mardi 28 juin 2011

Réponse à la question d'un lecteur

-
Que pensez-vous de la peine de mort, me demande un(e) lecteur (trice) dans un commentaire fait hier ? Je note d'abord qu'il (elle) en est partisan(ne), qu'il (elle) donne des exemples effroyables de crimes horribles, et qu'à entendre leur description, on comprend l'envie qui nous prend de supprimer les monstres qui les ont commis. Mais CORATINE sait que je suis un farouche opposant à la peine de mort
-
Je vais essayer d'expliquer le plus clairement possible pourquoi. La peine de mort peut satisfaire à deux fins : (a) la prévention des crimes ; (b) la réponse de la société, une fois le crime commis. Il faut donc examiner l'adéquation de la peine et des objectifs visés.
-
Pour autant que j'ai pu lire sur le sujet, il ne semble pas que la peine de mort ait un effet dissuasif sur les sujets violents, souvent compulsifs, qui agissent sous le coup de la colère ou de la passion, et qui de toute façon espèrent bien échapper à la peine en se cachant, en fuyant, en faisant usage de toutes les astuces qu'un esprit faux peut avoir en tête. Il s'agit là du premier type de crime, que l'on peut ranger dans la catégorie des "crimes passionnels". Il y a aussi les crimes prémédités. Ils soulèvent bien des questions. Planifier, organiser un meurtre suppose un sang-froid et une cruauté glaciale. Ce sont en général des pervers qui en sont responsables. La mort ne leur fait pas plus peur que la mort qu'ils infligent à autrui, et là encore, je doute de la valeur dissuasive de la peine capitale. Je ne parle pas des crimes affreux commis par les esprits dérangés. Là encore, effet dissuasif nul. Il faut toutefois signaler que du temps où elle existait, la peine de mort empêchait les truands de tuer les policiers ou les membres des forces de l'ordre pour se protéger. C'était là un réel effet dissuasif.
-
La réponse de la société aux crimes et criminiels consiste à retrancher de la société des hommes, des hommes qui ne sont plus jugés dignes d'en faire partie. Il s'agit là tout simplement de l'assouvissement de l'esprit de vengeance lequel ne résoud rien. Elle suppose qu'il n'y a pas de rédemption possible pour ces criminels. J'ai là à dire deux choses : la première, c'est qu'un homme convaincu de crime, et de crime affreux, doit être privé de liberté, effectivement, réellement, et pour le restant de ses jours, sans possibilité de libération anticipée. Il faut pour cela disposer de prisons adaptées qui ne transforment pas les prisonniers en bêtes fauves, prêtes à tout ; la seconde est qu'infliger la mort à un criminel revient à estimer qu'il lui est impossible de changer, qu'il n'y a pas de rédemption possible pour lui. Or l'histoire pénitentiaire montre qu'en prison, condamnés à mort ou non, souvent se convertissent et finissent comme des saints ou des mystiques. On connaît l'histoire de Jacques FESCH qui rentrent dans la catégorie des premiers. On connaît moins l'histoire de ce responsable khmer rouge qui a rencontré la foi, a demandé pardon à ses victimes et accepte par avance le jugement des hommes. En somme, il ne faut jamais désespérer de l'homme, jamais l'enfermer dans un acte ou dans une parole, fussent-ils criminels.
-
Je ne sais pas si j'ai répondu à CORATINE de manière satisfaisante. Mais j'ai essayé de le faire le plus honnêtement possible.

3 commentaires:

CORATINE a dit…

Je savais ce que vous alliez me dire. J’avais déjà préparé un deuxième commentaire que je voulais mettre lundi soir après avoir réfléchi et m’être dit que je n’avais pas dit tout ce que j’avais envie de dire. Et puis, j’ai hésité. Je ne l’ai pas fait. Mais suite à votre réponse, dont je vous remercie, je vous le transmets tel que je l’ai écrit ce jour-là, parce que j’avais anticipé votre réaction, ayant reçu les bases de la chrétienté.

