocaluptein : lever le voile). Je ne pensais pas si bien dire. Il me semble en effet qu'en ces temps de crise financière, le voile commence à se lever sur notre humanité à la dérive. Si nous ne changeons pas, nous courons à notre perte.
Je ne crois pas que les solutions marxistes des problèmes économiques soient les bonnes ; je ne crois pas davantage que la spéculation financière soit capable de les résoudre. L'homme a besoin d'être le sujet de sa vie, et la liberté d'entreprendre est un des éléments qui lui permet de réaliser ses potentialités. Mais je suis bien obligé de constater que des financiers dépourvus de scrupules et s'appuyant sur une idéologie vidée de toutes considérations anthropologiques, jettent l'économie dans le chaos le plus total. Et ce chaos frappe d'abord les pauvres. Ils doivent donc, ces avides, rendre des comptes à la société des hommes, ne serait-ce que pour honorer la justice. Si cela n'est pas fait, nous courons au-devant de troubles sociaux de première grandeur.
Permettez-moi de citer ici une phrase de Jésus
Quand vous voyez un nuage monter au couchant, vous dites aussitôt qu'il va pleuvoir, et c'est ce qui arrive. Et quand vous voyez souffler le vent du sud, vous dites qu'il fera très chaud, et cela arrive. Esprits faux ! l'aspect de la terre et du ciel, vous savez le juger, mais le temps où nous sommes, pourquoi ne savez-vous pas le juger ? (Luc, 12, vv 54-55).
Avec la météo, nous pouvons prévoir le temps en effet ; mais nous ne savons pas prévoir ce que les signes économiques et sociaux qui naissent partout un peu sur la planète impliquent pour l'avenir des hommes. Ou plutôt, nous ne voulons pas les voir.
Les paroles que je vous ai citées sont des paroles aujourd'hui. Il n'y a plus de temps à perdre.

Messieurs, remboursez !

Il est sinon judicieux, du moins normal et heureux que les États sauvent ou tentent de sauver les économies menacées de ruines, dans leurs pays respectifs. Néanmoins, passer par simples pertes et profits la catastrophe financière actuelle et en faire supporter le poids aux victimes, les épargnants, est, d'un simple point de vue de la justice, inacceptable. Les dirigeants des banques faillies doivent rendre des comptes. Et puisqu'ils justifiaient leurs traitements démentiels par l'ampleur du risque qu'ils prenaient, alors qu'ils assument le risque jusqu'au bout, en reversant à leur établissement la totalité des indemnités qu'ils ont perçues. La confiance ne peut revenir sans cet acte de vertu élémentaire. Comme la noblesse de cour a ruiné la totalité de son ordre en ne vivant que de ses privilèges indus, et a plongé la noblesse provinciale (qui exploitaient honnêtement ses terres et jouissaient d'une autorité morale incontestée) dans la tourmente révolutionnaire, les grossiums de la finance déconsidèrent tous les responsables d'agences bancaires, régionales ou locales, en exhibant au grand jour leurs prétentions financières. Ils doivent rendre des comptes.
J'ai eu déjà l'occasion dans un billet précédent de vous donner quelques exemples chiffrés des indemnités données à des responsables d'entreprise après qu'ils avaient été remerciés par leur conseil d'administration. Du moins ces dirigeants avaient-ils respecté l'outil de travail. Mais les banquiers qui ont conduit leur établissement à la faillite, non !
Je propose ici à mes lecteurs de donner leur avis sur le projet qui consisterait à demander aux banquiers incapables, de restituer à leur établissement ou au liquidateur judiciaire, la totalité de leurs indemnités de départ, de leur interdire à tout jamais l'exercice d'une profession de la finance. Il me semble en effet que nous avons le droit de crier en coeur : Messieurs, remboursez !

vendredi 24 octobre 2008

La crise : de l'homme ou du système ?

Dans un article au vitriol, Maurice SZAFRAN (Trois leçons parmi tant d'autres, Marianne, N° 398, semaine du 4 au 10 octobre) fustige les responsables de la crise financière. Il le fait avec talent, quoiqu'en forçant un peu le ton. Il stigmatise ces banquiers véreux, ces traders pourris, ces financiers corrompus qui savaient pertinemment que, tôt ou tard, un jour ou l'autre, le système néolibéral, cette construction dépourvue de toute base solide s'effondrerait.
Il y a là un amalgame entre vice et système économique qui mérite d'être examiné de plus près.
Ce que le journaliste dénonce, ce sont des dérives morales : les adjectifs "véreux, pourris, corrompus", indiquent bien, selon l'auteur, que les responsables de la catastrophe sont des hommes dépourvus de toute moralité. Il s'agit donc d'examiner si le système d'économie de marché est le porteur intrinsèque de cette immoralité ou bien si la dérive est due à une crise de l'anthropologie, et si d'autres systèmes auraient évité ces abus.
Quand on considère ce qui se passe en Chine où la corruption règne comme une maîtresse, ou dans les dictatures africaines, ou dans certains pays sud-américains, on est tenté de pensé que les hommes s'y comportent comme dans cet Occident qualifié de néolibéral par Maurice SZAFRAN. Il faut donc remonter plus haut et se demander ce que ces pays si divers ont en commun dans leur système économique.
Dans le même numéro de Marianne, Jacques GENEREUX (La gauche sans boîte à outil intellectuelle) donne un semblant de réponse à cette lancinante question : En refondant le discours politique sur une anthropologie rigoureuse, on peut désormais concilier les deux grandes traditions du socialisme etc. (Le reste de la phrase importe peu). L'auteur met le doigt sur la plaie : c'est l'anthropologie sous-jacente à tous les systèmes économiques actuels qui est fausse et qui peut se résumer en un mot, idolâtrie du productivisme. Il affirme, et je l'approuve, que toutes les sciences de l'homme [...] attestent la nature sociale de l'être humain et le fait que sa liberté se construit par les liens, et non dans la rivalité pour les biens.
Depuis que j'ai ouvert ce Blog, je ne cesse de clamer (a) que l'homme est un sujet social ; (b) qu'il ne vit pas que de pain ; (c) que la rivalité - qui est nécessairement mimétique - conduit à la violence ; (d) que le but du politique est de conduire l'homme à la fin qui lui est due.
Pour avoir oublié ces vérités premières, le capitalisme industriel, qui consiste on le rappelle à faire appel à des capitaux privés pour faire tourner l'économie, en rendant propriétaire d'une fraction de la société l'actionnaire, a dérivé vers le capitalisme financier, réserve inépuisables d'opportunités pour les cupides, les mafieux, les menteurs. C'est pour avoir dissocié le politique de la morale et la morale, de l'économie que nous en sommes là.
Il faut faire rendre gorge à tous ces banquiers qui se sont enrichis sur le dos des pauvres. Il y a aux USA vingt-cinq grosses légumes qui ont accumulé, ces cinq dernières années, 3,1 milliards de dollars dans leurs poches, par le biais de la spéculation (Marianne, toujours). Il faut tout simplement confisquer leur fortune si mal acquise au lieu de demander à leurs victimes de réparer les dégâts dont ces avides se sont rendus responsables.
Mais je reste perplexe. Car je me suis laissé dire (mais je n'ai pas vérifié la nouvelle) que le numéro 2 de la Caisse d'Epargne, ce responsable qui a si spectaculairement démissionné du Directoire, vient d'être nommé le numéro 1 du Crédit Foncier. Si cela est vrai, c'est tout simplement scandaleux. Ce monsieur a été très bien payé pour faire tourner au mieux son établissement, pour en surveiller le fonctionnement. On ne peut pas vraiment dire qu'il y a réussi. Les hommes politiques qui couvrent ces pratiques ont-ils le droit de demander des sacrifices à leurs concitoyens ? Poser la question, c'est je crois donner la réponse.

