jeudi 4 juillet 2013

Nouvelles de la Résistance, mort de la République à la Grille du Coq, deuxième billet du 4 juillet

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Nous voilà partis. Il est 1 h 10. Nous avisons, Matthieu, Charles et moi-même une bouche de métro ouverte, nous y engouffrons, pensant prendre la dernière rame. Il est 1 h 13. C'est trop tard. Après des détours sans nombre dans des couloirs déserts, nous parvenons à trouver une issue et sortons non loin d'une rue qui s'appelle rue Brisemiche (c'est le cas de le dire) ce que j'ai pu constater en regardant le plan de Paris. Nous voilà partis à pieds pour l'Elysée. Nous y sommes en 20-25 minutes et arrivons par l'Avenue Gabriel à hauteur de la grille du coq. Devant ladite grille, une femme policier crispée est suspendue à son téléphone. Arrive un autre policier avec une belle casquette. Ils se concertent. Espacés de deux mètres les uns des autres, nous restons debout, silencieux, immobiles. Puis nous voyons arriver des voitures de police. J'en ai compté cinq. En descendent des membres des forces de l'ordre. Ils bavardent entre eux. Je vois une voiture grise banalisée arriver, et donner des ordres (je suppose) au gradé qui commande la petite troupe. Les policiers font mouvement et passant derrière nous tout en barrant le trottoir de l'avenue Gabriel donnant accès à la Place de la Concorde finissent par entourer la totalité des personnes présentes (entre temps, une délicieuse vieille dame, dont je reparlerai, est venu donner des morceaux de brioche à tous ceux qui veillent). Puis, par le trottoir et par derrière, nous sommes fermement invités à nous regrouper au coin de l'avenue Gabriel et de l'Avenue de Marigny. Nous apprenons que du côté de la rue du Faubourg Saint-Honoré, les choses semblent se gâter. Munis de leur sono, en effet, les Veilleurs ont rejoint les Veilleurs débout ; ils entament une deuxième veillée qui sera dispersée violemment sans que je puisse savoir si les traitements réservés au Veilleurs debout et aux Veilleurs ont été les mêmes.
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J'indique à un policier que l'ordre de regroupement n'est pas légal, que nous n'entravons nullement la circulation, n'enfreignons aucune la loi, nous contentant d'être là. L'un d'eux me dit : "nous avons des ordres et des contre-ordres ; nous vous comprenons et vous soutenons" (sic). J'avise l'un d'entre eux, souriant et sympathique et obtient de lui la promesse qu'il n'y aura pas d'embarquement, qu'il m'en donne sa parole. Je dis à un jeune manifestement près de se rebeller qu'il est préférable, moyennant cette promesse, d'obéir à cet ordre illégal. Nous voilà donc parqués (le mot n'est pas trop fort) dans un espace clos du côté de l'avenue Gabriel et de l'Avenue Marigny, par des barrières, les deux autres côtés étant formés par un cordon de policiers, épaules contre épaules. Nous attendons. Rien ne vient. Je discute avec un commissaire, un grand, assez arrogant, à la différence de ses subordonnés, et lui fais remarquer que ce qui se passe est illégal. Il me dit que c'est une manifestation. Je proteste. Oui, dit-il vous avez l'air de bien vous connaître (ce qui est absolument faux, mais ne le restera pas si le Préfet de Police continue d'agir ainsi), vous êtes là au nom d'un objectif commun, et de plus, au titre du Plan Vigipirate, vous êtes dans un endroit sensible. On voit la manière rhétorique, et parfaitement idéologique du raisonnement, ces paroles creuses et staliniennes sur quoi s'est appuyée madame DUTARTRE pour condamner Nicolas BERNANRD-BUSSE (n'omettez pas de lui écrire). Nous ne manifestons pas en effet, nous témoignons. Le malaise des policiers est de plus en plus visible. Il est presque 3 heures du matin. Un des jeunes qui manifestement semble bien être au courant des veillées, demande au commissaire, le grand sec et un peu arrogant, les raisons pour lesquelles nous sommes ainsi parqués. Réponse comme je viens de vous le dire. Il lui demande son numéro matricule et son nom. Refus cinglant (ce qui n'est pas légal). Un journaliste de radio Notre-Dame enregistre les conversations ; le grand sec lui demande s'il est journaliste ; oui dit-il ! Il lui demande sa carte de presse, ce qu'il fait volontiers et en note les données sur un calepin. En retour, le journaliste lui pose la même question : votre nom et votre matricule, puisque moi j'ai répondu. Refus catégorique. De l'autre côté de l'Avenue de Marigny, un groupe de Veilleurs chante l'hymne de l'espérance. Miraculeusement il est libre d'aller et venir. Mais rapidement, il est encadré par des policiers prélevés sur ceux qui nous entourent et il est prié de dégager.
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Grâce au ciel, les textes que j'avais donnés à Gauthier, j'en ai un double. Je peux lire à voix forte un texte de LANZA del VASTO, et le jeune lit la suite. Je lis aussi un texte de Simone WEIL sur la liberté. La vielle dame, elle, dort paisiblement au pied  d'un arbre, enveloppé dans un poncho de plastique, protégée par son sac de couchage, un chapeau rabattu sur le visage. Merveilleuse vieille dame ! Les choses ne s'arrangent pas. Tenez-vous bien, on nous parque, puis on nous somme de vider des lieux où nous n'avions aucunement l'intention de nous concentrer. Il faudra en effet les sommations avant l'usage de la force pour nous faire partir. On nous laisse filer par groupe de deux, l'un sur un trottoir, l'autre sur le trottoir d'en face de l'Avenue Marigny.
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Ce soir là , à la grille du Coq, la démocratie de monsieur HOLLANDE est bien morte, la démocratie tout court. Jamais nous n'oublierons que l'on force des hommes, contre ce que leur dit leur jugement et leur conscience, à obéir à des ordres injustes pour assurer à monsieur HOLLANDE et à sa compagne un paisible sommeil. Le divorce est consommé, définitivement. Et nous continuerons jusqu'à ce qu'il cède ! De manière non violente, paisible, sereine, mais déterminée.
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Oui, à la grille du Coq, la démocratie, les droits de l'homme dont nous étions si fiers ont été enterrés bel et bien. Adieu provisoire. Rendez-vous le 14 juillet. Il pourrait bien nous révéler quelques surprises !
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Je n'arrive pas à me connecter à
 
pour déposer mon témoignage et ma plainte. Peut-on m'aider ?

3 commentaires:

Unknown a dit…

Nous ne sommes resté que jusqu a 1h30 voyant la nervosité des policiers et CRS ... Ils n auront pas le dernier mots.

tippel a dit…

Merci au journaliste de la nuit du 3 au 4 juillet, une vraie et vivifiante information toute fraiche du matin.

MALTAISE a dit…

Nous sommes effectivement dans un état policier: poursuites et punitions systématiques de personnes osant exprimer une opinion différente n' ayant pour but que d' empêcher la dérive décidée par le gouvernement.