mercredi 14 avril 2010

Ne pas désespérer

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Vous avez lu, je l'espère, le cri de révolte de Romric qui commente mon billet intitulé "la tentation d'ailleurs". C'est puissant, c'est juste, c'est lucide. Et c'est un jeune homme d'une vingtaine d'année ou presque qui écrit son dégoût pour un monde qui étouffe en l'homme toute aspiration à la vie intérieure, au dépassement, à la tempérance, au respect de l'autre ; il me semble qu'ils sont nombreux ces jeunes qui répugnent au mode d'existence (c'est à dessein que j'utilise ce mot) que nous ont légué les soixante-huitards. Tout n'est pas perdu.
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Je note aussi, avant de poursuivre mon billet, qu'Olibrius, mon cher Olibrius, mon poil-à-gratter, a repris ses interventions. Il est toujours et plus que jamais le bienvenu. De sorte qu'il mettra le piment et l'impertinence qui, selon un de mes lecteurs, commençaient à manquer dans ce Blog.
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Que faire ? D'abord ne pas désespérer. Ensuite, ne jamais manquer une occasion de manifester son opposition, sa désapprobation, sa honte devant les initiatives, les avis, les jugements de ce monde : homme politique, médias, publicitaires. On pourra tourner autour du pot tant que l'on voudra. Jean, dans son Évangile le dit pourtant : "Quand la lumière est venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs oeuvres étaient mauvaises. En effet, tout homme qui fait le mal déteste la lumière : il ne vient pas à la lumière, de peur que ses oeuvres ne lui soient reprochées."
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Voilà des années que je réfléchis à une question absolument centrale pour les occidentaux que nous sommes : la raison, à elle-seule, peut elle nous incliner au bien ? Ma réponse aujourd'hui est claire : non, elle est impuissante à nous y conduire. Il lui faut une lumière qui ne vient pas d'elle. Elle peut aider alors à être attirée par cette lumière-là.
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Regardons un peu comment va le monde, depuis que la raison, avec le bienveillant concours du siècle des Lumières - quel pastiche, quelle honteuse appropriation de la Lumière par le siècle le plus ténébreux qui fut jamais -, a été promue au rang de nouvelle déesse. Il y a eu les horreurs de la Révolution, l'imparable marée d'une société industrielle exploiteuse de l'homme, les horreurs des deux guerres mondiales, la bombe atomique, les camps de concentration, les millions de mort du stalinisme, du maoïsme, les guerres civiles en Afrique et ailleurs, l'exaltation du fanatisme musulman, les désastreuses décisions d'intervention en Irak prises en s'appuyant sur un mensonge assumé et reconnu (je parle ici de la deuxième intervention américaine). Jamais la folie humaine ne s'est déchaînée avec une telle violence, une telle furie. Et nous continuons à nous détourner de la Lumière, de peur que nos oeuvres ne nous soient reprochées. On a chassé Dieu de l'humanité ; le Fils de l'homme pourtant était venu pour sauver le monde, non pour le juger. Et toutes ces décisions, toutes ces actions sont justifiées par un discours rationnel. Si émanciper l'homme de toutes les servitudes exige de tels massacres, je préfère un peu moins d'émancipation, et un peu plus d'humilité.
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Notre patrie tient dans le monde, à cet égard, une place toute particulière. La France est capable du meilleur comme du pire. Je n'hésite pas à dire qu'elle ne cesse de balancer entre la ténèbre (j'y reviendrai) et l'héroïsme. Il faudra bien un jour que le politique se décide à choisir l'héroïsme contre l'inclination aux oeuvres ténébreuses, et il faudra bien qu'un jour aussi on donne un nom à cette puissance maléfique qui fait qu'on peut presque tuer dans la nuit son semblable pour une cigarette refusée sans que quiconque, et surtout pas les médias, s'interroge sur les raisons profondes qui ont poussé une bande de "jeunes" (?) à un tel acte. Notre espérance, notre indéracinable espérance, est que tout royaume divisé contre lui-même est voué à disparaître. Et que la Croix a déjà vaincu le Prince de ce monde.

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