lundi 3 juin 2013

Les cinq sources...

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Dans un très ancien billet, j'ai parlé du livre de Jacques RUEFF, Les dieux et les rois (Hachette, Paris 1968). Bien que je n'adhère pas à certaines conclusions de ce livre (ni à certains de ses principes posés a priori), il apporte des éclairages très importants sur les types de civilisation par lesquelles l'humanité est passée avant d'en être arrivée au point où elle en est aujourd'hui. En gros, une humanité soumise aux dieux, puis une humanité désenchantée des dieux (cf. Marcel GAUCHET), soumise au seul bon vouloir de l'homme, jadis une humanité jupitérienne, puis aujourd'hui une humanité prométhéenne. Soyez patient et lisez jusqu'au bout.
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Jacques RUEFF identifie cinq sources à l'action contraignante : la force, l'autorité divine, la conscience, la justice des hommes, le mécanisme des prix. Dans la situation actuelle de notre patrie, il est intéressant de voir comment ces forces s'exercent sur les comportements individuels et les  comportements sociaux.
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RUEFF indique que "la plus simple des actions contraignantes est celle que le fort exerce sur le faible". Par là, le fort peut "infliger à toute personne moins forte que lui des sensations douloureuses, essentiellement indésirables, donc infléchir à son gré le comportement de la personne asservie". Et il ajoute : "Ce mode de contrainte est générateur des sociétés sauvages, dont l'état de nature fournit le tragique tableau". Les événements récents du Trocadéro, d'une part, et les arrestations arbitraires dont je vous ai tracé le tableau dans quelques billets précédents, de l'autre, montrent bien que ce mode de contrainte est en train de prendre le pas dans la gouvernance de notre patrie. On peut comprendre que des voyous qui vivent dans des sociétés sauvages veuillent imposer leur existence par la force. On comprend moins bien l'usage des gaz lacrymogènes contre des enfants ou des vieillards, ordonnés par Manuel GAZ, au motif qu'ils sont présents dans une manifestation autorisée qui déplaît au pouvoir en place, ou on comprend encore moins les rétentions arbitraires et illégales de veilleurs ou de porteurs de tee-shirts de la Manif pour tous. Manuel ! Vous participez des sociétés sauvages ! Votre menton me fait peur et plus encore vos yeux. 
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Parlant de l'autorité divine, RUEFF dit ceci : "Si le croyant ne trouvait pas dans l'amour de son Dieu des mobiles assez forts pour balancer ceux que lui inspirent ses désirs ou ses passions, sa foi les renforceraient de la désirabilité des récompenses promises aux hommes qui observent les Commandements et de l'indésirabilité des châtiments promis à ceux qui les violent". Ce constat est, pour le chrétien, un contresens absolu. En hébreu torah veut dire "direction à prendre". Le mot a été malencontreusement traduit en grec par nomos, puis dans les traductions en langues vernaculaires, par loi. Ainsi le chrétien trouve sa liberté dans la rencontre d'une personne qui dit : "Je suis le chemin, la vérité et la vie". Le péché ne s'évalue donc pas en termes de morale, mais en termes d'erreur ou de ratage. On peut vouloir l'erreur, la préférer à la vérité ; ça n'a rien à voir avec la morale. Dans l'état actuel de notre patrie, les décisions prises aussi bien par les pouvoirs publics que par les citoyens relèvent bien souvent de l'erreur ou du ratage. Or c'est la vérité "qui nous rend libres". Messieurs BINET et MICHEL, vous me faites peur avec votre tête d'ange (pour le premier), ou votre air buté (pour le second) !
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De la conscience, RUEFF indique que si son action contraignante "est particulièrement claire dans les sociétés théocratiques" elle n'en "est pas moins apparente dans celles qui font appel au sens moral des individus pour leur imposer le respect de certaines règles d'action". Là encore, à mon humble avis, il y a contresens total. JESUS n' a jamais parlé de bien et de mal, jamais ! Et décrire ainsi des sociétés théocratiques, sans dire expressément quand on parle à des Français, que l'on fait allusion à l'Ancien Régime et à la chrétienté, n'est pas juste, même si, hélas, le Christ s'y était transformé en christianisme et sa Parole en religion. Non que le sens moral soit inutile en politique ; il est même indispensable, à condition que l'on dise clairement à quoi il se réfère. Il y a le principe de réciprocité, l'empathie, le respect des différences et de l'altérité, le respect de l'humain dans l'homme. Mais comment définir ces principes si l'on dénie toute existence de la Vérité, et qu'on fait flotter cette notion sur le vague océan des passions et des désirs du moment. C'est ce que nous vivons avec les lois élaborées par nos gouvernants : redéfinition du contour du mariage, euthanasie, recherche sur l'embryon et les cellules souches, etc. Monsieur le Président de la République, monsieur AYRAULT, vous faites semblant de savoir ou vous allez, mais vous n'êtes pas maître de l'avenir, et vous me faites très, très peur quand je vous vois ignorer les récifs sur lesquels vous faites voguer le navire de notre patrie.
