jeudi 7 juillet 2011

Du fondamentaliste et du révolutionnaire

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L'actualité est tellement riche que j'ai longuement hésité avant de choisir le sujet du billet de ce jour. Finalement, je crois que je vais l'aborder, cette actualité, d'une manière plus générale, dans l'espoir que cette petite réflexion vous aidera à mieux cerner les enjeux des événements qui secouent notre monde.
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Au premier abord, et à entendre les médias occidentaux, il y aurait deux sortes d'hommes. Les uns ne veulent rien changer à ce qui leur semble être la volonté divine ; ce sont les fondamentalistes. On en trouve aussi bien chez les musulmans que chez les chrétiens ou les hindouistes. Malheur à ceux qui s'opposent à leurs diktats. Ils le payent de leur vie ou de la relégation dans les ténèbres de l'impiété. On peut les classer, et on les classe dans la catégorie des conservateurs. Les autres, au contraire, pensent que l'homme a en main toutes possibilités, liberté et aptitude pour modifier le monde en général et l'état des choses politiques en particulier, qu'il n'est l'esclave d'aucun loi donnée a priori, qu'il ne dépend ni d'un dieu, ni d'un maître, qu'il est à lui-même sa propre mesure, et qu'il a le droit de définir les règles qui définissent la valeur morale d'un acte. Ils sont révolutionnaires. On les appelle les progressistes. Malheur à ceux qui s'opposent à leur frénésie de changement. Ils le payent de leur vie, de la prison, du mépris ou de la dérision, ou encore de l'exclusion du monde de ceux qui comptent.
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En 1968, et ce n'est pas un hasard, Jacques RUEFF a fait paraître la troisième édition, revue et corrigée de son livre Les dieux et les rois Regard sur le pouvoir créateur (Hachette, Paris). Il y opposait les adorateurs de ZEUS le tout puissant aux cohortes empressées des amis de PROMÉTHÉE, l'audacieux qui avait défie les dieux en leur dérobant le feu. Il dit des choses passionnantes et terrifiantes, Jacques RUEFF. Et notamment qu'il suffit de modifier l'environnement humain, c'est-à-dire la pression de sélection qui pèse sur l'humanité, pour faire émerger un homme nouveau. Il ne prend pas vraiment position sur cette prétention. Mais il ne donne pas vraiment l'impression de s'y opposer.
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Tout à fait de l'autre côté, il y a mon cher Marcel de CORTE. Combien de fois vous ai-je parlé de son ouvrage L'intelligence en péril de mort ? Je ne saurais pas le dire, mais enfin ce fut souvent. Rappelons ici son point de vue : "Si l'intelligence n'est plus mesurée par ce qui est et qui ne dépend pas d'elle, par des natures qui ne changent pas, il n'y a plus de vérité. Ostraciser la sagesse spéculative équivaut rigoureusement à bannir toute certitude objective. Or s'il n'y a plus d'objectivité, il n'y a plus de moralité, car l'action morale présuppose que nous connaissons la nature de l'homme qu'il importe de diriger et celle de la fin où il faut qu'il se dirige. Nihil volitum nisi praecognitum." Et un peu plus loin : "L'homme moderne [...] est entré sans retour dans le Royaume de l'Imaginaire. N'ayant plus de contact effectif avec les êtres et les choses, il ne sait plus, il est obligé de croire".
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Je n'ai jamais dissimulé ma qualité de chrétien. Je suis heureux d'être disciple (un pauvre disciple, certes). Et jamais non plus, je n'ai caché ma passion, celle de comprendre, de savoir, de découvrir. Et bien voici une découverte littéraire péchée dans un livre de Jean-Claude GUILLEBAUD, Comment je suis redevenu chrétien. L'homme de lettre cite ce cri d'Albert CAMUS, et il vaut la peine de le répercuter ici :
"Ce que le monde attend des chrétiens est que les chrétiens parlent à haute et claire voix, et qu'ils portent leur condamnation de telle façon que le doute, jamais un seul doute, ne puisse se lever dans le coeur de l'homme le plus simple. C'est qu'ils sortent de l'abstraction et qu'ils se mettent en face de la figure ensanglantée qu'a prise l'histoire aujourd'hui."
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Ni robots, ni démiurges, nous, chrétiens, devons revendiquer hautement les valeurs humaines dont Jésus fut le révélateur. Oui, il fut un Maître en humanité et non point en démagogie. Il releva, purifia et justifia, et continue de relever, purifier et justifier ceux qui le confessent comme sauveur. Il nous libère de la culpabilité pour nous faire rentrer dans l'Alliance. Allons ! Ouste ! Courage, il nous faut parler à temps et à contre-temps, et agir dans la discrétion qui sied à l'exercice d'une vraie charité.

2 commentaires:

Goéland a dit…

Je ne comprends pas bien cette phrase:
"N'ayant plus de contact effectif avec les êtres et les choses, il ne sait plus, il est obligé de croire".

-en particulier le sens ici de "croire" ???
En quoi? en qui? ou simplement croire ce qu'on dit, ce qu'on entend sans le savoir de façon certaine.
Une certitude fondée non en soi-même mais venant de l'extérieur???

Philippe POINDRON a dit…

Croire signifie ici donner son adhésion à des idées ou des affirmations dépourvues de tout fondement rationnel. Un chrétien croit en Dieu, mais il n'est pas irrationnel de croire en Dieu ; il croit qu'il y a eu une création, mais ce n'est pas irrationnel. Dans le foi (et pas la croyance), il y a simplement un saut dans l'inconnu, à faire au terme d'un chemin que tout homme peut suivre. J'epère que j'ai éclairé votre lanterne. Bien amicalement.