vendredi 6 janvier 2012

J'ai craqué

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Je m'étais promis de ne plus parler de mon très cher Gustave (je veux parler de Gustave THIBON) pendant un certain temps, disons un mois. Mais, entendant les âneries d'Eva JOLY, les phrases creuses de François HOLLANDE, les rodomontades de Jean-Luc MELANCHON, et pensant toujours à la belle définition du comportement de l'idéologue et du fer rouge qui marque le front des idéologies (de toutes les idéologies ; souvenez-vous : leur caractéristique est de ne pas se soucier de l'homme concret [voir mon, billet d'hier pour un horrible exemple des méfaits de l'idéologie]), j'ai craqué. Voici donc ce que le philosophe-vigneron dit (il le dit en 1935, mais le propos n'a pas pris une ride ; il a même rajeuni, à croire que les socialistes contemporains ont barbouillé leur catéchisme avec une crème revitalisante de l'Oréal, par ce qu'il le vaut bien) :
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"« Personnalisme » de l’homme moderne, imprégné de socialisme. – Le socialisme veut favoriser l’épanouissement de la personne. Loin d’être niveleur, nous dira-t-on, il tend, en libérant l’individu de toute contrainte (classes, traditions, religions, etc.) à conduire chacun à son optimum de rendement personnel ou social. « Dans une démocratie, écrit HERRIOT, l’individu ne connaît d’autres limites à son ascension que celles de son propre effort.»

"Je réponds : le socialisme est déjà niveleur à la clef en tant qu’il supprime entre les hommes toutes différences autre que celles des aptitudes et des réussites individuelles (à n’user que de ce critère, souvent superficiel, on désorganise la hiérarchie sociale qui exige des bases lointaines, des racines profondes…) Mais ceci n’est encore rien. Cet homme soi-disant « concret » que le socialisme veut délivrer, qu’est-il donc en vérité ? Un microcosme fermé, asphyxié, un individu que ne baigne plus le fluide vital des grandes continuités humaines (hérédité, patrie, religion…), un être séparé de la plus concrète réalité humaine, quelque chose d’abstrait, d’arraché, - au sens le plus précis et le plus cruel du mot. L’homme concret authentique : il a le sens de sa dépendance et de sa finalité organique, le sens de cette destinée extra-individuelle qui limite et harmonise sa liberté… Mais l’homme « concret » au sens de la mentalité actuelle, quelle froide abstraction ! Cet individu absolu qui n’a plus d’aïeux, plus de patrie, plus de Dieu, comment pourrait-il vivre ? Trouve-t-on en soi-même l’air qu’on respire ? " (In Parodies et mirages ou la décadence d'un monde chrétien, page 102).
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TAINE, THIBON, RIFKIN, FENG YOULAN, tous ces penseurs et historiens que l'on ne cite pas car ils pensent mal (notamment aux yeux des Sociétés de Pensée que nous connaissons et qui ont fait plus de tort à notre patrie que les hordes d'ATTILA, des Normands, des Wisigoths et des Ostrogoths réunies) ont comme mérite de parler de l'homme concret, de l'expérience incarnée, de la vie dans ce qu'elle a de quotidiennement relationnelle, d'organique, de joyeux, d'émouvant ou de dramatique. Et c'est pourquoi je vous en ai souvent parlé. Nous en avons ras la casquette de tous ces anathèmes fulminés par des hommes qui ont le verbe haut, le goût des abstractions, et sont capables de vous dire que la neige est noire et qu'il fait nuit en plein midi. Si je fustige la gauche, c'est qu'elle dénigre, critique, démolit tout ce que font les responsables, mais qu'elle ne dit pas avec quel ciment elle entend reconstruire ce qu'elle a si allègrement pulvérisé. Des imbéciles, vous dis-je, des imbéciles au sens de BERNANOS.
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C'est tout pour aujourd'hui.

4 commentaires:

marjou a dit…

BONJOUR MEILLEUR VOEUX tu me donne l idée de relire Gustave Tibon mais ne serais tu pas un réac idéologiquement par réaction anti idélogique

marjou a dit…

erratum meilleurs voeux et Thibon

tippel a dit…

UN PROCES INIQUE.

Il fut intenté à Rouen contre Jeanne. Il réunissait pourtant toute l’élite de l’Église officielle. Cent vingt hommes y participèrent, parmi lesquels un Cardinal, (prince de l’Église), un bon nombre d’évêques, des dizaines de chanoines, soixante docteurs en droit canon ou théologie, dix abbés, dix délégués de l'Université de Paris, la crème de la crème de la science ecclésiastique.
Face à eux une bergère; malgré ses répliques remplies de bon sens, elle était perdue d’avance, comme paraissait préalablement condamné le fils d’un charpentier convoqué devant le Sanhédrin. Les Anglais exercèrent sur le tribunal présidé par l’évêque de Beauvais CAUCHON une pression telle qu’elle rappelait celle du peuple qui manipula un autre procès et influença grandement la décision de Ponce-Pilate. Hélas, les ecclésiastiques ne sont pas à l'abri de céder, au détriment du bien commun, le pas à l'idéologie de l’époque, au pouvoir ou à l'opinion du temps.
Leurs verdicts, loin d'exprimer la volonté de Dieu ne firent que trahir le mandat qui leur a été confié.
Jeanne fut condamnée à mort. On lui lit la sentence d’excommunication, qui revêtait toute la solennité que lui conféraient les représentants officiels de l’Église.
Elle gravit les marches du bûcher qui devait la consumer, officiellement réprouvée par la Sainte Institution dont les dépositaires lui indiquèrent dans le verdict, avec toute l’hypocrisie qui se devait, qu’ils pensaient sincèrement qu’elle, Jeanne, aurait dû « préférer demeurer fidèlement et constamment dans la communion, ainsi que dans l’unité de l’Eglise catholique.» On l’affubla d’une coiffe sur laquelle furent inscrits les chefs d’inculpation que ses détracteurs répétaient à l’envi : « hérétique, schismatique et relapse ».

tippel a dit…

suite:
Quelle douleur plus cruelle y a-t-il pour les vrais serviteurs de l’Église que de se sentir isolés au soir de leur vie, rejetés par ses autorités tandis qu’on cède parfois les places d’honneur à ceux qui malmènent les vérités essentielles. Jésus, abandonné par ses disciples, n’avait-il pas été condamné à être crucifié, alors qu’on libérait en échange Barabbas, le pire des brigands !
Jeanne monta vers le martyre. Sa peau allait rougir, ses cheveux devaient griller et ses membres allaient être carbonisés par les flammes et déjà, certains de ses accusateurs, comme Loyseleur, s’approchèrent en toute hâte de la charrette qui la menait au supplice pour la conjurer de lui accorder le pardon.
Son bourreau s’enfuit éperdu et tomba à genoux devant un frère prêcheur : "Je crains fort d’être damné car j’ai brûlé une sainte" Au cours du procès de Jeanne, parmi ceux qui utilisèrent les titres les plus sacrés pour proférer des sentences qui apparurent comme autant d’abus d’autorité, il y eut les calculateurs, comme le comte de Warwick, comme Pierre Cauchon qui se démena pour obtenir la mort de Jeanne. Siégeaient aussi parmi ces instances, les suiveurs, les lâches qui firent le lit de l’accusation, à l’image de l’abbé de Fécamp, lequel, non sans fausse humilité, se prétendit incapable de parler après « tant et de tels docteurs, que leurs pareils ne sont peut-être pas trouvables dans l’univers ». Comme Ponce-Pilate, il se lava les mains, cautionnant ainsi les pires et laches délateurs.