samedi 15 juin 2013

Les grands et le peuple, deuxième billet du 15 juin 2013

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Avant que vous ne lisiez ce deuxième billet, je vous invite à prendre connaissance du premier, consacré à la Résistance... Je m'absente jusqu'à lundi matin, et reprendrai donc mes billets lundi après-midi. Mais avant de partir, je voudrai vous faire part de ce que Gustave THIBON disait du rapport entre ceux qu'il appelle LES GRANDS d'une part et LE PEUPLE de l'autre. Il y a matière à réflexion, quand on considère les abus et les scandales qui  fleurissent chez les premiers et les douleurs qui gémissent chez le second. Voici les paroles qu'il met dans la bouche d'un homme du peuple. Hors contexte, on pourrait croire qu'il considère comme bas tous ceux du peuple, mais ce n'est pas le cas, comme vous l'allez voir :
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"Tu n'avais pas le droit de me ressembler, peut dire l'homme d'en bas à l'homme d'en haut. Tu as exaspéré et déchaîné ma bassesse en me révélant le tienne. L'envie qui me dévore aujourd'hui n'est que le cadavre de ma vénération d'hier. Tu as tué en moi le sens vivant de la hiérarchie, la douceur et la noblesse de l'obéissance. Elle a eu certes la vie dure, CETTE IMAGE DE TA JUSTICE ET DE TA BONTÉ, il a résisté longtemps ce pauvre respect ébloui qui berçait mes rêves et ma fatigue, mais il a bien fallu qu'il succombe à la fin sous tes coups. Tu as fini par me prouver que tu me ressemblais. Eh bien ! je veux maintenant que nous nous ressemblions tout à fait (cette volonté s'appelle révolution, égalitarisme, communisme...) - Pressens-tu le mal que tu m'as fait ? La justice et l'amour m'ont menti par ta bouche. Tu m'as amputé de la meilleure partie de moi-même : ma confiance en toi, et en tout l'ordre humain et divin que tu représentais. Car tu étais aussi pour le peuple le support et le messager du ciel, et l'image de Dieu s'est pourrie en moi avec ton image. Par ta faute, je me suis senti seul et orphelin, j'ai perdu ce sentiment d'une grande réalité supérieure à moi et qui me portait, me gardait et nourrissait dans mon cœur une résignation sans amertume ET UNE ESPÉRANCE SANS FIÈVRE ; j'ai cessé de me sentir dépassé, je n'ai plus rien vu au-dessus de moi-même - au-dessus de ma platitude et de ma faiblesse SI CE N'EST LE MENSONGE. Comprends-tu maintenant que j'essaie de recréer le monde à ma misérable image ?" (In Diagnostics. Essai de physiologie sociale.)
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Ce texte d'une profondeur confondante se passe de commentaires. Il convient de le méditer et d'exiger de nos responsables politiques, quel que soit le niveau de leur responsabilité, de nous donner la preuve de cette grandeur d'âme et de ce dépassement d'eux-mêmes. Je ne suis pas bien sûr que nous en prenions le chemin.

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