Francis, Gersende et Louis

Envoyé Spécial est une émission qui fait honneur à la télévision publique. Hier soir, la réalisatrice avait donné carte blanche à Francis PERRIN pour qu'il nous parle de son fils Louis, de l'amour que sa femme et lui-même porte à cet enfant né autiste, sans oublier Baptiste et Clarisse, son frère et sa soeur. Sans pathos, avec une pudeur et une force extraordinaire, Francis et Gersende nous ont donné une leçon de vie. Ils ont pris la décision d'aller vivre près de Lille, parce qu'il y a là une école (publique) qui accueille des enfants en difficulté, au milieu des autres enfants. Francis et Gersende mettent en oeuvre une technique de stimulation très efficace (la méthode ABA) utilisée aux Etats-Unis depuis 40 ans, mais qui n'est pas passée en France, en raison de la résistance que les psychologues, empoisonnés par l'interprétation psychanalytique de l'autisme, ont opposée à cette méthode. Un maître-assistant de la Faculté de psychologie, dont je n'ai retenu que le prénom, Vinca (Pervenche en latin), femme remarquable et décidée, enseigne et forme des étudiants à cette technique. Il y a là un ensemble modèle : des parents qui s'aiment et aiment leurs enfants qu'ils font passer avant la satisfaction de leur égoïsme, une institutrice compétente, ouverte, admirable de patience comme le sont les auxiliaires de vie et les psychologues éducateurs qui s'occupent de Louis, une chercheuse obstinée, efficace, qui fait fi des tabous et ostracismes du milieu - ô combien bizarre - des psychologues passés sous le joug de LACAN.
Francis PERRIN a clairement dit qu'il avait la foi, et que - même s'il ne pratique pas - elle est très grande et l'a fortifié dans son amour pour son épouse et pour ses enfants. Non seulement Francis est un talentueux comédien à la scène, mais c'est un homme de coeur à la ville.
Merci à Francis, merci à Gersende, merci à Vinca, à cette institutrice de Villeneuve-d'Asq, aux psychologues éducateurs qui s'occupent de Louis. Et merci à France 2. C'est tout de même mieux que la Star Ac, et les débilités que nous sert à longueur d'année TF1.

mercredi 22 octobre 2008

Les sifflets toujours

Les remarques (cf billet d'avant hier) d'un de mes lecteurs attentifs sont suffisamment importantes pour que je reprenne ici et développe la réponse amicale que je lui ai faite. Elle peut se résumer en quelques points. (En substance, il ne comprend pas que je puisse défendre la Marseillaise et critiquer violemment la Révolution et il voit là une très forte contradiction dans mon propos.)
(a) Né français, aimant ma patrie, je suis solidaire de son passé et de son histoire. Il ne servirait à rien, du reste, de le nier. L'environnement culturel, politique, social a été évidemment modelé par les événements de Révolution, que cela me plaise ou non. Et il m'a influencé.
(b) Plus que la Révolution, je critique la relation que l'on en fait à l'école. Il est tout à fait extravagant de dire qu'elle fut l'avènement de la liberté, alors qu'elle voulut imposer un mode de pensée unique, persécuta et tua ceux qui s'opposaient à certaines de ses décisions, se rendit coupable d'épouvantables massacres, fit périr à la guerre nombre de jeunes français, et finalement laissa la France plus petite qu'elle ne l'avait trouvée. La Révolution fut un régime totalitaire et dans la théorie et dans la pratique. Tout ne fut pas mauvais, certes. Encore faudrait-il que dans l'enseignement, on puisse calmement trier le bon grain de l'ivraie. Courageusement, les Allemands ont su regarder leur passé en face. Il y ont gagné une dignité que je leur envie. Je les connais assez bien pour avoir vécu à Strasbourg pendant plus de 30 ans et fréquenté nombre de collègues de Fribourg en Brisgau. Une certaine rigidité dans la négociation peut nous surprendre, et elle m'a surpris quelquefois, au point que j'eus des doutes sur le changement profond des mentalités. Ma crainte a été levée par la gentillesse de mes collègues allemands, et l'accueil qu'ils m'ont réservé à plusieurs reprises.
(c) Les paroles de La Marseillaise qui fut sifflée par les jeunes au stade de France sont tout simplement abominables. "Abreuver nos sillons d'un sang impur" ne me semble pas être une activité digne d'un peuple civilisé. Mais ce ne sont pas paroles qui ont été conspuées par les jeunes, c'est le symbole que représente notre hymne national, symbole de notre patrie. Souvent l'atteinte symbolique est portée au drapeau : on brûle le drapeau américain ici, israélien là, français ailleurs, on le piétine. Que veut signifier le foule quand elle se livre à ces excès, si ce n'est sa haine du pays représenté par le drapeau, un simple bout de tissu. En d'autres termes, que notre hymne national eût été "La danse des canards" ou le "Te deum" de Charpentier, j'aurais eu la même réaction.
Je doute que si des supporters français sifflaient à Alger, à Tunis ou à Rabat les hymnes nationaux respectifs de l'Algérie, de la Tunisie ou du Maroc, ils pourraient longtemps le faire sans être inquiétés par la police de ces pays et par la foule des nationaux. Ce qui me paraîtrait tout à fait normal et justifié.

lundi 20 octobre 2008

Sortir des idéologies

Les idéologues, tout entiers pris par la supposée excellence de leurs systèmes, sont tout à fait insensibles aux conséquences de leurs applications aux hommes concrets. Certain de la supériorité de la race aryenne, HITLER a fait périr des millions de juifs, des tsiganes, et bien d'autres encore ; STALINE qui voulait le bonheur de l'humanité par le communisme a réduit à la famine et à la mort des dizaines de millions de koulaks (entre 20 et 40 selon les sources et modes de calculs) dans les années 30. Le libéralisme anonyme, qui voit partout la main invisible du marché, peut, d'un coup de téléphone à la bourse, envoyer au chômage, réduire à la misère, pousser au suicide des dizaines, des centaines de milliers de personnes.
Je ne peux m'empêcher de relier ces faits à la parole libératrice de Jésus. Il condamne les docteurs de la Loi et les pharisiens : Malheur à vous les scribes et les pharisiens, dit-Il en substance, car vous liez sur les épaules des hommes de pesants fardeaux, mais vous ne bougez pas le petit doigt pour les déplacer ! Et Paul de Tarse, son flamboyant disciple, rappelle que ce n'est pas la Loi qui libère, mais la foi et l'amour (Épître aux Romains).
Il faut donc, pour rendre justice à la vérité, reparler ici de Marina PETRELLA. J'ai assez souvent condamné sa supposée indifférence aux malheurs dont elle fut l'instigatrice, pour remettre ici les choses au point. Le journal Libération dans son numéro du 16 octobre fait état d'une lettre de l'ex-brigadiste, envoyée à son avocate. Elle y confesse, je cite, avec pudeur et infinie modestie [sa] peine, [son] respect profond, et si elle est acceptée [sa] compassion. Ce sont là des paroles justes. Marina est sortie de l'idéologie, pour rentrer dans la vérité du regard sur elle-même et sur les autres. Nous n'avons aucune raison de douter de sa sincérité. Plût au ciel que tous les criminels en viennent à ce degré de conscience et de regret.

dimanche 19 octobre 2008

Des sifflets qui ne veulent rien dire ?

