mardi 9 mars 2010

Scènes de la vie ordinaire

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Hier matin, petite scène minuscule de la vie quotidienne. Je vois dans la rue un jeune garçon, d'une dizaine d'année, marcher allègrement à côté d'une jeune fille, ou d'une jeune femme. Comme je ne les vois que de dos, j'imagine d'abord que c'est la grande soeur et suppose qu'ils vont, l'un à l'école, l'autre au lycée, puisque les cours reprennent après les vacances d'hiver. Un détail m'intrigue : le gamin n'a pas de cartable ; la jeune fille porte un cartable sac-à-dos, manifestement celui d'un enfant. Pressant le pas, je double le duo ; la jeune femme en question est la maman et c'est elle qui porte le sac de son fils, lequel n'est ni bancal, ni aveugle, ni handicapé, ni bossu... Je vous laisse conclure ; quant à moi, j'en reste pantois et rêveur. L'enfant est roi, l'adolescent a tous les droits, et les adultes tous les devoirs, dont certains me semblent très imaginaires, comme celui de porter le cartable de son fils !
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Passage devant les panneaux électoraux. Monsieur BESANCENOT, hilare, affiche son portrait adorné d'un slogan "Partageons les richesses !". Il faut décrypter ; je vais le faire pour vous : "Tout ce qui est à moi est à moi ; tout ce qui est à toi est à moi". C'est la manifestation la plus raffinée du "ressentiment des médiocres" au sens que lui donne NIETZSCHE. Certains, dans la société, ont pour fonction de créer des richesses, de par leur travail, leur opiniâtreté, leur prise de risque. Il convient de les punir en les obligeant à partager de manière confiscatoire le fruit de leur travail et de leurs peines, avec la multitude de ceux qui n'ont qu'une idée en tête, travailler moins et gagner plus. Et il y a des gens assez aveuglés pour ne pas comprendre que des biens qui n'ont pas été produits ne peuvent pas être distribués. Bien entendu, je n'entends pas faire l'impasse sur la solidarité, la fraternité, le partage et je maintiens que les biens terrestres ont une destination universelle. Mais je récuse l'idée selon laquelle les riches sont tous des salauds, des exploiteurs, des ignobles à qui il faut faire rendre gorge. Pas de riches ? Pas d'impôts, pas de redistribution des richesses. On peut même imaginer un système strictement égalitaire où aucun des citoyens n'atteindrait le plancher de revenus imposables. Où prendrait-on l'argent ? Quand monsieur PROGLIO gagne 2 millions d'euros, il en rend 1 à l'Etat. S'il n'en gagne que 500.000, il n'en restitue que 250.000. Où est le bénéfice pour la communauté nationale ? Bien sûr, on pourrait lui en prendre plus. Mais dans une entreprise employant des milliers d'employés, quelle somme ces derniers retireraient-ils de l'argent soustrait à leur patron, à supposer que la soustraction soit égalitairement répartie ? Qui de nous, en outre, accepterait de se voir amputer de 60 % de ses revenus en étant accablé de responsabilités et de travail ?
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Entendu hier soir, un peu car elle me tape sur le système, madame DUFLOT, la grande prêtresse de l'écologie en Île-de-France. Interrogée par Laurence FERRARI, elle fustige - sensibilité de gauche oblige - la fermeture de la raffinerie de DUNKERQUE. Très habilement, du reste, elle mélange les questions de fond et de forme, en inventant purement ces dernières, en invoquant les grands principes, la dignité prétendument bafouée des employés. Elle glose sur le développement durable. Elle ne voit que son idéologie est en partie responsable de ce qui se passe là-bas. La crise aidant, et le politiquement correct aussi, le pseudo-réchauffement climatique appelé en renfort, la consommation de carburant a baissé de 7 % l'an dernier. Ce qui est considérable. Bien entendu, on pourrait renationaliser Total, maintenir ouverte une raffinerie déficitaire, faire payer le déficit au contribuable, et engloutir dans une réanimation artificielle, des milliards d'euros qui viendraient à manquer à l'investissement. Savez-vous que monsieur BEAUPIN, un ancien adjoint du Maire de Paris, et qui siège toujours en son Conseil Municipal, a préconisé la fermeture des Parkings pour limiter l'usage de la voiture. Voilà qui va arranger les affaires de la raffinerie. A moins que l'on oblige les riches à utiliser leurs Mercédès ? Toute cette argumentation fondée sur l'envie, et non sur la responsabilité, sans parler de l'espérance (voir hier), de l'épargne et du travail, toute cette argumentation peut convaincre un moment ; mais le réel a ceci de bon, c'est qu'il nous résiste et qu'il lui arrive de se venger !
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6 commentaires:

Romrik a dit…

Peut être que Monsieur Besancenot faisait porter son sac par sa mère: car "tous ce qui était à lui était à lui, et tous ce qui était à elle était à lui!"

