jeudi 15 octobre 2015

15 octobre 2015. Nouvelles de la Résistance. Quand le Magazine Le Point censure les commentaires.

Le premier billet du jour résume une aventure qui vient de m'arriver, la censure par le modérateur, de la définition des imbéciles par BERNANOS, que je faisais à propos de ce qui suit et que j'appliquais à un auteur, Thomas GUENOLE. Mon commentaire était simplement la définition que BERNANOS donne des imbéciles, et qui me semble parfaitement s’appliquer à monsieur GUENOLE. Il n’est ni ignorant ni inculte. Il est universitaire et il vit de ce métier. C’est donc bien un intellectuel de profession. Le modérateur a rejeté mon commentaire. Comme il m’a été impossible de lui rétorquer, je le fais par l’intermédiaire de mon Blog.
   
-.
Sur fond orange je décris brièvement les faits.

Monsieur Thomas GUÉNOLÉ a écrit un livre intitulé : Les jeunes de banlieue mangent-ils les enfants ?, publié aux Éditions Le bord de l’eau. Je n’ai pas lu ce livre et ne puis donc en parler. Mais je suis assez d’accord avec l’idée que la généralisation de jugements hâtifs sur l’ensemble des jeunes de banlieues, dont nombre sont d’origine africaine ou arabe, n’est ni juste, ni fondée. Et du reste, ils méritent TOUS notre aide et notre amitié ; c’est la raison pour laquelle je me suis porté bénévole pour enseigner les Sciences naturelles dans une école de l’Association Espérance banlieues. Mais j’ai une bonne raison de protester contre la censure qu’a imposée le modérateur des commentaires de la Newsletter du Point à ma remarque sur cet interview. C’est donc à lui que s’adresse ce billet.

Extrait des propos de Thomas GUÉNOLÉ recueillis par Hugo DOMENACH et publié par la Newsletter du Point du 14 octobre 2015.

Voici d’abord les passages qui me hérissent le poil.

"Pourquoi attaquez-vous nommément Finkielkraut dans votre livre ?
Parce que c'est l'archétype de l'intellectuel « balianophobe », parce que c'est le meilleur d'entre eux et parce que c'est le père nourricier de tous les autres. Éric Zemmour, Élisabeth Lévy..., ce qu'ils écrivent et disent, c'est du sous-Finkielkraut. Éric Zemmour, c'est le Finkielkraut du pauvre ! C'est la même pensée, mais avec un niveau d'érudition, de rhétorique et de cohérence plus faible. Encore dans une catégorie en-dessous, on trouvera des éditorialistes comme Ivan Rioufol au Figaro ou la plupart des éditorialistes de Valeurs actuelles.

Comment expliquer que cette pensée soit dominante dans les médias aujourd'hui ?
La domination des intellectuels réactionnaires dans la bataille des idées ne date pas d'aujourd'hui. C'est la prise de conscience de la gravité du phénomène qui date d'aujourd'hui, ce qui n'est pas la même chose. C'est à partir du 11 Septembre qu'on assiste à une montée en puissance d'Alain Finkielkraut. Éric Zemmour le suit de quelques années à peine. L'apparition d'un journal comme Causeur n'aurait pas été possible avant les attentats. Le repositionnement de Valeurs actuelles à l'extrême droite s'inscrit aussi dans ce sillage. Plus largement, il y a des propos que des personnalités publiques tiennent depuis le 11 Septembre qui auraient fait l'objet d'un opprobre général et d'une interruption brutale de carrière auparavant. Par exemple les propos de Manuel Valls sur les Roms, ceux de Nicolas Sarkozy sur l'homme africain qui ne serait « pas assez entré dans l'histoire », etc.

Ces discours et ces idées-là sont-ils en train de se banaliser dans les médias, et donc dans la société française ? 
Je peux me tromper, mais je pense que c'est en train de se terminer. Je suis frappé par la montée en puissance d'intellectuels complètement de gauche, c'est-à-dire à la fois sur les sujets de société et sur la pensée économique. Je pense en particulier à Emmanuel Todd ou à Michel Onfray. Il y a un débat, mais je ne suis pas d'accord avec ceux qui accusent Michel Onfray d'être crypto-FN. Compte tenu de ses positions sur les sujets de société comme l'euthanasie ou le mariage des couples de même sexe et ses convictions économiques, son positionnement à la gauche radicale ne fait aucun doute. Pour lui, c'est le fait de s'occuper des pauvres sous l'angle économique et social qui est prioritaire. Pour moi, c'est un discours cohérent pour un penseur de la gauche radicale. J'ai l'impression qu'on arrive à un phénomène de saturation vis-à-vis de l'omniprésence pesante de la pensée réactionnaire."