J'avais évoqué il y a peu trois raisons pouvant expliquer les sifflets qui ont accompagné la Marseillaise lors du match amical de football opposant l'équipe de Tunisie à l'équipe de France : (a) le ressentiment ; (b) l'emballement mimétique des foules ; (c) l'expression politique d'une revendication de la reconnaissance de la différence et de la ressemblance.
Jean-Thomas LESUEUR, délégué général de l'Institut Thomas MORE, a sur cette question un autre point de vue, un point de vue original. Voici son argumentation : ces jeunes, Français ou pas, ne haïssent pas la France parce qu'ils aiment une autre patrie. Ils communient en groupe dans une identité sociale de réaction, facilement violente, banalement hostile à toutes les institutions, mais dont les caractéristiques essentielles, selon nous, est qu'elle est aussi spectaculaire dans ses manifestations que faible sur ses assises.[...]
Cet épisode du Stade de France, pour choquant qu'il soit pour beaucoup, doit donc être analysé comme il convient : le signe du triomphe d'une puérilité grégaire massivement répandue dans la société, le résultat spectaculaire d'un coup médiatique conçu de longue date par certains, les "cinq minutes de gloire" de jeunes qui font du bruit mais pas de politique. (Le Figaro, vendredi 17 octobre. [page Débats]. Sifflets au Stade de France : un signe de révolte non verbalisée.)
Je crois bien que je partage cette opinion. Vous aurez remarqué, dans mon billet précédent, que j'étais fort prudent dans mes conclusions. Mais, là je serais plus incisif. Si l'analyse est juste, elle caractérise et condamne deux institutions de notre société : l'Education Nationale ; les Médias. Que l'école, le collège ou le lycée échouent à transmettre l'amour de la patrie est d'une grande tristesse. Je n'ai pas souvenance que mes instituteurs ou mes professeurs aient manqué dans la transmission de cet amour. Ils m'ont fait aimer la France, avec ses faiblesses, sa grandeur, et sa spécificité irréductible à toute autre forme de culture.
D'un autre côté, si les Médias n'étaient pas à l'affût du spectaculaire, nous n'aurions pas de ces manifestations "spontanées" qui font la une des journaux télévisés : du genre Enfants de Don Quichotte et tentes de sans-abris sur les quais du Canal Saint-Martin, défilé de la gay pride, tambours et fumigènes dans les cortèges qui défilent les jours de grève. S'il n'y avait pas de médias pour amplifier ces réactions, il n'y aurait pas ces réactions. Les problèmes demeureraient, certes, mais il serait possible de les examiner de manière objective, discrète, et efficace, car les réactions prendraient une autre tournure, plus politiques, au sens noble. Au lieu que la répercussion médiatique, qui ne retient souvent que le côté spectaculaire et violent de ces crises, ne fait qu'exacerber la violence, laquelle n'a jamais rien résolue. Mais la violence fait vendre. Et il faut bien que les journaux fassent du bénéfice.

vendredi 17 octobre 2008

Picasso ou le roi est nu.

LANZA del VASTO n'était pas tendre avec les artistes contemporains. Il disait d'eux : ils font de telles bêtises. Incroyable ! Et puis il veulent nous faire avaler ça... C'est plein d'un sens qui n'existe pas. Mais l'enfant voit que le roi est tout nu. La robe tellement fine qu'on ne la voit pas. Tout le monde est en extase. Mais les enfants :"Pourquoi, papa, pourquoi le roi est-il tout nu ?" C'est comme ça, Picasso et les autres : pleins d'un mystère ou une signification qui n'y sont pas ; il n'y en a pas, et il n'y en a pas à mettre.
Picasso a du talent, il aurait pu faire des choses belles. Il en a fait deux ou trois qui sont belles. Dans sa jeunesse. Après, il n'a fait que des bêtises.
J'entends bien que ces propos vont choquer. Il est admis que toute personne de goût se doit d'admirer ces femmes difformes, ces pénis obscènes, ces divagations de l'art. Pourquoi, grand Dieu, pourquoi Pablo s'est-il commis avec ces horreurs, lui qui a fait L'enfant à la colombe, L'arlequin et tant de chefs d'oeuvre quand il n'était pas encore connu. La gloire, voilà le poison, voilà la déviation. si vous allez voir l'exposition PICASSO, souvenez-vous de ces paroles.
Allez, je vous re-cite encore un extrait d'un texte que je trouve essentiel pour comprendre ce que signifie la pensée moderne. Il illustre à merveille ce que dit LANZA :
Le sujet idéal du régime totalitaire est [...] l'individu qui, pour une raison ou une autre, est devenu incapable d'éprouver la réalité du monde, et le sens ou le non-sens qui s'y produit, et c'est, corrélativement, l'individu incapable de s'interroger sur la véracité et le sens des discours sur ce monde.
L'idéologie totalitaire ne se définit pas par un corpus d'idées, par une "vision du monde", comme on l'a dit, et comme cette idéologie elle-même le prétendait, elle ne convainc pas par ses idées, si tant que l'on peut parler de "conviction" à son propos, mais elle se caractérise par une mentalité, par ce que l'on peut appeler une attitude fondamentale de la pensée qui consiste en une indifférence foncière pour les idées qu'elle charrie, indissociable d'un mépris radical pour la réalité du monde dont elle prétend parler, en l'occurrence, pour l'existence concrète des hommes qui font ce monde.
Je sais, je radote. Je crois vous avoir déjà servi ce texte au moins partiellement.
C'est exactement cette attitude fondamentale de la pensée qui explique l'adhésion de PICASSO au communisme, l'opinion de SARTRE sur le marxisme, promu par lui au statut d'horizon indépassable de l'histoire ou la complaisance d'un SOLLERS, d'un BARTHES et de bien d'autres, pour MAO et sa Révolution Culturelle.
Je plaide pour un retour au réel. Et le réel, c'est ce qui nous résiste.
Voici les références des livres d'où j'ai tiré mes citations.
LANZA del VASTO.
Les facettes de cristal. Entretiens avec Claude-Henri ROQUET.
Le Centurion, Paris, 1981.
Anne-Marie ROVIELLO.
Les intellectuels modernes une pensée an-éthique et prétotalitaire.
In Colloque Hannah ARENDT. Politique et pensée.
Petite Bibliothèque Payot, [N°289], Paris, 2004 (3ème édition)