« Vous avez probablement le souhait de me dire que je fais fausse route, de me parler aussi de la rédemption par la souffrance, qui fait que ces enfants sacrifiées monteront directement au Paradis. Vous aimeriez aussi me parler de cette religion chrétienne qui dit qu’il faut savoir pratiquer le pardon. Ainsi que le désir de me rappeler la parole de Jésus qui a incité ses fidèles, dans le Sermon sur la Montagne, à « tendre l’autre joue» lorsqu’ils étaient frappés. Mais, dites-moi, pardonneriez-vous aux tortionnaires, si vous étiez le père de Marie-Jeanne, de Marie Trintignant, de Géraldine Giraud, de Laetitia, d’avoir supplicié et brûlé votre enfant ? Vous sentiriez-vous plus près du Créateur ? Tendriez-vous l’autre enfant à ces tortionnaires ? »

Ce n’est pas de la valeur dissuasive de la peine de mort dont je parle, ce n’est pas l’exemple qui m’importe, c’est la suppression pure et simple d’individus qui n’ont pas respecté la vie d’autrui, et surtout qui ont pris PLAISIR à les supplicier longuement.

Vous dites : « Ils agissent sous le coup de la colère ou de la passion », donc il faudrait les disculper parce qu’ils n’ont pas su se maîtriser, qu’ils n’ont pas été des hommes maîtres de leurs pulsions, mais des animaux, incapables de se contrôler, et cela, pendant de longues heures où ils se sont repus de la souffrance de leurs victimes ?

Il ne s’agit pas de réintégrer ces individus dans la société. Demandez à Jean-Louis Trintignant s’il est heureux d’entendre à nouveau Bertrand Cantat, libéré 4 ans après le meurtre de sa fille, se produire à nouveau dans de joyeux concerts sans honte ni remords !

Peu nous importe qu’ils regrettent, qu’ils se convertissent à la foi religieuse, qu’ils deviennent des « saints » !!! Ou surtout qu’ils fassent semblant !!! Vous saviez bien que vous alliez déchaîner ma colère. Nos enfants sont morts, après avoir souffert des heures et des heures, voire des jours (imaginez-vous cela un instant!, représentez-vous exactement ce qu'ils ont pu subir, si vous avez un tant soi peu d'imagination, ce dont je ne doute pas, on ne peut pas s'attarder là-dessus, sous peine de devenir fou), ce n’est pas la reconversion de ces criminels qui va les ressusciter. A qui l’on va offrir le gîte et le couvert pendant toute leur vie ! Et même le paradis , selon vos dires !

CORATINE a dit…

Je vous demande de m’excuser, cher Monsieur Poindron, de ces propos violents mais nous parlions d’instinct, instinct de reproduction, instinct de survie, je ne peux pas supporter que l’homme ne puisse contrôler ses instincts, ou alors, c’est une bête sauvage et malfaisante !

Et lorsque vous dites cette phrase dans votre Billet Compensateur n°1 : « Jusqu'à preuve du contraire l'appareil sexuel de l'être humain sert à deux fins : l'une est le plaisir, tout à fait légitime, l'autre la procréation. L'homme contemporain étant foncièrement auto-centré, il est heureux pour l'avenir de l'espèce que le sexe soit un moyen de plaisir, car il y a fort à parier que, dans le cas contraire, la population mondiale n'aurait pas cette dimension.», que pensez-vous exactement ? Que Dieu a créé le plaisir pour obliger l’homme à se reproduire ? Qu’il a mis dans le corps de l’homme tous ces points de stimulation érotique reliés au cerveau pour lui procurer cette jouissance forcenée qui fait que certains sont prêts à tuer et à supplicier pendant des heures pour se la procurer ? Donc, d’un côté, vous excusez les criminels et croyez en leur sainteté hypothétique et, d’un autre côté, vous pensez que l’homme a besoin d’être boosté par ce même plaisir pour se reproduire ? Mais si l’homme n’éprouvait pas ce plaisir, ce serait peut-être triste pour tout le monde, mais peut-être cela éviterait-il les viols, et les tortures et les assassinats de centaines de personnes dans le monde, en même temps que toutes ces déviances sexuelles que vous pensez pouvoir être corrigées ??

Je suis désolée, cher Monsieur Poindron, je vous aime beaucoup, ainsi que votre culture, qui m’apporte tant de choses, mais sur ces sujets-là, je n’arrive pas à tomber d’accord avec vous. Ni avec la religion.

Philippe POINDRON a dit…

Je répondrai à vos remarques à tête reposée, chère Coratine. Elles méritent d'être prises en considération. Je vous indique tout de même que je suis pour une véritable réclusion A VIE de tous ces monstres. Je l'ai explicitement dit dans ce billet.
Bien amicalement.