jeudi 24 janvier 2013

Révolution pas morte...

J’ai achevé, il y a quelques jours, la lecture du livre que Jacques SOLÉ a consacré à la Révolution en s’appuyant notamment sur les travaux d’historiens anglais ou américains, dont Donald SUTHERLAND. Je suis frappé par la ressemblance de la situation de la France révolutionnaire (1792 – 1794) avec la situation de la France d’aujourd’hui. Voici des extraits de ce livre intitulé La Révolution en question. (Collections Points, série Histoire, N°H 18. En rouge, vous trouverez les commentaires relatifs à la situation contemporaine. Désolé d’être un peu long. Mais ces éléments permettront de mieux comprendre la réponse que je ferai à Aerelon sur le déclin historique progressif de la France depuis 1800, un déclin qui s’accentue depuis le début du XXe siècle et se précipite au début du XXIe. Je signale par honnêteté que le présent exercice a les limites propres à toutes les décontextualisations.


À propos de la Loi sur le mariage homosexuel.

Beaucoup d’historiens admettent que la Constitution civile du clergé, votée par l’Assemblée en 1790 et qu’elle commença à imposer dès l’année suivante, représenta un tournant capital dans le déroulement de la Révolution. En s’opposant à la majorité des évêques et à la moitié au moins des prêtres et des fidèles, ses dirigeants heurtèrent la conscience d’une bonne partie de leurs compatriotes, préparèrent un schisme et favorisèrent la naissance d’une guerre civile. S’il est facile de le constater, il l’est moins de l’expliquer.

À propos de la prétendue déliquescence actuelle de l’Eglise catholique.

Le schéma classique de curés opposés à leurs évêques et acquis au Tiers-États est remis en cause par J. SOLÉ. "Ce schéma, dit-il, néglige une étude en profondeur de l’’Eglise française du XVIIIe siècle par rapport à la société dont elle fait partie. Toujours omniprésente et fort puissante, en liaison étroite avec l’État, Elle y a pris un nouveau visage, plus conforme à la réforme catholique inaugurée à la fin du XVIe siècle. Mieux formés, ses prêtres y font l’admiration de tous pour leurs sens de leurs devoirs moraux et sociaux. Leur pastorale, à la fois active et austère, contribue à une christianisation des masses qui semble en accord avec les valeurs bourgeoises et populaires du temps. On sait que la ferveur ne manquait pas dans la France des Lumières. Jean QUÉNIART s’est demandé si celle-ci n’avait pas vu s’établir, en fin de course, un certain nombre de malentendus entre son évolution et l’état de l’Église gallicane. L’individu tendait souvent à s’y émanciper par rapport à ses enseignements, la pensée à s’y laïciser, le clergé à s’isoler dangereusement, au moins d’une société urbaine d’un type nouveau. Au demeurant, les pauvres de PARIS, à la fin du XVIIIe siècle, restaient attachés aux formes anciennes de leur dévotion et de leurs croyances. Longtemps admirateurs des miracles jansénistes, ils n’étaient pas encore devenus des militants de la déchristianisation.

À propos de la haine contre les « riches » et de la chasse aux sorcières menée contre eux.

La mentalité du terroriste « moyen », selon Richard COBB, est caractérisée par un faible sens de l’humour et une immense crédulité politique, née d’une grande ignorance des réalités. Faisant de la dénonciation la première des vertus civiques, les sans-culottes ont divinisé la répression par souci de régénération nationale.

À propos des bobos énarques et de leur terrorisme intellectuel et de la manière dont ils profitent de la République.

Telle fut la toile de fond de l’activité des militants jacobins. Peu, comme l’a noté Marie-Thérèse LAGASQUIÉ à propos du cas toulousain, se soucièrent des « classes vraiment déshéritées de la société », dont la lutte contre la faim les avait pourtant portés au pouvoir. 55 des 293 « buveurs de sang » répertoriés à TOULOUSE étaient de grands bourgeois, dont 21 négociants. 133 artisans, sans doute, les entouraient, mais il n’y avait aucun pauvre parmi eux. Ces terroristes méridionaux avaient été dirigés par de riches notables, souvent préoccupés de s’enrichir encore au moyen de la Révolution.