jeudi 16 octobre 2008

Il y a des limites à ne pas franchir

Il y a des limites à ne pas franchir. Quand des spectateurs majoritairement français, mais d'origine étrangère, sifflent lorsque l'on joue notre hymne national, il y a là quelque chose de profondément choquant. Ce fut le cas lors des matchs de football joués entre les équipes d'Algérie, du Maroc, et il y a peu, de Tunisie et l'équipe de France. Ces pays ont suffisamment critiqué la colonisation, ses agents et ses méfaits, pour que nous retrouvions la liberté de leur dire que nous n'acceptons pas une colonisation à rebours, sous forme d'agression verbale, de lazzi ou d'arrogance. On peut imaginer que s'ils ont choisi la France, ces personnes récemment naturalisées, n'ont pas trouvé qu'elle était si mauvaise mère. Mais quand on a dit cela, on en reste au constat, pas aux explications.
Alors pourquoi ?
Pourquoi ces manifestations de ce qu'il faut bien appeler la haine ? Il convient d'aller au-delà des simples apparences. On peut y voir d'abord l'expression d'un ressentiment, au sens nietzschéen : ces siffleurs vivent dans l'humiliation, celle de n'être pas COMME ceux qu'ils feignent de mépriser. Il peut y avoir aussi l'emballement mimétique des foules. Et puis il y a l'expression d'une opinion politique, le dépit de n'être pas intégrés à la société d'un pays qu'ils ont choisi.
A force d'accepter tout, à force de relativiser les vertus civiques, le politiquement correct arrive à susciter ces manifestations chez ceux de nos concitoyens qui ne se sentent pas reçus à la fois comme différents des (ipséité) et comme analogues (mêmeté) aux autres citoyens. Nous ne pouvons ni tolérer l'offense à un symbole aussi puissant que l'hymne national ni ignorer ces signes de rébellions. Le premier des remèdes est un changement du regard et un comportement respectueux (ainsi dans les formes de politesse : monsieur, madame, vous ; on tient la porte du métro ; on cède sa place assise à une maman qui porte un bébé, etc.). Nous avons du pain sur la planche. Il n'est que temps, grand temps de travailler à unir plutôt qu'à creuser les fossés. Fermeté sur les principes qui unissent ; fraternité dans les relations avec nos concitoyens d'origine étrangère. Quant aux étrangers qui se risquent sur notre sol à bafouer notre pays, ils n'ont rien à faire chez nous. Leur pays d'origine les accueillera les bras ouverts, à n'en pas douter.

Chrétiens d'Irak

Voici un texte venu des chrétiens d'Irak. Sans commentaires.


Appel des chrétiens de Mossoul : « Nous sommes en train de mourir »
ROME, Vendredi 10 octobre 2008 (ZENIT.org) - « Nous sommes en train de mourir ! » crient les chrétiens de Mossoul (Irak) qui sont de nouveau la cible, depuis quelques semaines, d'une terrible vague de violence.
Le père Amer Youkhanna, prêtre du clergé de Mossoul, vivant à Rome, a expliqué à Baghdadhope que les citoyens de la ville « n'ont pas d'autres mots que le mot ‘extermination' pour définir ce qui leur arrive ».
« Nous sommes en train de mourir, m'ont-ils dit, et il faut que notre voix soit entendue ».
Les familles restées à Mossoul, déplore-t-il, « n'ont pas d'argent pour fuir, ne sauraient où aller, et restent donc cloîtrées chez elles à attendre. C'est une situation terrible. La communauté chrétienne de Mossoul n'a probablement jamais connue une période aussi terrifiante. Ceux qui veulent instaurer l'état islamique en Irak, avec Mossoul pour capitale, veulent que la ville n'ait plus un seul chrétien parmi ses habitants ».
Mgr Philip Najim, procureur de l'Eglise chaldéenne près le Saint-Siège, a rapporté que « des groupes armés entrent dans les quartiers habités par les chrétiens et tuent, à l'aveuglette, tous ceux qu'ils trouvent sur leur chemin ».
« Ce sont des meurtres exécutés ‘de sang froid' et en plein jour, devant des dizaines de témoins, comme si ces groupes voulaient montrer qu'ils peuvent agir en toute impunité, qu'ils ont le contrôle de la ville », a-t-il souligné.
« Il est clair que leur but est de semer la terreur pour continuer ce qu'ils ont commencé désormais depuis des années : vider totalement la ville des fidèles de cette communauté aux origines très lointaines qu'est notre communauté chrétienne ».
A ces violences s'ajoute le retrait de l'article 50 de la loi qui fixe les règles pour les prochaines élections des conseils provinciaux, et dont la première version garantissait la représentativité des minorités de ce pays dans ces conseils.
« Pourquoi - c'est la question que nous posons au monde - les Irakiens chrétiens doivent-ils subir de telles attaques ? s'est interrogé Mgr Najim. Pourquoi nous tuent-ils et nient-ils nos droits ? ».
Demander le respect de ces personnes, affirme l'évêque, est « un devoir », car les chrétiens sont une minorité mais ils représentent « une partie importante de l'histoire du pays qui a toujours été caractérisée par la coexistence des différentes parties de son tissu social ».
« Nous ne demandons rien de plus que ce qui nous revient », a-t-il déclaré : « les droits qui doivent nous être garantis naturellement en tant que citoyens irakiens », « car il ne saurait y avoir de paix sans le respect de la vie humaine ».

La crise actuelle, d'abord une crise de la pensée

La plupart des hommes de ce temps, ne veulent ni ne peuvent délibérer avant d'agir. Prisonniers du principe de plaisir dans lequel les ont enfermés les médias, la publicité, les hommes politiques et SURTOUT, le monde de la culture, ils fonctionnent comme des automates. Il suffit d'appuyer sur le bouton plaisir pour qu'ils achètent, consomment ou expriment une opinion prédéfinie. Les esprits libres se réfugient dans les ermitages d'une pensée profonde, qui n'est livrée qu'à de rares fidèles : BERNANOS, THIBON, LEGAUT, LANZA del VASTO. Tous ont choisi l'exil ou la solitude plutôt que le troupeau. Et, en apparence, leur influence se limite à leurs lecteurs ou à leurs disciples. Oui la crise actuelle est d'abord une crise de la pensée. Et la crise de la pensée entraîne une crise morale.
Faute de pouvoir exiger des dirigeants de banque de se comporter de manière morale, la loi doit donc moraliser les comportements bancaires. Je ne peux pas imaginer que les responsables des banques, connaissant la tournure des événements actuels, auraient fait les mêmes choix. S'ils avaient eu la moindre réflexion sur la nature de l'homme, la moindre largeur de pensée, la moindre connaissance philosophique, ils n'auraient pas idolâtré l'argent, en tout cas j'aime à le croire. Ils n'auraient pas fait de leurs établissements des temples au dieu MAMMON.
Soyons plus concrets : la loi doit interdire la titrisation des créances. Que celles-ci restent cessibles et négociables, c'est normal, mais qu'elles le soient de manière individualisée. C'est transparent. Il faut interdire les opérations à découvert, achat ou vente d'actions. Il faut interdire les parachutes dorés, et exiger la rotation périodique des responsables des banques. Il faut exiger des détenteurs d'actions qu'ils les gardent en possession pendant une période minimale de temps, comme l'avaient dit Henri HUDE (on peut imaginer le temps qui sépare deux Assemblées Générales). Il faut enfin que les banques acceptent d'endosser le rôle de propriétaire des biens qu'elles permettent d'acheter avec l'argent de leurs déposants dont elles ne sont que les courtiers. Un propriétaire qui assume les droits mais AUSSI les devoirs du propriétaire. Un propriétaire qui s'efface enfin de la propriété au fur et à mesure des remboursements.
En somme, il faut remettre l'homme au centre des préoccupations politiques, sociales et économiques. La crise actuelle offre une occasion unique de changer de paradigme social. Nos dirigeants, nos responsables politiques, sauront-ils de dégager des enjeux de pouvoir pour réfléchir ENSEMBLE à ce qui est bon pour l'homme ? C'est une autre affaire.

