dimanche 31 juillet 2011

La dictature du relativisme

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Je ne l'ai pas trouvé dans une officine lefébristes, ni dans une librairie pieuse et bigote, mais dans une très célèbre et érudite maison de la rue Bonaparte, siège d'un éditeur établi là depuis longtemps. Vous aurez reconnu, j'en suis sûr, la librairie PICARD, dont les manuels d'archéologie, pour ne citer qu'eux, sont irremplaçables. Couverture noire, sévère, et titre en rouge et blanc : La dictature du relativisme  que l'on doit au Pr Roberto de MATTEI, m'a immédiatement intéressé. Et je me suis procuré, pour 14 euros, cet essai que je qualifierai de remarquable.
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On y retrouve des vérités simples qui habitent confusément notre esprit, par exemple que la famille est antérieure à toute forme de société politique. De MATTEI indique (page 27) que "La négation de la famille traditionnelle est inscrite dans le plan de toutes les utopies révolutionnaires, parce qu'elle propage une conception organique et harmonieuse de la société et des relations humaines qui lui sont contraires. De fait, le milieu familial reflète l'unité, la diversité, la hiérarchie de l'univers et la stabilité des principes moraux qui doivent régir la société".
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Déjà dans son introduction, de MATTEI avait planté le décor : "Le grand débat de notre temps, j'en suis convaincu, n'est pas de nature politique ou économique, mais culturelle, morale et, en dernière analyse, religieuse. Il a pour objet le conflit entre deux visions du monde : celle qui croit à l'existence de principes et de valeurs immuables, inscrits par Dieu dans la nature de l'homme, et celle qui estime que rien n'existe de stable et de permanent, mais que tout est relatif aux temps, aux lieux et aux circonstances." Mes plus anciens lecteurs savent qu'à travers mes billets, c'est exactement le point de vue que je m'efforce de défendre, avec un bonheur relatif, j'en conviens, et sans l'armature philosophique suffisante pour démonter les sophismes dont nous abreuvent les mauvais bergers. Figurez-vous que dans la Préface de cet ouvrage, due à Guillaume de THIEULLOY, on apprend que peu avant son élection, et pendant sa campagne, Jacques CHIRAC avait solennellement déclaré : "Non à une loi morale qui primerait la loi civile". Ceci revient à dire que la loi a tous les droits et livre le citoyen à "l'arbitraire le plus funeste". Je maintiens donc que si le citoyen doit obéissance à la Loi, tant qu'elle ne viole pas la loi naturelle, il a le devoir de résister à tout ce qui offense cette dernière.
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C'est un très vieux débat. Les imbéciles qui pullulent dans les couloirs des assemblées nationale, régionales, départementales, consulaires, syndicales, universitaires, etc. devraient méditer ce que disait le grand CICERON (non, pas l'espion, l'autre, l'écrivain latin) dans son traité intitulé De Republica (intéressant que ce titre, non ?) : "Il n'y aura point une autre loi à Rome, une autre à Athènes, une autre maintenant, une autre après, mais une même loi, éternelle et immuable régira tous les peuples, dans tous les temps ; et celui qui a porté, manifesté, promulgué cette loi, Dieu, sera le seul maître commun et le souverain monarque de tous ; quiconque refusera de lui obéir se fuira lui-même, et, renonçant à sa nature humaine, par cela même il subira de très grandes peines, quand même il échapperait à ce qu'on appelle ici-bas des supplices."
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Tout est dit, et par un homme politique qui ne connaissait pas Jésus, ni les droits de l'homme ; il ne connaissait de l'homme que sa nature humaine.

2 commentaires:

Pierre-Henri Thoreux a dit…

La réflexion que vous proposez aujourd'hui est comme d'habitude fort intéressante, cher M. Poindron. Permettez-moi d'y contribuer bien modestement. Je déplore tout comme vous qu'on puisse faire passer la loi civile avant la loi morale. C'est tout aussi absurde que de mettre la charrue devant les bœufs. Je ne saurais trop rappeler l'enseignement du vénérable Kant. La loi morale que chacun ressent en son for intérieur, aussi certaine que l'existence de la voûte étoilée au dessus de nos têtes, relève de l'impératif catégorique. Tout découle donc d'elle. Mais le génie de Kant consiste à montrer qu'elle s'impose à nous, sans qu'il soit nécessaire de faire référence à Dieu. Car elle ne prouve ni n'infirme son existence. Cela me semble fondamental. On a tellement fait parler Dieu, on a tellement fait de mal en tyrannisant les peuples au nom de Dieu, ou de la prétendue volonté divine, qu'il convient sur le sujet, d'être particulièrement prudent...

Philippe POINDRON a dit…

Cher Pierre-Henri, je reviendrai sur vos remarques. Le vénérable KANT ne m'enthousiasme pas. Son idéalisme a conduit au totalitarisme le plus barbare comme l'a si bien montré le très regretté Maurice CLAVEL dans son livre "Deux siècles chez Lucifer". Je viens de relire (un ami comprendra pourquoi) les réfutations des preuves de l'existence de Dieu par KANT et notamment sa réfutation de l'argument ontologique. Il me semble que cette réfutation détruit l'édifice de sa propre philosophie. En effet si le concept d'un Dieu nécessairement existant ne reste, selon le grand philosophe, qu'une "idée" du nécessaire existant, alors le raisonnement s'applique à tous les concepts. Ils ne sont que des idées et rien ne prouve qu'une idée ait prise sur le réel. Marcel De CORTE, un très grand philosophe belge, ignoré et méprisé parce que chrétien, dit ceci du concept : "Le concept est le fils des noces de l'intelligence et du réel". L'impératif catégorique est, selon moi, porteur en lui-même d'un principe de mort. On peut parfaitement imaginer qu'une norme civile soit acceptée par l'humanité entière et qu'agir de manière à ce que l'action satisfasse à l'exigence d'universalité (alors apparente) aille à l'encontre de la loi naturelle. Voilà des années que je réfléchis à cette question. Je ne vois pas comment échapper à ce dilemne : ou bien il y a une loi naturelle voulue par Dieu, ou bien la norme est définie par des principes qui vont ensuite nourrir le droit positif. C'est alors le triomphe des groupes de pressions (pro-euthanasie, pro-mariage homosexuel, pro-avortement, pour ne parler que des plus actifs dans les institutions internationales) et la dictature du relativisme. Il n'est pas possible de dire aujourd'hui (le pauvre député VANESTE en sait quelque chose) que l'hétérosexualité est supérieure à l'homosexualité, que l'avortement demeure un crime contre l'enfant à naître, que l'euthanasie revient à se prendre pour Dieu qui donne et reprend la vie. Il ne s'agit pas de condamner des personnes,souvent dans la détresse, ou la culpabilité, parce qu'elles ont avorté ou qu'elles sont homosexuelles. Il s'agit de dire ce qui est juste et vrai et qu'aucun être humain n'a le pouvoir de changer. Il me paraît préférable de se pencher avec amour, compassion et miséricorde, sur ceux qui souffrent, en plaçant la relation sur un stricte pied de symétrie. Un frère ou une soeur en humanité est un frère et une soeur en humanité ; c'est un principe fondateur de la loi naturelle. Mais je reviendrai, je l'ai dit, sur cette question. Merci pour vos commentaires et vos très beaux billets (les amoureux de la liberté ;libertylovers.blogspot.com pour ceux de mes lecteurs qui viendraient à lire cette réponse).