=>je viens de decouvrir ce Politis, merci à vous!désormais mon marque page de chevet!(étudiant pharma...)

Philippe POINDRON a dit…

Cher Romrik, vous m'êtes d'autant plus cher que j'ai enseigné pendant 35 ans à la Faculté de pharmacie de Strasbourg, et que j'ai gardé de ma Faculté le meilleur souvenir. Où faites-vous vos études ?
Nous resterons en contact, je l'espère, par le biais de ce Blog.
Amicalement.

Geneviève CRIDLIG a dit…

Réflexion au sujet du cartable :

Permettez à une ancienne professeur de collèges et lycées de renvoyer dos à dos un professeur d’université et un étudiant : désolée -comme on dit - mais votre confrontation et votre perception du réel sont ratées dans ce cas ci.
Je vous accorde pour circonstances atténuantes le fait que vous n’évoluez pas ou plus dans le monde scolaire des élèves plus jeunes du primaire ou du premier cycle de 6è – 5è et que vous n’avez pas prêté attention aux messages successifs diffusés dans les medias.

Vous sauriez alors que l’une des batailles (qui peut paraître certes légère par rapport à d’autres problèmes de l’enseignement et pourtant il est important) a déjà commencé à apparaître publiquement cependant il y a une vingtaine d’années : il concerne le poids des cartables que les enfants doivent porter quotidiennement. Je me souviens que les instituteurs et les parents d’élèves ne cessaient de se pencher sur cette question. Le poids des cartables était même pesé pour prouver l’excès de charge pour des corps en cours de formation, colonne vertébrale etc. Les médecins, les associations de parents et d’enseignants diverses, les medias ne cessent depuis d’alerter les responsables des établissements pour que des solutions soient trouvées - de manière à ce que les enfants n’aient pas à transporter chaque matin et chaque soir les livres et gros classeurs nécessaires pour les cours. ( par ex des casiers et de plus en plus des bagages à roulettes mais le pb ce sont alors les escaliers + le « boucan « dans les couloirs )

En attendant que cas par cas une solution soit trouvée, les parents étaient invités, ou ils ont essayé par eux-mêmes - à remédier comme ils le pouvaient à cette situation objectivement dangereuse pour la santé en portant simplement le sac trop lourd de leur progéniture lorsqu’ils l’accompagnent sur le chemin de l’école : savoir que la moyenne se situe entre dans 10-20 kgs.

Ce qui explique que la maman que vous avez vue ne faisait que remplir son devoir de maman et non un « devoir imaginaire » qui suscite critique et ironie. Dans cet exemple, la conception d’enfant-roi devenu depuis d’ailleurs enfant-tyran n’a pas lieu d’être.

Attention donc à soutenir en permanence : le réel a été confondu avec l’interprétation et l’hypothèse.

Enfin ne craignez rien je ne vous mettrai pas au piquet pour cela.

Philippe POINDRON a dit…

Chère Fourmi,

Je réponds sans tarder à vos commentaires critiques. (a) Que des enseignants demandent aux parents de porter le cartable de leurs enfants est tout smplement hallucinant. Il me semberait plus judicieux de permettre aux enfants de laisser les livres et cahiers inutiles dans leur casier à l'école, ou, de préférence, prendre l'initiative d'alléger le poids des livres ou de n'en exiger qu'un minimum. Mais le corps enseignant sur ce point ne semble pas disposé à faire sa révolution.
(b) Dans le cas qui nous préoccupe, le cartable ne me paraissait pas bien lourd, comme en témoignait le plissement du dos du blouson de la dame, qui n'eût point apparu si le poids du cartable avait été considérable.
Il me semble que les enseignants devraient faire un petit effort d'imagination pour éviter de transférer sur les épaules des parents des fardeaux qu'ils sont à même d'alléger. Est-ce trop leur demander ?
Amicalement.