mercredi 15 octobre 2008

Du religieux et du politique

Un livre difficile, certes, mais dont je vous recommande tout à fait la lecture : Le désenchantement du monde de Marcel GAUCHET. J'aurai certainement l'occasion d'y revenir. Mais j'aimerais vous citer le deuxième paragraphe de la première partie Les métamorphoses du divin. Origine, sens et devenir du religieux, en son chapitre premier Historicité du religieux.
Voici donc ce texte :
[Il est] assez communément admis, en effet, qu'il est une permanence, une constance, si ce n'est une invariance du religieux dans l'histoire qui obligent à le rapporter aux conditions mêmes d'existence d'une société humaine, comment ensuite que l'on conçoive son rôle dans [la] structuration primordiale du champ collectif.
Marcel GAUCHET soulève ici une question essentielle, celle du rapport entre le fait social et le fait religieux. La laïcité à la française et ses glorieux soutiens ont évacué un peu rapidement la question. Elle mériterait d'être examinée avec impartialité. Est-il possible de faire société en se débarassant du sacré ? Je vous dirais dans quelques billets la réponse que donne l'auteur, réponse toute prudente, mais admirablement étayée, à cette lancinante question.
On pourrait se demander, en particulier, si les dérives et les folies que nous voyons se développer dans le monde glauque de la finance, dérives et folies qui signent, selon moi, la mort de la conscience sociale dans l'esprit des auteurs et promoteurs de désastre, ne sont pas imputables à cette évacuation du sacré. Marcel GAUCHET va plus loin, qui parle de la correspondance entre la société telle qu'elle est pensée par les philosophes politiques et les valeurs incarnées dans le christianisme. S'agit-il d'une imprégnation ? S'agit-il d'une coïncidence ? Et si c'est las cas, c'est encore plus intéressant qu'une imprégnation; car il y a congruence entre la morale [en tant que science du discernement conscient de ce qui est bien et mal] et le bien de la société

Incompréhensible

Ainsi, les députés socialistes se sont abstenus de voter la loi qui permet à l'Etat de stabiliser les banques en y injectant d'énormes liquidités, et en apportant les garanties de l'Etat aux prêts interbancaires afin de redonner confiance aussi bien aux investisseurs qu'aux particuliers. L'argument avancé par monsieur HOLLANDE est qu'il ne faut pas s'opposer à une initiative européenne, mais qu'il ne faut pas approuver la politique économique de monsieur SARKOZY. Comme s'il s'agissait ici d'une initiative de nature fondamentalement économique. Les électeurs apprécieront le grand soutien que les défenseurs "des plus démunis" ont apporté à leur clientèle électorale. C'est d'un minable à faire pleurer. Et surtout, cela contredit tout à fait les positions que les députés socialistes concernés avaient prises lors des discussions au sein de la commission des finances. On notera que les très chauds partisans de l'abstention étaient, notamment, messieurs FABIUS et l'inénarrable Julien DRAY. En voilà de grands esprits. Bien entendu, ils n'ont proposé aucune solution pour juguler la crise. Et ils se seraient sans doute réjouis d'un refus du parlement. Périsse la France pourvu que triomphent leurs idées. Ces gens sont tout simplement irresponsables.

mardi 14 octobre 2008

La crise : rectificatif

J'ai fait tenir à madame ROYAL des propos qui ne sont pas tout à fait exacts. Je n'avais fait que les entendre. Je les ai lus. Je dois à la vérité de les rectifier et de conclure aussi que je les avais écoutés avec prévention. Je les restitue dans leur intégralité : madame ROYAL espère que la crise aura guéri Nicolas SARKOZY de son admiration pour les crédits hypothécaires et pour la retraite par capitalisation.
Je crois que monsieur SARKOZY n'a jamais exprimé de l'admiration pour les dispositifs condamnés péremptoirement par la candidate malheureuse, et qu'elle lui attribue des intentions qu'il n'a jamais manifestées. Mais je devais rectifier ce que j'ai dit hier de son intervention, simplement par honnêteté intellectuelle.
Ceci étant, je me pose des questions. Où les gouvernements européens vont-ils trouver ces sommes extravagantes (1.300 milliards d'euros) ? Les liquidités, il n'y en a plus (c'est le coeur même de la crise) ; les banques les ont asséchées en se figeant dans leur décision de ne plus se prêter entre elles. Qui va prêter ? La Chine, il est vrai, dispose de réserves considérables. Des centaines de milliers de dollars. Mais ses entreprises sont elles-mêmes criblées de dettes qu'elles ne remboursent pas, et les banques d'Etat croulent sous le poids des créances douteuses, que, normalement, elles devraient provisionner. Alors, la planche à billets ? Le monde de la finance est décidément très mystérieux dans ses procédures ; il est transparent dans ses effets : ses maîtres ne risquent pas la cachexie et la sous-nutrition, à la différence de leurs milliers de clients naïfs.
Et s'il n'y avait que les financiers... on comprendrait. Mais il y a les élites politiques. On a prêté assez peu d'attention au non-lieu rendu dans l'affaire des vedettes de Taïwan. Il est patent que des commissions versées à des intermédiaires taïwanais (13 officiers, 15 marchands d'arme sont impliqués) ont fait l'objet de rétro-commissions à des influentes personnalités politiques et économiques ainsi qu'à des partis. Il aurait suffi aux juges de pouvoir accéder à des documents classés secret défense pour faire toute la lumière sur ce scandale. La Commission consultative du secret de la défense nationale ne les y a jamais autorisés. Les corrompus ont de beaux jours devant eux.
Même réaction dans le cas de l'Angolagate. Un trafic d'armes avec l'Angola dans lequel apparaissent les noms de diverses personnalités de tous bords, dont Charles PASQUA, Pierre FALCON, un fils MITTERRAND, Jacques ATTALI. Bien entendu, nul ne sait si ces personnes ont trempé ou non dans ce trafic, et nous le saurons jamais pour des raisons identiques.
Ainsi, pour toutes les personnalités impliquées dans ces affaires louches, la crise tombe à pic. Cela s'appelle de la manipulation.
Le journal La Croix auquel j'emprunte ici diverses données factuelles conclut, devant la reculade des pouvoirs publics : on comprend qu'un tel procès peut éclabousser à nouveau la classe dirigeante de ce pays. Ce qui, en dépit de tous les discours, ajoutera à la défiance de l'opinion. Et peut-être la mènera à l'exaspération.

