dimanche 14 août 2016

14 août 2016. Nouvelles de la Résistance. A propos de l'esclavage, réponse à un jeune homme critique.

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Ce n’est pas l’ignorance qui nous empêche de devenir vrai, c’est la lâcheté !
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1. LA CITATION DU JOUR.
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"Observez que ce sont vos semblables, des hommes créés comme vous, à l’image d’un Dieu."
In
Abbé SIBIRE.
L’aristocratie négrière ou Réflexions philosophiques et historiques sur l’esclavage et l’affranchissement des noirs, dédiées à l’Assemblée nationale.
Lesclapart et Desray, Paris, 1789, p. 62
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2. COMMENTAIRES.
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Ainsi que je l’ai dit hier, je réponds ici à un jeune homme avec qui j’ai eu sur Facebook des discussions, disons, un peu rudes. Paul prétend que l’esclavage a été aboli par la République révolutionnaire, et avance que la monarchie n’a rien fait pour le supprimer. Il convient, me semble-t-il de nuancer ces affirmations.

Le 3 juillet 1315, Louis X le Hutin, par ordonnance, faisait savoir que « le sol de France affranchit quiconque y pose le pied ». Il est évident que ce roi n’avait pas connaissance de l’existence du Nouveau Monde et donc des colonies américaines, et que nul ne peut savoir ce qu’il aurait dit d’un possible esclavage dans ces territoires. C’est en se fondant sur cette ordonnance qu’au milieu du XVIIe siècle, le Parlement de Bordeaux affranchit ipso facto des esclaves « importés » par des négriers.

Dans deux bulles aux termes dépourvus de toute équivoque, le Pape Paul III condamne en termes vigoureux l’esclavage (Sublimus Dei du 29 mai 1537 et Veritas ipsa du 2 juin 1537).

Le 8 mai 1779, Louis XVI abolit le servage (qui n’est pas l’esclavage, mais l’attachement d’une personne à une terre, alors que l’esclave est un bien meuble, et peut se vendre comme un objet).

Dans une lettre adressée à VIALLET, et datée probablement de juillet 1766, DIDEROT condamne en ces termes la proclamation de l’unité du genre humain que défendra quelques années plus tard le bon abbé SIBIRE ; ce grand humaniste dit que cette doctrine chrétienne est « la plus absurde et la plus féroce dans ses dogmes ». VOLTAIRE, un autre grand humaniste, le 11 octobre 1763 écrit ceci à d’ARGENCE à propos de la doctrine de l’unicité du genre humain : c’est « la superstition la plus infâme qui ait jamais abruti les hommes, et désolé la terre ». Il récidive dans une lettre adressée le 5 janvier 1767, à FRÉDÉRIC II de Prusse en proclamant que la doctrine de l’unicité du genre humain est « sans contredit la plus ridicule, la plus absurde et la plus sanguinaire qui ait infecté le monde »

Les 8 mars et 12 octobre 1790, l’Assemblée Nationale Législative confirme la constitutionnalité de l’esclavage. Le régime est encore monarchique.

Après bien des hésitations qui impliquent notamment les frère LAMETH et BARNAVE, désireux de maintenir l’esclavage car ils y ont de grands intérêts économiques, la Convention l’abolit le 16 pluviôse an II-4 février 1794, à l’initiative – faut-il le dire – de l’abbé GREGOIRE. Mais on attendra Louis XVIII et l’année 1817 pour que la Traite des Noirs soit abolie. Car, figurez-vous, la République, en la personne du Premier Consul, Napoléon Bonaparte a rétabli l’esclavage. Il n’est pas encore empereur… comme l’a dit Paul.

"En effet, par les clauses du traité d'Amiens du 25 mars 1802, le gouvernement britannique restituait les colonies françaises de la Martinique, de Tobago et de Sainte-Lucie. Les 16 et 18 mai suivants, Bonaparte faisait voter le maintien de l'esclavage dans ces colonies restituées :
Art. 1er. Dans les colonies restituées à la France, en exécution du traité d'Amiens, l'esclavage sera maintenu, conformément aux lois et règlements antérieurs à 1789.
Art. 3. La traite des noirs et leur importation dans lesdites colonies auront lieu conformément aux lois et règlements antérieurs à 1789."

Aboli en Guadeloupe et en Guyane, la loi du 20 mai ne l'y rétablit pas. Mais RICHEPANCE, en particulier, l'y réintroduira subrepticement.

En réalité, et c’est là un titre de gloire éternel à cet homme, il faut attendre Victor SCHOELCHER pour que cette infâme institution soit définitivement abolie, le 27 avril 1848. Il est membre du gouvernement provisoire de l’éphémère seconde République. Il est donc exact que, finalement, c’est la République qui a aboli l’esclavage. On ne saurait trop l’en féliciter.




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