À propos des petits groupes locaux de militants (genre Jeunes socialistes qui entendent dresser une carte de France des élus qui, selon eux, auraient tenu des propos homophobes).

La Terreur trouve son explication, sur le plan local, dans la vengeance de groupes ou d’individus autrefois exclus, soldats à LILLE, domestiques à VERSAILLES, commerçants à BORDEAUX.

À propos de la révolte actuelle des agriculteurs qui se voient obligés de se soumettre au diktat des culs-de-plomb à manche de lustrine qui règnent dans les couloirs (surtout les couloirs ; c’est là où circulent les bruits et se font les réputation) des palais européens de Bruxelles.

Les campagnes en payèrent les prix [rationnement et boulangeries publiques ; menaces envers les spéculateurs], même en dehors des zones de guerres. Les prix agricoles avaient été fixés en dessous du prix de production et le papier monnaie recommença à perdre de sa valeur en janvier. Cela vicia l’application du maximum par les fournisseurs mal payés.

À propos de madame DUFLOT et de ses menaces de réquisition des locaux qui seraient vides, et appartiendraient au Diocèse de Paris ; à propos de la morale laïque de monsieur PEILLON ; à propos des propos (si je puis dire) violemment anti-chrétiens tenus dans les médias ou au gouvernement (ah ! l’obscure madame DELAUNAY et sa charge imbécile contre l’opinion qu’elle prête aux catholiques actuels sur la Sainte Famille s’ils avaient vécu à son époque !)

Ce processus [de déchristianisation active], inauguré en 1792 réapparut avec force à l’automne de 1793. Il se compliqua cette fois d’iconoclasme et d’anticléricalisme. Si les églises furent transformées en casernes ou en arsenaux, la destruction, en cérémonie, des objets du culte dépassa les préoccupations militaires. L’apogée du mouvement vint avec la démission, contrainte ou non, du prêtre, son abjuration éventuelle ou son mariage. Cette suppression de l’ancien ordre religieux s’accompagna d’efforts pour en créer un nouveau, sous forme de différents cultes révolutionnaires et d’une désacralisation radicale de la vie quotidienne. Les noms des rues et des villes, les prénoms, le calendrier perdirent toute référence au passé chrétien. Les dimanches ou jours de fêtes furent remplacés par les décadis, qui enlevèrent un ou deux jours de repos par mois.

Deux conclusions : (a) La démarche de l’actuel gouvernement est parfaitement cohérente et tire son inspiration d’au moins trois ou quatre sources : l’idéologie parfaitement élitiste des Lumières qui a inspiré la franc-maçonnerie (rappelons-nous que dans les années 1780, le Grand-Maître des Francs-Maçons était le duc d’Orléans, et que la malheureuse princesse de LAMBALLE dont on promena la tête au bout d’une pique en 1789 occupait dans cette organisation une place éminente) ; l’hégélianisme relooké à la sauce de papa MARX ; l’enthousiasme révolutionnaire fondamentalement terroriste sur le plan intellectuel. (b) La France est dans cette situation. Il y a au moins trois sources de soulèvements révolutionnaires possibles, propices au déchaînement d’une véritable guerre civile : celui des chômeurs, des personnes en situation précaire, des classes moyennes qui s’appauvrissent ; celui des résistants au « changement de civilisation » que veut instaurer madame TAUBIRA (ce sont ses propres paroles) ; celui des banlieues où vivent de nombreux immigrés. Plutôt que de diviser les Français, François-Normal Ier devraient les rassembler autour de la lutte contre la pauvreté, autour de l’amour de la patrie, et autour d’un sérieux retroussage de manches pour relever celle-ci. François-Normal Ier a préféré faire la guerre, comme les révolutionnaires !

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