lundi 13 octobre 2008

Petites remarques

Madame PETRELLA ne sera donc pas extradée, pour des raisons humanitaires. Il fallait voir hier soir, à la télévision, les sourires vainqueurs des membres du comité de soutien à cette brigadiste réfugiée en France. A ma connaissance, elle n'a pas exprimé le moindre regret pour les crimes et les complicités de crime qui lui ont valu en Italie sa condamnation à la prison perpétuelle, et les membres du dit comité n'ont pas fait la moindre allusion aux victimes que leur passionnaria a sacrifiées aux dieux de la lutte des classes. Il y a là quelque chose à la fois de profondément choquant - comment peut-on demander des faveurs à un pouvoir qu'on n'a cessé de combattre, un pouvoir pensé et vécu comme bourgeois, capitaliste, exploiteur de la classe ouvrière ? - et de profondément révélateur : les valeurs de fond qui justifient les réactions des adeptes de madame PETRELLA et la décision du pouvoir sont des valeurs profondément chrétiennes - le pardon (qu'elle n'a pas sollicité), la rupture du cercle de la vengeance indéfinie, la compassion.
On aurait aimé que madame PETRELLA fasse preuve de la même grandeur d'âme avant d'appuyer sur la gâchette.
Madame ROYAL, avec une hauteur de vue légèrement inférieure à celle de son ancien compagnon (rappelez-vous, je l'évaluais à 30 cm), au lieu de proposer ses solutions à la crise financière qui secoue le monde et risque de le conduire au chaos, n'a su que brocarder les positions défendues par Nicolas SARKOZY pendant la campagne présidentielle : "Il était, dit-elle, pour la retraite par capitalisation. (Ce que je n'ai jamais entendu dire. Passons). Où en serait-on aujourd'hui s'il l'avait fait ?" Voilà bien une attaque qui mérite deux réponses. (a) Avant que les éventuels salariés cotisant à une retraite par capitalisation ne soient bénéficiaires de leur investissement, il se serait écoulé quelques décennies, et le problème ne se serait pas posé pour eux. En effet, je ne vois pas comment le cotisant d'une année et demi (temps depuis lequel monsieur SARKOZY est élu) aurait pu rentrer en retraite aujourd'hui. C'est une de ces stupidités dont madame ROYAL est l'accoutumée. (b) Ensuite, on peut remarquer que la situation actuelle est totalement différente de celle qui prévalait il y a un an. Le propre de l'idéologie est de vouloir faire rentrer les faits dans un système a priori, et celui des idéologues, de ne jamais changer d'opinion ; celui de l'intelligence politique est d'adapter les décisions aux circonstances. En l'occurrence, monsieur SARKOZY a montré qu'il était un homme d'Etat. Il a protégé les intérêts de ses concitoyens en apportant la garantie de l'Etat (limitée à 50.000 euros, il est vrai) à leurs dépôts bancaires. S'il l'avait porté à 200.000 ou 300.000 euros, on aurait vu la gôôôôche hurler contre cette hideuse défense de l'intérêt des riches. Tout cela est pitoyable. Ces gens ne connaissent qu'une solution, la leur. Or ils sont en partie responsables, par la politique que leur parti a conduite pendant des années, du délabrement de pans entiers du pays. Qu'ils réfléchissent, qu'il analysent, qu'ils observent les faits, avant de proposer un programme crédible à nos suffrages au lieu de nous resservir des plats réchauffés et peu ragoûtants. Pour terminer, je dirai que je n'aime pas la tunique bleue que madame ROYAL portait lors de son show au zénith (4.000 personnes ; 6.000 places). Je trouve qu'elle altère sa beauté naturelle, laquelle, j'en conviens, est assez remarquable.

vendredi 10 octobre 2008

Un beau Colloque au Collège de France

Magnifique Colloque au Collège de France, un Colloque consacré à Jean-Pierre VERNANT. Cet éminent spécialiste des mythes grecs, des grecs et de la politique des antiques cités animées de leurs débats, fut longtemps membre du Parti Communiste ; il reconnut même qu'il fut stalinien. Il quitta le parti quand Georges MARCHAIS en devint le responsable national : il lui paraissait incongru, à lui qui avait été un résistant actif et courageux, que l'on puisse porter à la tête du PCF, un homme qui était parti en Allemagne pour y travailler au service des Allemands pendant la deuxième guerre mondiale. Un intervenant, Emmanuel TERRAY, anthropologue de formation, a bien souligné que, sur la fin de sa carrière, VERNANT avait compris que l'espace public chez les Grecs, l'agora, est un lieu de débats entre égaux qui interagissent les uns avec les autres. Il était sur ce point en parfait accord avec Hannah ARENDT. Il semble qu'il avait admis qu'un débat n'a lieu d'être que si des opinions sont en cause, et qu'il ne peut s'instaurer que dans l'exposé argumenté de ces opinions. Mais il lui semblait aussi que la vérité avait une valeur contraignante pour l'esprit et qu'elle ne pouvait être matière à débat. Il s'agit là de la réaction d'un homme de grande probité intellectuelle, une probité qui l'a conduit à rompre douloureusement avec cette fraternité chaleureuse que rayonnaient à ses yeux ses amis du PC.
Je me suis permis de demander à Emmanuel TERRAY si VERNANT avait pris en considération, ne fût-ce que pour les contester, les opinions de René GIRARD, qui voyait dans les mythes le récit à la fois révélateur et dissimulateur du meurtre originel d'un bouc émissaire, meurtre à l'origine des religions. Je convenais que la question était embarrassante. Mais enfin, VERNANT a travaillé sur les mythes et le sacrifice. Après un long silence Emmanuel TERRAY, confessait qu'il n'avait jamais lu la moindre allusion à GIRARD dans les oeuvres de VERNANT qu'il connaît bien. Et il ajoutait, ce silence en lui-même est parlant. Tout de même, un homme comme VERNANT ignorer un homme comme GIRARD, voilà de quoi étonner.
J'eus le fin mot de l'énigme à la fin de la séance. Une intervenante espagnole est venue me voir et m'a dit que dans un article collectif signé par six auteurs, une note infrapaginale indique, sans commentaires, que les thèses de René GIRARD ne leur paraissent pas valides. Elle ajoutait, "vous comprenez, les fondements de la pensée de GIRARD sont chrétiens"... Ce qui est faux. René GIRARD est venu à la foi par sa réflexion sur le mimétisme, le désir toujours hétéronome (et cela lui a été révélé par la critique des grands écrivains, SHAKESPEARE, CERVANTES, DOSTOIEVSKY, etc.). Il s'est alors penché sur les relations entre la violence et le sacré, a vu dans le sacré un moyen de juguler la violence circulaire et indéfinie, a trouvé les traces de la violence initiale dans les mythes divers - le meurtre, le lynchage du bouc émissaire, toujours innocent - et a fini par montrer que le seul texte qui décrit le lynchage du point de vue de l'innocent, est le texte évangélique. Je résume.
Ainsi, honnête homme s'il en fut, Jean-Pierre VERNANT est sans doute resté prisonnier de sa formation marxiste initiale, quand bien même, en esprit libre, il savait faire le départ entre la science et les choix politiques. Grand moment que ce Colloque.
Avec nos deux Prix Nobel de médecine, et notre prix Nobel de littérature, nous pouvons être fiers de la vigueur intellectuelle de la France.
Ayant enseigné la virologie pendant 35 ans, je suis bien même d'apprécier les immenses mérites des chercheurs distingués par le Comité Nobel. Je regrette infiniment que le Professeur CHERMANN n'ait pas pu lui aussi être honoré. Et je l'associe, dans mon esprit à Luc MONTAGNIER et à Françoise BARRE-SINOUSSI ; il a participé à cette grande victoire scientifique qu'est la découverte du virus du SIDA, une victoire qui honore notre Patrie. Merci à vous, monsieur.