Geneviève CRIDLIG a dit…

PARTIE 1

Réponse à chaque point soulevé :
* « Que des enseignants demandent...hallucinant » : je me suis sans doute mal exprimée. Ce ne sont pas des enseignants qui se seraient adressés particulièrement aux parents pour leur demander de porter des cartables mais ce fait est, il me semble, la résultante d’un faisceau d’observations, de besoins émanant aussi bien d’enseignants, des enfants, que de conseillers d’éducation , de chefs d’établissements soucieux du bien de leurs élèves et surtout des plaintes des parents eux-mêmes – en attendant comme je l’ai dit que des solutions se proposent dans les écoles... Encore que ce terme de ‘proposer’ soit insuffisant car des suggestions il y en a eu et il y en a toujours beaucoup mais le pb, c’est leur concrétisation. > Voir plus loin. Je crois donc que ce sont les parents eux-mêmes qui se sont dit qu’en attendant il fallait réagir et porter eux-mêmes.

* « Permettre aux enfants de laisser les livres et cahiers inutiles dans leur casier à l'école, » : évidemment dans mon établissement cela a été la première solution envisagée mais abandonnée un an après, pour gros pbs de fonctionnement dans le réel quotidien scolaire.
Quelques causes principales que l’utilisation a fait apparaître que je vous demande de considérer avec attention même si leur déclinaison peut sembler dérisoire:
- l’investissement financier : achat d’un casier par élève ? (> 400 – 600 700 ?)
- Une fois l’aspect financier résolu : la recherche d’espaces suffisants et accessibles à chaque classe les plus proches possible de l’entrée ou de la sortie – cf. Souvent l’existence de plusieurs bâtiments + au fait que dans les établissements anciens cette nouvelle occupation de murs ou de salles spéciales n’était pas prévue = casse tête chinois.
- Perturbations diverses qui se rajoutent à celles existantes :
- le pb lié au déplacement supplémentaire à l’arrivée le matin, ou à la récré par ex > au moins 10’ ce qui engendre des retards en cours.
- bousculades au même moment d’élèves qui veulent atteindre leur casier en même temps ou presque = bazar
- simplement en premier la perte perpétuelle de la clef par l’élève détenteur d’où impossibilité d’ouvrir ou avec le double déposé au secrétariat > Perte de temps – dérangement du personnel etc.
- surtout l’obstacle majeur : casse de la serrure , de la porte et vols constants (recherche d’objets personnels) > plaintes des élèves et des parents.
- et simplement ce qui ne se dit pas assez : le simple « plaisir » de casser et de détruire qqchose de la part de plus en plus de jeunes.
- ce qui a entraîné la présence de surveillant juste pour cela. Donc s’ils étaient là, ils n’étaient pas ailleurs + des réfections constantes des casiers devenus inutilisables au bout de quelques mois.

* « ou, de préférence, prendre l'initiative d'alléger le poids des livres ou de n'en exiger qu'un minimum. « : ce souci existe à tous les niveaux : professeurs, responsables, chefs d’établissement. Je me souviens très bien que cette question était régulièrement à l’ordre du jour dans les conseils de classe – avec des engagements précis et comptables par discipline.

Geneviève CRIDLIG a dit…

PARTIE 2

* « Mais le corps enseignant sur ce point ne semble pas disposé à faire sa révolution « : pas du tout d’accord cf. ci-dessus + le fait que l’expression « corps enseignant » est une coque vide : il n’existe pas - ou plus s’il a une fois existé. Présenter ou souhaiter une pensée, une orientation unique émanant de cette réalité est impossible : s’il y a un métier qui recouvre des ‘entités’ d’engagements, de personnalités, diverses et variées c’est bien celui-là.

* « Dans le cas qui nous préoccupe, le cartable ne me paraissait pas bien lourd » :
Sans doute dans cette circonstance mais je vois ce geste comme un rite quotidien que cette maman, au plus proche des informations qui avaient du lui être transmises directement ou via les revues ou la télé avait choisi de remplir – toujours dans le souci d’éviter au maximum un risque de santé pour son enfant. Tout ce qu’on pourrait dire c’est qu’elle exagère un peu dans la tendance d’échapper au risque zéro.
J’ajoute qu’elle devait aussi céder à ce phénomène enfermant qu’est celui du regard et du jugement des autres parents présents devant la porte de son école.

* « Il me semble que les enseignants devraient... » : idem + et voici la raison essentielle de ma réaction : bien se rendre compte que, si les enseignants essaient souvent de faire au mieux , la résolution de cette question ne leur appartient pas mais elle relève de la responsabilité et de la décision du chef d’établissement. Et ce n’est pas se défausser.

Je suis moi-même étonnée de voir toute cette liste (incomplète) de difficultés à résoudre un ‘petit’ problème. Alors les gros...
Comme toujours avant de juger de loin, il faut être dans le milieu pour saisir toutes les composantes d’une situation.
Enfin demain va surgir un pb d’une autre envergure.

Et puis Jean Ferrat est mort... Paix à lui : tant de gens l’ont aimé et l’aiment encore.