mercredi 20 novembre 2013

A propos des imbéciles, précisions de Bernanos... Premier billet du 20 novembre 2013

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Mes lecteurs habituels ont dû s'étonner de constater que depuis deux jours, je suis resté silencieux et que, contrairement à mon habitude, je n'ai pas pris soin de les avertir que j'interrompais pour absence momentanée de la publication de mes billets. Ce n'est pas mon habitude. J'ai quelques excuses. Je crois avoir déjà mentionné que j'ai eu une très grosses panne informatique. Elle a survenu au moment même où le site du Rouge et Noir était mis momentanément hors d'usage, en raison d'attaques très graves de la part de hackers tout comme celui du Salon beige avait dû redoubler de précautions pour s'en prémunir. Bref, je me demande, sans psychoter, si ce crash qui a failli me faire perdre des années de travail, est dû au hasard, seulement au hasard. Pour essayer de récupérer mes données, j'ai eu recours à un spécialiste qui a réussi à compléter le sauvetage (commencé par un ami) de nombreux dossiers. Je n'ai pas tout retrouvé, simplement l'essentiel. Mais il a fallu pour ça que je me sépare, pendant deux jours, de la prothèse existentielle qu'aurait tendance à devenir mon ordinateur. Je vais essayer de me rattraper en redoublant d'efforts pour vous soutenir le morale et souffler sur les braises de la Résistance.
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Parlons d'abord des imbéciles.
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BERNANOS n'a pas attendu de publier au Brésil La France contre les robots pour donner la très drolatique définition d'un imbécile, dans laquelle peuvent se retrouver, s'ils sont modestes, un certain nombre de soi-disant "intellectuels" du genre Caroline FOUREST ou Bernard HENRI-LEVY. Déjà, dans un ouvrage majeur, publié en 1937 et que je viens de découvrir dans le détail, il produit un des pamphlets les plus volcaniques, les plus étincelants, les plus percutants que j'ai jamais l'occasion de lire, ceux de Léon BLOY mis à part ; je veux parler des Grands cimetières sous la lune. Il n'y va pas de main-morte, lui le monarchiste, pour condamner la compromission et la lâcheté des bien-pensants, des bigots,des possédants, des adorateurs de l'Argent, et, hélas, de nombreux membres du clergé majorquin (archevêque en tête) avec les révolutionnaires franquistes ; ce n'est pas qu'il aime les Rouges, c'est qu'il aime JESUS et la justice. Son fils, Yves, combat, à l'âge de 17 ans, avec les Phalanges ; BERNANOS prend bien soin, exemple à l'appui, de ne point confondre les Phalanges avec les suppôts de FRANCO. Mais il a vu des dizaines de pauvres gens tirés la nuit de leur maison, suspectés d'intelligence avec les Rouges, conduit près des cimetières et exécutés sans jugement d'une balle dans la tête, et cette injustice-là, cette "loi des suspects" jamais promulguée, et méthodiquement appliquée, il ne la supporte pas. Il a ces mots (il convient de les dédier à la lamentable classe politique qui prétend gouverner notre patrie ou la gouverne effectivement) :
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"L'idée de grandeur n'a jamais rassuré la conscience des imbéciles. La grandeur est un perpétuel dépassement, et les médiocres ne disposent probablement d'aucune image qui leur permette de se représenter son irrésistible élan (c'est pourquoi ils ne la conçoivent que morte et comme pétrifiée, dans l'immobilité de l'Histoire). Mais l'idée du Progrès leur apporte l'espèce de pain dont ils ont besoin. La grandeur impose de grandes servitudes. Au lieu que le progrès va de lui-même où l'entraîne des expériences accumulées. Il suffit donc de ne lui opposer d'autre résistance que celle de son propre poids. C'est le genre de collaboration du chien crevé avec le fleuve qu'il descend au fil de l'eau. [...]."
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"La colère des imbéciles remplit le monde. Elle est sans doute moins à craindre que leur pitié. L'attitude la plus inoffensive de l'imbécile en face de la douleur ou de la misère est celle de l'indifférence imbécile. Malheur à vous si, LA BOITE A OUTILS SUR LE DOS, il dirige ses mains maladroites, ses cruelles mains vers ces charnières du monde ! Mais il a déjà fini de tâter, il vient de tirer de LA BOITE A OUTILS une paire de cisaille énorme. En homme pratique, il croit volontiers que la douleur comme la pauvreté n'est qu'un vide, un manque, enfin rien. Il s'étonne qu'elles lui résistent. Le pauvre n'est donc pas simplement, par exemple, le citoyen auquel il ne manque qu'un compte en banque pour ressembler au premier venu !"
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[...]. Les besoins du peuple sont trop simples, d'un caractère trop concret, d'une nécessité trop pressante. Il exige du travail, du pain et un honneur qui lui ressemble, aussi dépouillé que possible de tout raffinement psychologique, un honneur qui ressemble à son travail et à son pain.[...]."
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Je m'en voudrai de vous lasser en poursuivant ces citations ; j'y retrouve, plongé dans la plus extrême stupéfaction, la description de l'actuelle classe dirigeante qui méprise le peuple, l'honneur de son travail et de son pain, cette classe dirigeante dont l'un des chefs sort de sa boîte à outils - il en a parlé, oui ou non, de la boîte à outils ? - les énormes cisailles de l'impôt, de la répression et d'une justice dévoyée. Les cisailles n'ont pas été jusqu'à rogner dans les avantages indus que la ruse, le mensonge et le dol ont accumulé sous les têtes (le mol oreiller des sinécures) et sous les fesses (les velours capitonnés du Sénat ou de l'Assemblée) de ces imbéciles bernanosiens qui pullulent en faisant la roue devant les caméras.
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A tout à l'heure.

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