vendredi 17 avril 2009

Les numéros se suivent et ne se ressemblent pas

La semaine dernière, madame Dorothée WERNER condamnait les propos de Benoît XVI dans un éditorial particulièrement offensant pour les chrétiens, publié dans la revue Elle. Cette semaine, changement de ton : le même journal publie un entretien de Sylviane AGACINSKY, philosophe et chercheur à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, avec la même Dorothée WERNER. Sylviane AGACINSKY ne fait pas mystère de ses opinions politiques. Elle se se situe "à gauche", et elle a de bonnes raisons de le faire. A la ville, elle est l'épouse de Lionel JOSPIN. Mais madame AGACINSKY a sur nombre de responsables et idéologues socialistes un considérable avantage. Elle pense, elle réfléchit, elle argumente. Et elle le fait avec une rare probité intellectuelle, celle d'un esprit supérieur. J'ai donc lu avec intérêt cet article, comme un scientifique soucieux d'une pratique scientifique qui soit morale. Madame AGACINSKY, en effet, vient d'écrire un livre intitulé Corps en miettes dans lequel elle explique pourquoi il faut que la société proscrive formellement la gestation pour autrui ou pratique des mères porteuses. Je ne partage pas la totalité des opinions de Sylviane AGACINSKY, en particulier sur le don de gamètes (ovocytes ou spermatozoïdes) qu'elle estime moralement fondé, mais elle explique par des arguments absolument limpides pourquoi l'usage de mères porteuses est une aberration morale, une sottise sociale, et une offense ineffaçable faite à l'enfant porté par l'une et donné à l'autre. Madame WERNER a beau, par ses questions, essayer de trouver une faille dans le raisonnement de la philosophe, notre Sylviane tient bon.
Elle a notamment cette formule que chacun de nous devrait garder en tête : la loi est responsable de l'idée même d'humanité et de civilisation. Jean-Pierre DENIS dans un éditorial du journal La Vie (numéro 3320) commente avec bonheur cette affirmation, et rappelle que les chrétiens en général, et les catholiques en particulier, n'ont pas le monopole de la pensée juste. Et il ajoute qu'il suffirait de former un front informel qui réunirait tous ceux qui pensent que les valeurs universelles ont encore un sens pour forcer le législateur à ne pas errer lors de la délibération et l'élaboration des lois sur la Bioéthique.
Voici pour terminer un extrait de ce livre que je vais me procurer sans tarder.
La barbarie a toujours été moderne, toujours nouvelle, toujours actuelle. Nous progressons parfois vers elle sans le vouloir, aveuglés par les "progrès" de la puissance technologique et les ruses du marché. Tout est possible, tout doit être possible pour satisfaire la demande de l'individu, jusqu'à la production d'enfants en laboratoire. Mais à quel prix ? Dès lors qu'ils engagent des tiers, les "progrès" biotechnologiques ont leur revers redoutable : l'exploitation du corps d'autrui. L'homme moderne se réjouit de pouvoir utiliser à son profit tous les procédés du laboratoire sans voir qu'il contribue à la fragmentation de son propre corps. Dans l'imaginaire biotechnologique, l'enfant n'est plus qu'un produit fabriqué à partir de miettes : sperme, ovocytes, utérus. Qu'est-ce qui nous attend si nous oublions la dignité de la personne et de son corps.
J'ose dire merci à Sylviane AGACINSKY. C'est une esprit droit, qui se moque du politiquement correct, et qui, voyant le bien de l'humanité sur le long terme, combat la sensiblerie pseudo-caritative et le marché lucratif de la procréation. Elle illustre à merveille ce qu'a dit Jean-Paul II : l'enfant est un don, non un dû.

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