Parachutes dorés et Droits de l'homme

Je dois à mes rares lecteurs des excuses. Je ne les avais pas avertis que je m'absentais quelques jours. Je m'apprête du reste à en faire autant pour demain et dimanche. Ceci étant dit, je fais rattraper mon retard en publiant aujourd'hui quelques billets.
J'ai stigmatisé l'attitude de ces dirigeants de grands groupes industriels qui, quand ils sont remerciés, souvent en raison de leur mauvaise gestion, se voient équiper d'un parachute doré qui leur permet de quitter sans risque l'aéronef en perdition. Je dis, je prétends, et je maintiens que cette disposition est non seulement scandaleuse moralement, mais encore qu'elle est juridiquement inconstitutionnelle. On sait que les sages du Conseil Constitutionnel ont incorporé la Déclaration des Droits de l'homme dans le Bloc Constitutionnel. Or cette déclaration dit formellement ceci : Les hommes naissent et demeurent égaux en droit. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune. Il y a donc une très sérieuse base juridique pour limiter ces pratiques, les encadrer, j'aurais aimé pouvoir dire les moraliser. Hélas...
Nombre de philosophes politiques ont très largement étudié le statut de l'élite. Il n'y a pas d'élite légitime si le statut ne s'accompagne d'aucune responsabilité sociale, et d'aucun service rendu à la société. Quand tel ou tel dirigeant, par ses erreurs stratégiques de gestion, entraîne la chute de son entreprise (baisse de la valeur capitalisée, licenciements, fermetures d'usines, etc.), il doit être sanctionné et non pas couvert d'or. La sanction devrait venir des actionnaires, non de la Loi. Mais on voit bien que tous ces messieurs se tiennent par la barbichette, et se font des amabilités au cas où. Alors, en dernier ressort, la Loi doit intervenir dans toute sa rigueur.
Ce qui est terrible, c'est que ce dévoiement entraîne une condamnation sans nuance du capitalisme industriel, qui n'a rien à voir avec le capitalisme financier. Prendre des risques pour créer des biens est un indice de vigueur sociale. Reconnaître que l'augmentation de la valeur boursière est le fruit et de ce risque et du travail des salariés de l'entreprise est un acte de bon sens. Les événements boursiers actuels indiquent bien que risque il y a, puisque nombre de petits actionnaires ont vu leur patrimoine fondre en quelques jours. Il est donc faux de dire qu'à tous les coups on gagne. On peut aussi perdre. Le problème est que les perdants sont les risqueurs de bonne foi, et les gagnants, ces petits groupes de spéculateurs initiés aux combines de la finance. A mon avis, c'est à la jointure des notions de risque et de spéculation que le politique doit travailler. J'ai déjà donné des pistes puisées dans les travaux d'Henri HUDE (voir billets anciens).

vendredi 3 octobre 2008

Spéculation et corruption : la prophétie de Bernanos

Dans des billets déjà anciens, j'ai eu l'occasion de vous parler de ce livre écrit par BERNANOS lors de son exil au Brésil. Je veux parler de ce texte de feu et de lave, de tonnerre et de visions apocalyptiques : La France contre les robots. Notre homme avait vu, longtemps à l'avance, où nous menait cette civilisation mécanique et matérialiste. J'en extrais pour vous ce passage ; au moment où nous voyons les effets de la cupidité humaine et de la finance en folie sur l'économie mondiale, il nous remet les idées bien en place :
Le jour où la surproduction menacera d'étouffer la spéculation sous le poids sans cesse accru des marchandises invendables, vos machines à fabriquer deviendront des machines à tuer, voilà ce qu'il est très facile de prévoir. Vous me direz peut-être qu'un certain nombre d'expériences malheureuses finira par convaincre les spéculateurs au point de les rendre philanthropes. Hélas ! Il est pourtant d'expérience universelle qu'aucune perte n'a jamais guéri un vrai joueur de son vice ; le joueur vit plus de ses déceptions que de ses gains. Ne répondez pas que les gros spéculateurs seront tôt ou tard mis à la raison par la foule des petites gens. L'esprit de spéculation gagnera toutes les classes. Ce n'est pas la spéculation qui va mettre ce monde à bas, mais la corruption qu'elle engendre.
Et ceci encore, un peu plus loin :
Lorsque l'argent est honoré, le spéculateur l'est aussi. Il aura donc beaucoup plus à craindre l'envie que le mépris ; n'espérons donc pas le réveil des consciences.
Tout le livre ou presque est de cette lucidité désespérée et prophétique. Nous savons aujourd'hui que la crise des crédits hypothécaires aux Etats-Unis est imputable à la spéculation que les banques créancières ont entretenue sur les biens immobiliers. En cas de défaillance de l'emprunteur, elles espéraient se remplumer en vendant le bien hypothéqué. Les petits malins ont vendu des créances à des banques en quête de profits immédiats en leur faisant miroiter le gain qu'elles pourraient en tirer très vite. Bien entendu, les créances douteuses ont été mélangées à des créances de bon aloi, dans des produits dits restructurés. Personne ne pouvait s'y retrouver, sauf les concepteurs de cette abominable tromperie. Quand les taux d'intérêt ont augmenté, les débiteurs, à la solvabilité prévisiblement problématique, n'ont pu rembourser leurs dettes. Leurs biens ont été mis en vente et l'afflux de l'offre a provoqué l'effondrement des prix de l'immobilier. Les acheteurs des créances restructurées y ont perdu cuir et poils, et les vendeurs s'en sont mis plein les poches, sans scrupules, sans état d'âme. C'est eux qui aujourd'hui devraient payer cet effroyable gâchis. Il ne semble pas qu'on en prenne le chemin, et c'est le contribuable américain et les économies dépendantes des Etats-Unis qui vont faire les frais de ces ignobles tripatouillages. Chaque particulier, laissé seul devant la finance et l'Etat, en est aujourd'hui réduit à trouver des expédients qui lui permettront de récupérer une partie de leur mise, et le processus de corruption se poursuivra ainsi.

Ah ! Il faudrait la plume de BERNANOS, les gueulantes de Léon BLOY, les imprécations de DAUDET pour stigmatiser tout ce joli monde. Pour l'instant, l'opinion et les médias commente l'évolution du CAC 40 et la récession qui se profile. Jusqu'au jour où... Dans combien de temps ? Là est la question.