Le commentaire censuré (au motif qu'il dérogeait à la charte déontologique ou éthique du site) était donc la définition que BERNANOS donne des imbéciles, et qui me semble parfaitement s’appliquer à monsieur GUENOLE. 

Pour ne s’en tenir qu’à l’une des règles de la communication éthique, Monsieur GUÉNOLÉ remplit au moins l’un des critères, celui de dire d’où il parle. D’après le Point, il a publié plusieurs articles sur les jeunes de banlieue dans le bienpensant journal Libération. Il parle en homme de gauche. Ce qu’on ne saurait lui reprocher, mais ce que l’on doit souligner. On peut imaginer que son travail d’enquête est marqué par une bienveillance a priori pour ces jeunes. Là encore, je trouve qu’il a raison sur la bienveillance.

Mais dans cette interview, que fait-il ? Il porte des jugements de valeur sur des écrivains, des journalistes, des éditorialistes, qui ne pensent pas comme lui, (qui, tant sur le fond que sur la forme, le valent bien), en les nommant. Ces jugements sont à la limite de l’insulte. Il ne prend pas la peine, par exemple, de prendre en considération les graves événements qui ont eu lieu aux alentours de la Place du Trocadéro il y a quelques longs mois, et qui étaient le fait, ne lui en déplaise, de nombreux jeunes venus des banlieues. Il n’a pas pris soin d’interroger les commerçants qui, ce jour-là, ont été victimes de pillages et de dévastation. Il n’a pas interrogé les habitants des quartiers où les dealers font la loi. Bref, à ses yeux (toujours à partir de l’interview), la balianophobie (!!!!??? : le tas de « phobes » augmente de taille) est injustifiée. Par ailleurs il pratique un amalgame insupportable entre ce qu'il appelle la balianophobie, les attentats du 11 septembre et le rejet de l'islam. Et de plus, il commet une grave erreur d'analyse, celle qui consiste à nier la différence, et donc l'identité à laquelle ces jeunes se rattachent.

Toujours à ce point de la réflexion, il aurait peut-être été utile que Thomas GUÉNOLÉ allât interroger les policiers et gendarmes chargés d’intervenir dans des quartiers prétendus sensibles. (Quoique que l’usage de ce mot soit en soi et un jugement et une condamnation). Et peut-être (je ne sais pas s’il l’a fait), devrait-il s’interroger sur les causes d’une montée du rejet général de ces jeunes (que je condamne absolument, monsieur le modérateur) qui ne fait qu’aggraver la situation. Des solutions à ces problèmes, il y en a. L’une d’elle consiste à supprimer les ghettos ethniques. Je vais voir si Thomas GUÉNOLÉ propose cette solution dans son livre ; elle suppose une diffusion de l'habitat dans le tissu urbain, et non pas sa concentration péri-urbaine.

La domination des intellectuels réactionnaires ne daterait pas d’aujourd’hui ? Je me pince pour y croire. Comment les médias aux ordres ont-ils réagi après les propos d’Eric ZEMMOUR. Comment ont-ils réagi après l’élection de monsieur FINKIELKRAUT à l’Académie Française ? Qui dominait ? Et en quoi le qualificatif de réactionnaire est-il infâmant (car c’est bien l’intention, parfaitement idéologique de Thomas GUÉNOLÉ : marquer du sceau de l’infamie ceux qui ont des idées déplaisant aux politiquement corrects) s’il désigne une opposition argumentée à la bienpensance ? Michel ONFRAY sort intact de la philippique, il est de gôôôôche ! On lui pardonne quelques écarts.

C’est la raison pour laquelle je maintiens intégralement mon opinion : monsieur GUÉNOLÉ semble être un très beau spécimen d’imbécile bernanosien (si je m’en tiens à l’interview ; mais pour vérifier si l’imputation est légitime, il faut lire le livre, ce que je vais faire, car la probité intellectuelle a un prix, 17 euros dans le cas d’espèce). J'ose espérer, sans trop y croire, que ce billet tombera sous les yeux du modérateur des commentaires au Magazine Le Point.

-

Aucun commentaire: