mardi 10 mai 2011

A propos de Ben Laden et des milieux existentiels

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Je vous avais fait hier matin une promesse de gascon en vous annonçant un second billet dans la journée. Je n'ai pas trouvé le temps nécessaire pour le rédiger. Je vais essayer de rattraper le retard.

Tout d'abord je voudrais bien réaffirmer que BEN LADEN était à mes yeux un criminel et qu'il méritait d'être jugé et châtié. Ce que je critiquais dans cette affaire c'est le "justice est faite", et la joie de nombre d'américains à l'annonce de cette mort, joie que je continue à trouver déplacée. Le fondement d'un acte moral consiste à ne pas infliger à autrui des torts, des tortures, des blessures, des insultes que l'on ne voudrait pas qu'il nous inflige. Aucun de nous ne peut prétendre qu'il aurait accepté d'être tué par un groupe de taliban (pas de s à taliban) ou de djihadistes. Peu importe le fait avéré que BEN LADEN ait été un criminel. L'agir moral exigeait un jugement. En somme le milieu existentiel des new-yorkais remplis de joie par cette mort était le milieu naturel certainement, et pour certains d'entre eux le milieu utilitaire, mais certainement pas le milieu moral et encore moins le milieu transcendant.

Maintenant, le réalisme politique et la politique (qui est l'art du possible) faisaient qu'il était sans doute impossible de juger BEN LADEN puis de l'exécuter ou de l'emprisonner en châtiment de ses crimes, au terme d'un procès équitable. Mais cela s'explique, cela est compréhensible, et cela ne se fait que par l'incapacité à faire autrement. Théorie du moindre mal, et non accomplissement de la vengeance.

Il est évident que nombre de dirigeants communistes, qu'ils soient soviétiques ou chinois, ont été les promoteurs et les inspirateurs de crimes abominables. Et je réponds là à Pierre-Henri THOREUX. Les premiers l'ont payé de la chute de l'empire soviétique. Et les seconds seront un jour mis en face de la réalité qu'ils ont construite à coups de fusil, de chars, d'exécutions sommaires et d'emprisonnements : le peuple chinois, ses penseurs et ses élites ont commencé ce lent travail de mise à bas du mensonge, de la violence et de la tyrannie. J'ai consacré de nombreux billets à des auteurs chinois dissidents et je crois que leurs analyses sont fondées et prophétiques.

Il me faut enfin répondre à une objection que je vois poindre : BEN LADEN, me dira-t-on, agissait au nom de Dieu et pour son honneur. Il proclamait qu'il était dans ce milieu existentiel transcendant que vous semblez tant vanter me diront donc certains. Erreur d'analyse. BEN LADEN n'était que dans le milieu utilitaire. Et les américains l'on bien compris qui distillent des videos montrant un homme très différent de ce qu'il voulait paraître. Or le propre de l'être qui vit dans un milieu transcendant est d'être ce qu'il est, et de paraître tel qu'il est. Il y a chez cet être-là une correspondance parfaite de l'intérieur et de l'extérieur. De plus en violant la règle fondamentale de la réciprocité qui fonde l'agir moral, BEN LADEN n'avait même pas franchi le seuil du milieu moral.

Je ne sais si j'ai expliqué les raisons de mes interrogations. Mais enfin ce billet m'a permis de mettre au clair ma pensée.

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