Lettre ouverte à madame le sénateur Dominique Voynet

Madame,

Je croyais naïvement que, membre du corps législatif, vous étiez un promoteur et un gardien des lois que vos êtes chargée d'élaborer, d'amender et de voter. C'est donc avec stupeur et indignation que j'ai appris par la presse votre décision de ne pas organiser de service minimum d'accueil dans les écoles de la commune dont vous êtes maire. Les mamans de MONTREUIL seront très contentes de l'apprendre. Elles vont, à quelques jours de la grève des enseignants, chercher comment régler le problème de la garde de leurs enfants mardi prochain, et pour beaucoup d'entre elles, ce sera au détriment de leur revenu. Souffrent vos administrés pourvu que votre idéologie soit sauve.
On aimerait savoir pourquoi vous refusez d'organiser cette garde. Vous ne vous dérobez pas, madame, vous le dites tout crûment : "Le texte est inapplicable". Voilà bien une raison ! Il y a des milliers de commune, dont PARIS, qui le trouvent tout à fait applicable. Pas vous. Si par malheur vous reveniez, vous et vos amis, au pouvoir accepteriez-vous que les textes votés par votre majorité ne soient pas appliqués par ceux auxquels ils sont destinés. Vous imaginez un adversaire politique responsable dire que l'ISF est une imbécillité, doublée d'une injustice et qu'il ne faut donc pas faire de déclaration de fortune au fisc, que la loi sur le minimum de logements sociaux à construire dans les communes de plus de 3500 habitants ne peut être mise en oeuvre. Vous aurez beau vous époumoner pour que les cyclistes respectent les feux rouges, pour que les automobilistes paient leur stationnement et ne garent pas leur véhicule, n'importe où, pour que les collégiens et lycéens, sans compter ceux que les médias appellent pudiquement les jeunes, respectent les murs et les locaux de leurs établissements. Vous ne serez jamais crédible. Votre attitude est tout simplement scandaleuse, et elle témoigne bien de l'esprit totalitaire qui anime votre action et votre discours : ne sont bonnes et respectables que vos lois. Celles d'une majorité élue démocratiquement ne valent pas tripette. Il ne faut pas s'étonner, si devant ce manque de respect pour la démocratie, et de rigueur dans le discours politique de nombre d'élus de notre vaillante gôôôôche, nos jeunes ne respectent rien, pas même leurs parents, et bien sûr leurs professeurs. Vous êtes un de ces éléments corrupteurs du civisme qui depuis trente ans pourrissent notre pays.
Et je me demande encore pourquoi ces propos ne sont pas relevés par les tribunaux.
J'ai bien l'honneur, madame, de vous saluer.

jeudi 2 octobre 2008

L'Express et l'enragé

Jean-Marc ROUILLAN a du sang sur les mains. Il a tué de sang froid Georges BESSE, le Général AUDRAN et d'autres. Il ne regrette rien. C'est du moins ce que donne à penser l'interview que l'Express s'apprête à publier dans sa prochaine livraison. Monsieur BESANCENOT ne dédaignerait pas accueillir cet assassin dans son mouvement anticapitaliste. Mais il est vrai qu'il a déjà déclaré qu'on ne pouvait faire la révolution sans verser le sang, fût-il innocent. Nous le savions déjà, nous qui sommes les héritiers de ces monstres que furent les ROBESPIERRE, MARAT, CARRIER et autre HEBERT.
Ces deux éminents penseurs estiment qu'il est impossible de faire la révolution (leur révolution) sans passer par la "lutte armée". Je ne sais pas si les électeurs qui votent pour monsieur BESANCENOT approuvent cette option. Et du reste, une chose est d'approuver la lutte armée en pensée, une autre est de passer à l'acte. Monsieur ROUILLAN n'a pas hésité, lui à le faire. Sa place est en prison, nulle part ailleurs. Mais il se trouvera bien un juge d'application des peines pour ne pas l'y faire retourner. Quant à vous, gardez-vous bien de ne pas avoir EN EVIDENCE votre gilet jaune et votre triangle de signalisation dans votre voiture. Il vous en coûterait 135 euros de contrevenir à cette exigence.
L'Express a commis une mauvaise action. Il faut laisser les choses basses mourir de leur propre poison. Il n'était donc nul besoin de publier l'interview d'un assassin. Mais le faire peut doper les ventes en cette période de difficultés économiques. N'achetez donc pas ce numéro qui donne la parole à un monstre politique, et donnez l'argent économisé aux pauvres qui chantent dans le métro ou quémandent une pièce dans la rue.

mercredi 1 octobre 2008

L'union nationale vue par les socialistes

C'est peu de dire que l'économie va mal, surtout dans son système bancaire censé soutenir l'investissement soit directement soit indirectement par les crédits accordés aux ménages. Monsieur FILLON a fort justement demandé que dans cette situation, les querelles politiques cessent et que l'on se mette d'accord tous partis confondus sur des mesures efficaces. Avec une hauteur de vue qui doit bien faire trente centimètres, monsieur HOLLANDE a répondu qu'il n'en était pas question, sauf à abandonner la quasi totalité des reformes économiques, du fameux bouclier fiscal à l'ouverture du capital de la Poste aux investisseurs privés, autrement dit, sauf à faire une politique socialiste, rejetée pourtant par le suffrage universel lors des élections présidentielles.
A vrai dire, demander l'union nationale à un parti dont les responsables se déchirent entre eux avec une incroyable âpreté, revient à demander au carré d'être un cercle. Ils ne sont d'accord sur rien. Pourquoi pourraient-ils l'être quand il s'agit de la Patrie qu'ils ont pourtant vocation à protéger, faire prospérer. Patrie ? Ils ne connaissent pas. Ils n'ont que le mot Nation à la bouche, ils ne connaissent que l'Etat. Ils méprisent tout ce qu'ils ne peuvent contrôler idéologiquement directement ou par l'intermédiaire de leurs fidèles, chacun d'eux ayant à ses côtés une cohorte de sous-fifres en attente d'une prébende, d'un maroquin ou d'une sinécure. Ils ont tout organisé pour écraser les corps intermédiaires, ces groupes humains vivants, fait d'hommes et de femmes accordés sur des objectifs concrets, et non point hantés par le pouvoir et la boursoufflure des ego. Ils ont fait du mal. Ils continuent d'en faire.
Ils ont des émules à droite, hélas ! J'aimerais bien qu'en face la mentalité fût tout à fait différente. Je n'en suis pas certain. A vrai dire, il y a des deux côtés des hommes et des femmes de qualité, moins préoccupés de leur avenir que de l'intérêt public. Ce sont eux qu'ils faut repérer, ce sont eux qu'il faut faire travailler ensemble. Laissons les autres à leur quadrilongicapillosection, activité bien connue qui consiste à couper les cheveux en quatre dans le sens de la longueur, afin de rédiger des motions tirées au cordeau, pesées à la virgule, et qui n'ont d'autres but que de s'attirer un maximum de votes des militants.
C'est ainsi qu'à Byzance on discutait du sexe des anges tandis que les Ottomans campaient aux portes de la ville.