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Fort justement, parlant des comportements individuels, RUEFF note que "l'influence contraignante du sens moral, si elle coïncide généralement avec celle qu'exerce la foi religieuse, est loin d'avoir, au moins à l'égard de la grande majorité des hommes, la même efficacité. Aussi les autorités sociales sont-elles amenées, dans les sociétés où la foi religieuse n'est plus universelle et toute- puissante, OU LORSQU'ELLES VEULENT INFLUENCER DES ACTES QUI N'ONT PAS ETE VISES PAR LA VOLONTE DIVINE, à faire appel à une autre forme d'action contraignante, DIRECTEMENT ADMINISTREE par elle". Et RUEFF met dans le panier des contraintes de la justice humaine, la carotte des honneurs, des promotions, ou le bâton de la loi, sculpté par le législateur et manié par la justice. Mais dans notre patrie, pouvons-nous faire confiance à un législateur qui n'écoute pas les citoyens et à des juges qui se payent un "mur des cons" ou prennent comme expert neurologue (cf. le juge GENTIL une amie proche qui fut témoin à son mariage et qu'il a fait payer à dix fois le tarif l'expertise de madame BETTENCOURT ?) Dans ce contexte national, on voit bien que les décisions (contraignantes) de la justice ne dépendent que d'un pouvoir sans partage qui ne jouit que du bonheur de son exercice ? Madame MARTRES, monsieur GENTIL, en voyant vos agissements, j'ai peur de ne pouvoir vous accorder le moindre milligramme de confiance, en vous d'abord, dans la justice ensuite.
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Et puis il y a une dernière force contraignante, et je dirai même dominante aujourd'hui, puisque l'homme est réduit à n'être qu'un Homo economicus : le mécanisme des prix. "Le prix, dit Jacques RUEFF, est le sacrifice [consenti par le vendeur qui se prive] de l'objet vendu, il est le sacrifice consenti [par tout acheteur] en vue de la satisfaction attendue de l'objet acquis". Les vendeurs, il semble bien qu'ils se soucient du sacrifice comme d'une guigne et qu'ils sont prêts à vendre des produits à l'obsolescence programmée pour en retirer un bénéfice maximum. Et c'est précisément ce refus du sacrifice qui animent les grandes compagnies (non respect des droits sociaux, exploitation éhontée des salariés, tromperie sur la marchandise en quantité et en qualité, etc.), ou le refus du sacrifice pour l'acheteur qui ne veut point payer au juste prix l'objet désiré (nourriture, vêtements, par exemple). Or il ne semble pas que les acteurs économiques mondiaux, européens ou nationaux veuillent examiner la portée de ces abus en termes de civilisation et d'évolution de l'humanité. Monsieur BAROSO, monsieur MOSCOVICI, et vous tous, qui ne voyez pas plus loin que le bout de votre nez, vous me faites peur ; vous pensez à votre pouvoir, non au bien commun. 
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Depuis plusieurs décennies, nos gouvernants n'ont guère été brillants dans l'usage qu'ils ont fait de ces forces contraignantes. Aujourd'hui, le sommet du mésusage est atteint avec l'application de la force policière à ceux qui ne sont pas d'accord avec les socialistes et leurs chefs, avec le déni absolu des droits de la conscience, l'ignorance absolue et le mépris de toutes les croyances notamment et surtout de celles qui ont façonné notre patrie, avec une justice à géométrie variable et des juges dépourvus d'impartialité, et avec une politique économique aveugle qui, juste souvent quand elle veut bien limiter les abus des vendeurs, se refuse toutefois à imposer aux acheteurs les sacrifices nécessaires.
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Et le moyen de conjurer la peur que l'usage intempestif ou l'ignorance de ces forces contraignantes font naître, c'est de nous unir, de manifester notre refus, visiblement, sans injures ni violences, sans jamais céder à la  provocation et d'adhérer à la Vérité, laquelle, je l'ai dit mille fois, est une personne et porte un nom.
 

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